La décision du président russe d’ordonner une action militaire dans l’Ukraine voisine à partir du 24 février 2022 en a choqué plus d’un, y compris moi-même. La
question qui se pose à ce stade, près de deux semaines après le début de l’action militaire des forces russes et autres en Ukraine, est de savoir ce qui a poussé la Russie à s’engager dans ce que
les médias occidentaux décrivent comme une guerre d’agression unilatérale et injustifiée. Une menace publique proférée par le président ukrainien et comédien Volodymyr Zelensky le 19 février,
lors de réunions avec des responsables de haut niveau de l’OTAN et d’autres participants à la conférence annuelle sur la sécurité de Munich, fournit un indice largement ignoré sur les actions de
Moscou. En outre, des rapports plus récents faisant état de l’existence de nombreux laboratoires d’armes biologiques du Pentagone américain en Ukraine ajoutent aux menaces de fond. Moscou
pensait-il que la Russie était confrontée à une réalité de type « do-or-die » [si tu ne fais rien tu es mort] ?
Un peu d’histoire essentielle
Le conflit actuel en Ukraine trouve son origine dans les années 1990 et dans l’effondrement de l’Union soviétique soutenu par les États-Unis. Au cours des
pourparlers de haut niveau du traité Deux + Quatre relatifs à la réunification de l’Allemagne en 1990, pourparlers entre le secrétaire d’État américain James Baker III et le dirigeant soviétique
de l’époque, Mikhaïl Gorbatchev, ainsi que la France, le Royaume-Uni et le gouvernement ouest-allemand, au sujet de la réunification de l’Allemagne, Baker avait promis verbalement que l’OTAN ne
se déplacerait pas « d’un pouce » vers l’Est pour menacer les anciens territoires soviétiques, en échange de l’autorisation par l’URSS de la réunification de l’Allemagne au sein de
l’OTAN.
Pendant des années, Washington a menti au sujet de cet échange, alors que les pays de l’ancien Pacte de Varsovie, dont la Pologne, la République tchèque, la
Roumanie, la Hongrie et les États baltes, ont été intégrés à l’OTAN les uns après les autres et se sont rapprochés de la Russie. Récemment, Poutine a invoqué l’accord Baker de 1990 pour justifier
les exigences russes selon lesquelles l’OTAN et Washington doivent donner des garanties juridiques contraignantes [autour de la promesse que l’Ukraine, pas plus que les autres pays du Pacte de
Varsovie,] ne serait jamais admise dans l’alliance de l’OTAN. Jusqu’à présent, Washington a catégoriquement refusé de le faire.
Le discours de Poutine à Munich en
2007
Lors de la conférence annuelle de Munich sur la sécurité de 2007, alors que l’administration Bush-Cheney avait annoncé son intention d’installer des systèmes
américains de défense antimissile en Pologne, en Roumanie et en République tchèque pour « se prémunir contre des États voyous comme la Corée du Nord ou l’Iran », le président russe
Poutine fit une critique cinglante des mensonges des États-Unis et de la violation de leurs assurances de 1990 concernant l’OTAN. À cette époque, dix anciens États communistes de l’Est avaient
déjà été admis dans l’OTAN en dépit des promesses faites par les États-Unis en 1990. En outre, l’Ukraine et la Géorgie étaient toutes deux candidates à l’adhésion à l’OTAN à la suite des
révolutions de couleur menées par les États-Unis dans ces deux pays en 2003-2004. Poutine a fait valoir à juste titre que les missiles américains visaient la Russie, et non la Corée du Nord ou
l’Iran.
Dans ses remarques à Munich en 2007, Poutine a déclaré à son public occidental : « Il s’avère que l’OTAN a placé
ses forces de première ligne à nos frontières, alors que nous continuons à remplir strictement les obligations du traité et ne réagissons pas du tout à ces actions. Je pense qu’il est évident que
l’expansion de l’OTAN n’a aucun rapport avec la modernisation de l’Alliance elle-même, ni avec la garantie de la sécurité en Europe. Au contraire, elle représente une grave provocation qui réduit
le niveau de confiance mutuelle. Et nous sommes en droit de demander : contre qui cette expansion est-elle destinée ? Et qu’est-il advenu des assurances données par nos partenaires occidentaux
après la dissolution du Pacte de Varsovie ? Où sont ces déclarations aujourd’hui ? Personne ne s’en souvient ». Poutine a ajouté : « Mais je vais me permettre de
rappeler à ce public ce qui a été dit. Je voudrais citer le discours du secrétaire général de l’OTAN, M. Woerner, à Bruxelles le 17 mai 1990. Il avait déclaré à l’époque que : « le fait que
nous soyons prêts à ne pas placer une armée de l’OTAN en dehors du territoire allemand donne à l’Union soviétique une solide garantie de sécurité ». Où sont-elles, ces garanties
? » C’était il y a 15 ans.
