CESSEZ-LE-FEU - JANVIER 2025

Les détails du cessez-le-feu à Gaza : Donald Trump a fait plier Netanyahou

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - le 15/01/2025.

 

Les détails du cessez-le-feu à Gaza: Donald Trump a fait plier Netanyahou

La nouvelle est tombée en début de soirée : Un cessez-le-feu commencera à Gaza le dimanche 19 janvier. Nous vous communiquons les détails de l’accord de cessez-le-feu, tels que les a obtenus le média palestinien « Quds News Network« . Donald Trump a fait plier Benjamin Netanyahou. J’avais évoqué la possibilité de ce dénouement, inattendu par sa rapidité, ce matin ici-même, mais j’étais comme vous, je ne voulais pas y croire tant que ce n’était pas acté. Les conditions de l’accord, telles qu’elles sont connues, représentent une vraie défaite politique pour Benjamin Netanyahou. Elles donnent raison aux combattants palestiniens d’avoir tenu ferme sur leurs positions de négociation depuis des mois. Certains diront, à juste titre, que le monde est à nouveau à l’endroit : Un président américain impose sa volonté à l’Etat d’Israël. Pour autant, ce n’est qu’un début, même s’il est essentiel. L’ordre du monde ne sera rétabli que le jour où les Palestiniens disposeront d’un Etat souverain.

Post X de la journaliste palestinienne Hind Khoudary, qui a survécu à Gaza depuis quinze mois: « Je veux embrasser le monde entier ».

Voici les conditions du cessez-le-feu telles que le média palestinien Quds News Network en a pris connaissance, en exclusivité :

Gaza (Exclusif)- Quds News Network a obtenu des détails exclusifs sur les mécanismes de mise en œuvre de l’accord sur l’échange de prisonniers palestiniens et israéliens et sur l’instauration d’un cessez-le-feu durable entre Israël et la Palestine. En voici les points essentiels :

Préparatifs de la deuxième phase

Selon les informations obtenues par Quds News Network, les deux parties, avec les médiateurs, visent à finaliser l’accord du 27 mai 2024.

Cette phase vise à échanger les prisonniers palestiniens et israéliens et à instaurer un calme durable. Les négociations se poursuivront et toutes les procédures de la première phase resteront en place jusqu’à ce qu’un accord soit conclu.

Retrait des forces israéliennes

Les forces israéliennes se retireront des zones densément peuplées le long des frontières de Gaza. Elles seront positionnées à 700 mètres à l’est de la bande de Gaza, avec quelques exceptions autorisant jusqu’à 400 mètres supplémentaires en cinq points spécifiques. Ces positions sont basées sur des cartes approuvées par les deux parties.

Détails de l’échange de prisonniers

Prisonniers malades et blessés : Neuf personnes sur une liste de 33 seront échangées contre 110 prisonniers palestiniens condamnés à perpétuité.

Détenus de Gaza : Israël libérera 1 000 prisonniers détenus après le 8 octobre 2023, qui n’ont pas été impliqués dans les événements du 7 octobre.

Prisonniers âgés : Les hommes de plus de 50 ans seront échangés dans un rapport de 1:3 pour les détenus condamnés à perpétuité et de 1:27 pour les autres.

Détenus célèbres : Ebra Mangesto et Hesham el-Sayed seront échangés dans un rapport de 1:30, ainsi que 47 prisonniers de l’accord Shalit de 2011.

Libérations spéciales : Certains prisonniers seront libérés à Gaza ou à l’étranger, sur la base de listes établies d’un commun accord.

Retrait du corridor de Philadelphie

Les forces israéliennes réduiront leur présence dans ce corridor au cours de la première phase. Après la libération du dernier prisonnier israélien le 42e jour, le retrait commencera et s’achèvera le 50e jour.

Poste frontière de Rafah

Le point de passage de Rafah sera rouvert aux civils palestiniens et aux blessés après la libération de toutes les femmes israéliennes détenues. Israël veillera à ce que le point de passage soit opérationnel immédiatement après la signature de l’accord.