Le coup d’État de la place Maidan en
2014
En novembre 2013, une Ukraine économiquement corrompue et chancelante, sous la direction du président élu et également très corrompu Viktor Ianoukovitch, annoncçait
que, plutôt que d’accepter une association « spéciale » avec l’UE, l’Ukraine accepterait une offre beaucoup plus généreuse de Moscou pour rejoindre l’Union économique eurasienne dirigée
par Moscou. La Russie avait accepté de réduire de 30% le prix du gaz russe à destination de l’Ukraine et d’acheter pour 15 milliards de dollars d’obligations ukrainiennes afin d’atténuer la crise
financière de Kiev.
À ce moment-là, le 21 novembre, Arseniy Yatsenyuk, l’homme choisi par Victoria Nuland de Washington et l’ambassadeur de Kiev Geoffrey Pyatt, ainsi que le
vice-président de l’époque Joe Biden, ont lancé ce qu’on a appelé les manifestations de la place Maïdan contre le régime de Ianoukovitch soutenu par les ONG américaines. Le 20 février 2014, après
que des tireurs d’élite organisés par la CIA, qui auraient été recrutés dans la Géorgie voisine, ont tué des dizaines d’étudiants manifestants et aussi des policiers, ce qui a conduit
Ianoukovitch à fuir, Yatsenyuk est devenu Premier ministre dans un gouvernement dirigé par les États-Unis, trié sur le volet par Nuland et Biden, entre autres.
Plus tard, en décembre 2014, dans une interview accordée à un journal russe, George Friedman de Stratford, une société privée de conseil au Pentagone et à la CIA
entre autres, déclarait à propos du changement de régime de Kiev de février 2014 mené par les États-Unis : « La Russie appelle les
événements qui ont eu lieu au début de cette année un coup d’État organisé par les États-Unis. Et c’était vraiment le coup d’État le plus flagrant de l’histoire ». Et il s’en
félicitait, dans cette interview.
Ce régime putschiste de Kiev a procédé après le 22 février 2014 à une guerre d’extermination et de nettoyage ethnique des russophones dans l’est de l’Ukraine,
dirigée dans une large mesure par une armée privée de néo-nazis, littéralement néo-nazis, du « Secteur droit » (interdit en Russie), les mêmes qui ont assuré la sécurité de la place
Maïdan et lancé un règne de terreur contre les Ukrainiens russophones. Des bataillons ont été formés de mercenaires néo-nazis. Ils ont reçu le statut officiel de soldats de la « Garde
nationale ukrainienne », le bataillon Azov, financé par le patron de la mafia ukrainienne et oligarque milliardaire, Ihor Kolomoisky, qui est le soutien financier de Zelenskyy en tant que
président. Les soldats d’Azov arborent même des runes SS ouvertes comme logo. En 2016, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) a accusé le bataillon Azov,
officiellement élevé au rang de régiment en janvier 2015, de commettre des crimes de guerre tels que des pillages massifs, des détentions illégales et des actes de torture.
Aujourd’hui, Victoria Nuland est la sous-secrétaire d’État aux affaires politiques de Biden, responsable des affaires ukrainiennes et russes. Elle sait parfaitement
ce qu’est le bataillon Azov.
Zelenskyy et Munich 2022
Le 19 février 2022 à Munich, le président ukrainien Zelenskyy profère sa menace de déployer des armes nucléaires sur le territoire ukrainien. Il a exprimé
cette menace comme une révocation unilatérale du Mémorandum de Budapest de 1994, bien que l’Ukraine n’ait pas été signataire de l’accord. Deux jours plus tard, dans la soirée du 21 février,
Poutine prononçait son discours reconnaissant l’indépendance souveraine des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk. Il faisait explicitement référence à l’engagement de Zelenskyy à
Munich en matière d’armes nucléaires : « Ce n’est pas une bravade
creuse », insistait Poutine dans son discours.