Cinquante blessés militaires palestiniens passeront chaque jour, chacun accompagné de trois autres personnes. L’approbation d’Israël et de l’Égypte sera nécessaire.

Les opérations du point de passage s’aligneront sur les discussions à partir d’août 2024.

Sortie pour les civils malades et blessés

Tous les civils malades ou blessés sortiront par Rafah, conformément aux dispositions de l’accord du 27 mai.

Retour des Palestiniens déplacés à l’intérieur du pays

Les civils non armés déplacés du corridor de Netzarim retourneront au nord selon ces conditions :

Les piétons peuvent retourner par la rue Rashid le 7e jour et par la rue Salahudin le 22e jour, sans inspection.

Les véhicules retourneront au nord après inspection par une société privée approuvée par le médiateur.

Protocole d’aide humanitaire

L’aide humanitaire suivra un protocole strict, supervisé par les médiateurs. Les livraisons d’aide se poursuivront conformément aux lignes directrices convenues dans l’accord du 27 mai.

Ce plan de mise en œuvre reflète les efforts déployés pour apporter la stabilité et l’aide à Gaza, tandis que les médiateurs s’efforcent d’assurer le respect de l’accord par toutes les parties concernées.

La référence à l’accord quasi-finalisé du 27 mai 2024 n’est pas un hasard: le Courrier des Stratèges vous avait indiqué que le Hamas avait accepté le projet; c’est Israël qui l’avait fait échouer.

Il s’agit bien d’un retrait de la Bande de Gaza par l’armée israélienne ! J’ai lu ailleurs que l’armée israélienne avait accepté de se retirer du « corridor de Philadelphie » au sud de la bande de Gaza mais je dois encore le vérifier. Nous n’avons pas fini de parler de cet accord.

Trump est-il en train de mettre fin au génocide des Palestiniens de Gaza ?

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - Le 15/01/2025.

Trump est-il en train de mettre fin au génocide des Palestiniens de Gaza?

Donald Trump est-il en train de mettre fin au génocide que subissent les Palestiniens de Gaza ?

Il a en tout cas surpris Benjamin Netanyahou en le forçant à débloquer la négociation qui se déroule à Doha entre les Etats-Unis, l’Egypte, le Qatar et le Hamas. L’objectif est d’obtenir une libération des otages israéliens avant l’inauguration du 20 janvier. Les Palestiniens trouvent-ils en Trump un allié inattendu, lui qui menaçait, il y a quelques jours encore, de « déclencher l’enfer » si les otages n’étaient pas libérés ? Dans l’immédiat, la guerre pourrait s’arrêter. A long terme il faudra bien plus pour faire reconnaître les droits des Palestiniens.

Des manifestants brandissent des torches lors d’une manifestation appelant à la libération immédiate des otages détenus dans la bande de Gaza par le groupe militant du Hamas à Tel Aviv, Israël, le lundi 13 janvier 2025.Crédit : Ohad Zwigenberg / AP

C’est le développement inattendu de la semaine. Il y a une semaine, Donald Trump parlait, en conférence de presse, de « déclencher l’enfer » si les otages n’étaient pas libérés avant son inauguration. or, en fait, c’est Benjamin Netanyahou qui a été soumis à forte pression par l’équipe Trump.

Le Hamas est prêt, depuis des mois, à signer un accord comme celui qui est sur la table

Les négociateurs palestiniens ont donné leur accord à un schéma de cessez-le-feu. En fait, les négociateurs du Hamas, qui représentent l’ensemble des factions combattantes de la Bande de Gaza, avaient déjà donné leur accord au même schéma il y a des mois: les otages israéliens seraient relâchés contre un arrêt durable de l’intervention israélienne à Gaza.

Les tentatives d’obstruction des ministres israéliens Ben Gvir et Smotrich

Les manœuvres d’obstruction d’une partie du gouvernement israélien ont aussitôt recommencé: selon le Times of Israël:

« Le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a déclenché un tollé lundi en affirmant qu’il avait fait échouer à plusieurs reprises un accord de cessez-le-feu avec le Hamas au cours de l’année écoulée, tout en appelant le ministre des finances, Bezalel Smotrich, à se joindre de nouveau à lui pour contrecarrer un accord en cours d’élaboration. Les remarques de M. Ben Gvir ont suscité de vives critiques de la part des parents d’un certain nombre d’otages et des législateurs de l’opposition qui accusent depuis longtemps le Premier ministre Benjamin Netanyahu de s’opposer à un accord de cessez-le-feu afin de préserver sa coalition. (…) Toutefois, M. Ben Gvir a déclaré qu’il n’avait plus le pouvoir d’arrêter ce qu’il appelle « l’accord de capitulation » parce que M. Netanyahu a élargi la coalition en intégrant le parti Nouvelle Espérance du ministre des affaires étrangères Gideon Sa’ar en septembre de l’année dernière. « Récemment, d’autres acteurs qui soutiennent l’accord ont rejoint le gouvernement, et nous ne détenons plus l’équilibre des forces », a-t-il déploré ».

Comment l’émissaire de Donald Trump a forcé la main à Netanyahou

En réalité, la pression sur le gouvernement israélien pour arriver à la signature d’un cessez-le-feu est venue de Donald Trump. Selon Haaretz, en effet :

« Vendredi soir dernier, Steven Witkoff, l’envoyé du président élu Donald Trump au Moyen-Orient, a appelé du Qatar pour dire aux collaborateurs du Premier ministre Benjamin Netanyahu qu’il viendrait en Israël le lendemain après-midi. Les assistants ont poliment expliqué que c’était en plein shabbat, mais que le Premier ministre serait heureux de le rencontrer samedi soir. La réaction brutale de Witkoff les a surpris. Il leur explique dans un anglais salé que le shabbat ne l’intéresse pas. Son message était clair et net. Ainsi, s’écartant de manière inhabituelle des pratiques officielles, le premier ministre s’est présenté à son bureau pour une réunion officielle avec Witkoff, qui est ensuite retourné au Qatar pour sceller l’accord. Une semaine avant l’investiture de Trump, Jérusalem constate déjà un changement dans les règles du jeu qui a permis de sortir de l’impasse dans laquelle se trouvaient les négociations sur les otages. De manière inhabituelle, l’administration Biden sortante a laissé Witkoff diriger le processus, au motif que toute obligation contractée par les États-Unis incombera à Trump, et non à Biden. Witkoff est un investisseur et promoteur immobilier juif proche de Trump. Il n’a pas les antécédents des personnes qui remplissent habituellement les fonctions diplomatiques. « Witkoff n’est pas un diplomate. Il ne parle pas comme un diplomate, il ne s’intéresse pas aux manières et aux protocoles diplomatiques », déclare un haut diplomate israélien sous couvert d’anonymat. « C’est un homme d’affaires qui veut conclure un accord rapidement et qui va de l’avant avec une agressivité inhabituelle »

Les Démocrates aimeraient s’approprier le succès avant le 20 janvier

A première vue, rien ne pourra faire dérailler la signature de l’accord en vue du 20 janvier. Anthony Blinken, le Secrétaire d’Etat sortant, a prononcé un discours le 14 janvier sur l’avenir du gouvernement de Gaza « après la guerre », où il s’est attribué le mérite d’un accord imminent. C’est évidemment une imposture puisque le gouvernement Biden a été le complice constant des sabotages des négociations par Netanyahu et ses ministres tout au long de l’année 2024. Espérons, en tout cas, pour les Gazaouis, que la négociation aille, cette fois, jusqu’au bout.

En fait, Witkoff a forcé Israël à accepter un plan que Netanyahou avait rejeté à plusieurs reprises au cours des six derniers mois. Le Hamas n’a pas changé d’avis : la libération des otages doit être conditionnée à la libération des prisonniers palestiniens (la partie facile) et au retrait complet d’Israël de la bande de Gaza (la partie difficile). Netanyahou a rejeté cette condition et c’est ainsi qu’est né l’accord partiel proposé par l’Égypte.

Au départ, il était question d’un accord humanitaire limité. De plus en plus de conditions ont été ajoutées jusqu’à ce que la proposition devienne beaucoup plus importante et que ses grandes lignes soient claires : libération des otages, nouveaux accords régionaux et retrait total. Le corridor Philadelphie, que M. Netanyahu a qualifié l’été dernier de fondement de l’existence d’Israël, fait partie de l’accord. À la demande de l’Égypte, Israël s’en retirera totalement dans un premier temps.

Netanyahou peut-il encore faire échouer le deal?

Le Premier ministre israélien osera-t-il s’opposer à Donald Trump ?

Malgré cela, la balle reste dans le camp de Netanyahou, et personne ne peut être sûr de ce qu’il décidera à la dernière minute.

Lundi après-midi, il a informé le ministre des finances Bezalel Smotrich et le ministre de la sécurité nationale Itamar Ben-Gvir. M. Ben-Gvir votera contre tout accord, cela ne fait aucun doute. Pour lui, gagner des voix populistes lors des prochaines élections est plus important que de sauver des vies. Lorsque Smotrich a quitté la réunion avec le Premier ministre, il avait l’air pensif. Ceux qui lui ont parlé lundi ont eu l’impression qu’il pensait qu’il s’agissait d’un bon accord.

Mais à midi, il a annoncé qu’il s’agissait d’une catastrophe qu’Israël ne devait pas accepter. La déclaration de M. Smotrich n’a toutefois pas abordé la question essentielle, à savoir s’il considère qu’il s’agit d’une raison de quitter la coalition. S’il quitte la coalition, il entraînera Ben-Gvir avec lui et le gouvernement tombera. S’il se contente de s’opposer à l’accord, son opposition n’aura aucun sens – elle se limitera à du temps d’antenne dans les émissions de radio.

Cette question est liée à une autre, à savoir si Netanyahou peut faire passer le budget 2025 et mieux assurer la survie de la coalition, à la lumière de la crise sur le projet de loi Haredi et de la lutte intestine dans le camp ultra-orthodoxe pour savoir qui peut être le plus extrême.

La méthode Trump

La méthode Trump est connue depuis son premier mandat. Il n’aime pas la guerre, il préfère les accords économiques et commerciaux. Trump n’est pas du genre à supporter une guerre de Gaza qui s’éternise. Ceci ne veut pas dire qu’il soit l’ami des Palestiniens.

Toute la diplomatie de son premier mandat a consisté à chercher à obtenir des accords entre Etats arabes et Israël dans lesquels les Palestiniens n’étaient tout simplement plus pris en considération – au mépris du droit international.

Nous nous réjouirons si le cauchemar des Palestiniens de Gaza s’arrête dans quelques jours et si les otages israéliens encore vivants, bien qu’abandonnés par le gouvernement Netanyahou à de sordides considérations politiques, sont libérés par les milices palestiniennes.

Mais la crise de Gaza a commencé il y a des années et elle ne sera pas terminée par un coup de baguette magique.

La mascarade du cessez-le-feu

Source : RzO International - Le 17/01/2025. 

par Chris Hedges

Depuis des décennies, Israël joue la carte de la duplicité. Il signe avec les Palestiniens des accords censés être mis en œuvre par étapes. La première phase donne à Israël ce qu’il veut – en l’occurrence ici la libération des otages israéliens à Gaza – mais Israël ne met généralement pas en œuvre les phases suivantes qui mèneraient à une paix juste et équitable. Il provoque éventuellement les Palestiniens par des attaques armées aveugles pour se venger, qualifie la réaction palestinienne de provocation, et abroge l’accord de cessez-le-feu pour reprendre le massacre.

Si ce dernier accord de cessez-le-feu en trois phases est ratifié – et il n’y a aucune certitude qu’il le soit par Israël – il ne sera, je pense, guère plus qu’une pause dans les bombardements à l’occasion de l’inauguration présidentielle. Israël n’a pas l’intention d’arrêter son carrousel de la mort.

Le cabinet israélien a reporté le vote sur la proposition de cessez-le-feu tout en continuant à pilonner Gaza. Au moins 81 Palestiniens ont été tués au cours des dernières 24 heures.

Le matin suivant l’annonce de l’accord, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a accusé le Hamas d’avoir revu certains points de l’accord «dans le but d’extorquer des concessions de dernière minute». Il a prévenu que son cabinet ne se réunira pas «tant que les médiateurs n’auront pas notifié à Israël que le Hamas a accepté tous les éléments de l’accord».

Le Hamas a rejeté les affirmations de Netanyahou, et a réitéré son engagement en faveur du cessez-le-feu tel qu’il a été convenu avec les médiateurs.

L’accord comprend trois phases. La première, d’une durée de 42 jours, prévoit un arrêt des hostilités. Le Hamas doit libérer certains otages israéliens – 33 Israéliens capturés le 7 octobre 2023, dont les cinq femmes encore en captivité, les personnes de plus de 50 ans et les malades – en échange d’un millier de Palestiniens emprisonnés par Israël.

L’armée israélienne devra se retirer des zones peuplées de la bande de Gaza dès le premier jour du cessez-le-feu. Le 7ème jour, les Palestiniens déplacés seraient autorisés à regagner le nord de Gaza. Israël devra autoriser l’entrée de 600 camions d’aide alimentaire et médicale chaque jour à Gaza.

La deuxième phase, débutant le 16ème jour du cessez-le-feu, verrait la libération des derniers otages israéliens. Israël devrait achever son retrait de Gaza au cours de la deuxième phase, tout en maintenant une présence dans certaines parties du couloir de Philadelphie, qui s’étend le long de la frontière de 12 km entre Gaza et l’Égypte. Il doit aussi céder son contrôle sur le checkpoint de Rafah, entre Gaza et l’Égypte.

La troisième phase doit aboutir à des négociations en vue de mettre un terme définitif à la guerre.

Mais c’est le bureau de Netanyahou qui a déjà rejeté l’accord. Il a publié une déclaration refusant le retrait des troupes israéliennes du couloir Philadelphie au cours de la première phase de 42 jours du cessez-le-feu. «Concrètement, Israël restera dans le couloir Philadelphie jusqu’à nouvel ordre», tout en affirmant que les Palestiniens tentent de violer l’accord. Tout au long des nombreuses négociations de cessez-le-feu, les Palestiniens ont exigé que les troupes israéliennes se retirent de Gaza. L’Égypte a condamné la prise de son poste-frontière par Israël.

Les profondes dissensions entre Israël et le Hamas, même si les Israéliens acceptent finalement l’accord, menacent de le faire imploser. Le Hamas cherche à obtenir un cessez-le-feu permanent. Mais la politique israélienne est sans équivoque quant à son «droit» de se réengager militairement. Il n’y a pas de consensus sur la question de savoir qui gouvernera Gaza. Israël a clairement indiqué que le maintien du Hamas au pouvoir est inacceptable. L’accord ne mentionne pas le statut de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), l’agence des Nations unies qu’Israël a interdite et qui fournit l’essentiel de l’aide humanitaire apportée aux Palestiniens, dont 95% ont été déplacés. Rien n’est prévu pour la reconstruction de Gaza, qui n’est plus qu’un champ de ruines. Et, bien sûr, aucune piste pour un État palestinien indépendant et souverain n’est prévue dans l’accord.

Les mensonges et manipulations d’Israël sont tristement prévisibles.

Les accords de Camp David, signés en 1979 par le président égyptien Anouar el-Sadate et le Premier ministre israélien Menachem Begin, sans la participation de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), ont normalisé les relations diplomatiques entre Israël et l’Égypte. Mais les phases suivantes, parmi lesquelles la promesse d’Israël de résoudre la question palestinienne avec la Jordanie et l’Égypte, de permettre l’autonomie palestinienne en Cisjordanie et à Gaza dans un délai de cinq ans et de mettre fin à la construction de colonies israéliennes en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, n’ont jamais été honorées

Prenons par exemple les accords d’Oslo de 1993. Ces accords, signés en 1993, qui ont vu l’OLP reconnaître le droit d’Israël à exister et Israël reconnaître l’OLP comme la représentation légitime du peuple palestinien, et les accords d’Oslo II, signés en 1995, qui détaillaient le processus vers la paix et la création d’un État palestinien, étaient mort-nés. Ces accords stipulaient que toute discussion sur les «colonies» juives illégales devait être reportée jusqu’aux pourparlers sur le statut «final», date à laquelle le retrait militaire israélien de la Cisjordanie occupée devait être achevé. L’autorité gouvernementale devait être transférée d’Israël à l’Autorité palestinienne, censée être temporaire. La Cisjordanie a été divisée en zones A, B et C. L’Autorité palestinienne dispose d’une autorité limitée dans les zones A et B. Israël contrôle toute la zone C, soit plus de 60% de la Cisjordanie.

Le droit des réfugiés palestiniens à retourner sur les terres historiques qui leur ont été confisquées en 1948 lors de la création d’Israël – un droit inscrit dans le droit international – a été abandonné par le chef de l’OLP, Yasser Arafat, aliénant instantanément de nombreux Palestiniens, en particulier ceux de Gaza, où 75% sont des réfugiés ou des descendants de réfugiés. Edward Said a qualifié les accords d’Oslo de véritable instrument de capitulation palestinienne, de Versailles palestinien, et a qualifié Arafat de «Pétain des Palestiniens».

Les retraits militaires israéliens prévus par les accords d’Oslo n’ont jamais eu lieu. L’accord provisoire ne comportait aucune disposition visant à mettre fin à la colonisation juive, mais seulement l’interdiction de «mesures unilatérales». Les colons juifs étaient au nombre d’environ 250 000 en Cisjordanie au moment des accords d’Oslo. Ils sont aujourd’hui au moins 700 000. Aucun traité définitif n’a jamais été conclu.

Le journaliste Robert Fisk a qualifié les accords d’Oslo d’«imposture, de mensonge, de ruse pour amener Arafat et l’OLP à abandonner tout ce pour quoi ils avaient lutté pendant plus d’un quart de siècle, un moyen de créer de faux espoirs afin de réduire à néant l’aspiration à la création d’un État».

Le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin, qui a signé les accords d’Oslo, a été assassiné le 4 novembre 1995 à la suite d’un rassemblement de soutien aux accords, par Yigal Amir, un étudiant en droit juif d’extrême droite. Itamar Ben-Gvir, aujourd’hui ministre de la Sécurité nationale d’Israël, était l’un des nombreux hommes politiques d’extrême droite à avoir proféré des menaces à l’encontre d’Ytzhak Rabin. La veuve de ce dernier, Leah, a accusé Netanyahou et ses soutiens – qui distribuaient des tracts lors de rassemblements politiques représentant Rabin en uniforme nazi – d’être responsables du meurtre de son mari.

Depuis, Israël a mené une série d’assauts meurtriers sur Gaza, nommant cyniquement les opérations de bombardement «tondre la pelouse». Ces attaques, qui font des milliers de morts et de blessés et dégradent encore davantage les fragiles infrastructures de Gaza, portent des noms comme Operation Rainbow (2004), Operation Days of Penitence (2004), Operation Summer Rains (2006), Operation Autumn Clouds (2006) et Operation Hot Winter (2008).

Israël a enfreint l’accord de cessez-le-feu conclu en juin 2008 avec le Hamas, sous l’égide de l’Égypte, en lançant un raid frontalier qui a tué six membres du Hamas. Ce raid a déclenché, comme Israël le souhaitait, une riposte du Hamas, qui a tiré des roquettes et des obus de mortier sur Israël. Les tirs du Hamas ont fourni le prétexte à une attaque israélienne massive. Israël, comme toujours, a justifié sa frappe militaire par son droit à la défense.

L’opération Cast Lead (2008-2009), au cours de laquelle Israël a mené un assaut terrestre et aérien durant 22 jours, l’armée de l’air israélienne ayant largué plus de 1000 tonnes d’explosifs sur Gaza, a fait 1 385 morts – selon le groupe israélien de défense des droits de l’homme B’Tselem -, dont au moins 762 civils, dont 300 enfants. Quatre Israéliens ont été tués au cours de la même période par des roquettes du Hamas et neuf soldats israéliens sont morts à Gaza, dont quatre victimes de «tirs amis». Le journal israélien Haaretz rapportera plus tard que l’opération Cast Lead a été préparée au cours des six mois précédents.

L’historien israélien Avi Shlaim, qui a servi dans l’armée israélienne, a écrit que «la brutalité des soldats d’Israël n’a d’égale que la mendicité de son porte-parole… leur propagande est un tissu de mensonges… Ce n’est pas le Hamas mais Tsahal qui a rompu le cessez-le-feu. L’armée israélienne ont violé le cessez-le-feu en menant un raid à Gaza le 4 novembre, au cours duquel six hommes du Hamas ont été tués. L’objectif d’Israël n’est pas seulement de défendre sa population, mais de renverser à terme le gouvernement du Hamas à Gaza en retournant le peuple contre ses dirigeants».

Ces séries d’attaques contre Gaza ont été suivies par des assauts israéliens en novembre 2012, connus sous le nom d’opération Pillar of Defense, puis en juillet et août 2014 avec l’opération Protective Edge, une offensive de sept semaines qui a fait 2 251 morts parmi les Palestiniens, ainsi que 73 Israéliens, dont 67 soldats.

Ces agressions de l’armée israélienne ont été suivies en 2018 par des manifestations majoritairement pacifiques de Palestiniens, baptisées La grande marche du retour, le long de la clôture de Gaza. Plus de 266 Palestiniens ont été abattus par des soldats israéliens, et 30 000 autres blessés. En mai 2021, Israël a tué plus de 256 Palestiniens à Gaza à la suite d’attaques de la police israélienne contre des fidèles palestiniens dans l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem. D’autres agressions contre des fidèles de la mosquée Al-Aqsa ont eu lieu en avril 2023.

Puis, le 7 octobre 2023, les barrières de sécurité qui cernent Gaza, où les Palestiniens dépérissent sous blocus depuis plus de 16 ans dans cette prison à ciel ouvert, ont été franchies. Les attaques menées par des Palestiniens armés ont fait quelque 1200 morts parmi les Israéliens – dont des centaines tués par Israël lui-même – et ont donné à Israël le prétexte qu’il attendait depuis longtemps pour mettre Gaza à feu et à sang, dans le cadre de la fameuse opération Swords of Iron War.

Cette macabre saga n’est pas terminée. Les objectifs d’Israël demeurent inchangés, à savoir éradiquer les Palestiniens de leur terre. Cette dernière proposition de cessez-le-feu n’est qu’un chapitre de plus du cynisme d’Israël. Il se peut qu’il s’effondre de bien des manières et, je le crois, qu’il s’effondrera.

Mais prions, au moins en cet instant, pour que le massacre cesse.

source : The Chris Hedges Report via Spirit of Free Speech

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