Le 6 mars, l’agence de presse d’État moscovite RIA Novosti citait
une source haut placée des services de renseignement extérieurs du SVR russe, qui a fourni des détails sur un projet secret de l’Ukraine, qui bénéficierait d’un soutien occidental secret
essentiel, visant à doter l’Ukraine d’une capacité de missiles nucléaires et d’une bombe atomique, en violation flagrante du traité de non-prolifération nucléaire. Selon le rapport, les
scientifiques nucléaires ukrainiens dissimulaient les travaux déjà entrepris en les situant près des niveaux de radiation élevés du site du réacteur nucléaire de Tchernobyl, ce qui explique les
mesures rapides prises par la Russie pour sécuriser Tchernobyl. « C’est là, à en juger par les
informations disponibles, que des travaux étaient en cours à la fois sur la fabrication d’une bombe « sale » et sur la séparation du plutonium », cite la source
de RIA
Novosti. Le principal centre de recherche sur les bombes était situé au Centre scientifique national, « Institut de physique et de technologie de Kharkov ». À l’heure où nous
écrivons ces lignes, de violents combats sont en cours entre les forces russes et les combattants ukrainiens néo-nazis d’Azov, qui auraient l’intention de faire sauter le site du réacteur de
recherche et d’en rejeter la responsabilité sur la Russie. La bataille pour le contrôle de la grande centrale nucléaire de Zaporizhzhia fait aussi apparemment partie de la tentative pour
dissimuler le projet illégal de bombe en Ukraine.
Il s’avère donc clairement que Poutine avait de sérieuses raisons de réagir à la menace nucléaire ukrainienne. Un missile nucléaire ukrainien situé à moins de six
minutes de Moscou représenterait un danger existentiel, que l’Ukraine soit membre de l’OTAN ou non.
Un énorme renforcement militaire – Guerre
biologique ?
Il y a plus. Il y a un an, la presse ukrainienne a fait état de nouvelles bases navales de facto de l’OTAN construites par l’Occident à Ochakov et Berdyansk, les
qualifiant d’« infrastructures modernes
capables d’accueillir des navires de tous types, équipés selon les normes de l’OTAN et construites avec l’argent des pays de l’alliance ». Les médias se sont vantés : « Dans trois ans, nous serons
en mesure de frapper les navires russes en mer Noire avec notre flotte de moustiques. Et si nous nous combinons avec la Géorgie et la Turquie, la Fédération de Russie sera bloquée »,
annoncent triomphalement les experts militaires ukrainiens.
En outre, le Pentagone américain disposait d’installations secrètes, de huit unités au moins, peut-être étendues jusqu’à 30 laboratoires de recherche top secret en
matière d’armes biologiques à travers l’Ukraine, afin de tester l’ADN de quelque 4000 volontaires militaires. Une fois que les soldats russes ont pris des mesures pour sécuriser les preuves,
l’ambassade des États-Unis à Kiev a supprimé de son site Internet toute mention de ces sites, et les Ukrainiens auraient pris des mesures pour détruire les preuves de l’existence de ces
laboratoires. Les laboratoires ukrainiens de Kharkiv et d’ailleurs fonctionnaient en coopération avec les États-Unis. Des stocks d’armes y étaient stockés secrètement, en violation directe des
conventions internationales.
Un mois entier avant l’action militaire russe du 24 février en Ukraine, Dilyana Gaytandzhieva, chercheuse indépendante en guerre biologique, a obtenu des documents
détaillant « les expériences biologiques
du Pentagone américain avec un résultat potentiellement mortel sur 4400 soldats en Ukraine et 1000 soldats en Géorgie ». Selon les documents divulgués, tous les décès de volontaires
devaient être signalés dans les 24 h (en Ukraine) et 48 h (en Géorgie). Elle détaille les expériences humaines, qui comprennent des tests d’anticorps contre quelque 14 agents pathogènes, dont la
fièvre hémorragique de Crimée-Congo, l’espèce Borrelia (maladie de Lyme) et d’autres. Selon les documents, les laboratoires d’Ukraine et de Géorgie font partie d’un programme d’engagement
biologique du Pentagone « d’un montant de 2,5 milliards
de dollars de la Defense Threat Reduction Agency (DTRA), qui comprend des recherches sur les agents biologiques, les virus mortels et les bactéries résistantes aux
antibiotiques ».
Le 6 mars, dans une déclaration à la RAI
Novosti officielle de Moscou, le major-général Igor Konashenkov, porte-parole du ministère russe de la Défense, a déclaré qu’ils avaient reçu des documents « d’employés de laboratoires
biologiques ukrainiens confirmant que des composants d’armes biologiques étaient bien développés en Ukraine, à proximité immédiate du territoire russe ». Il a noté : « Au cours d’une opération
militaire spéciale, les preuves d’un nettoyage d’urgence par le régime de Kiev des traces d’un programme biologique militaire mis en œuvre en Ukraine, financé par le ministère américain de la
Défense, ont été découvertes »1.
Outre ces preuves du placement d’armes nucléaires et biologiques à l’intérieur de l’Ukraine au cours des dernières années, les pays occidentaux membres de l’OTAN
ont déversé des milliards de dollars d’équipements militaires, y compris des armes antichars et des explosifs, en Ukraine, tandis que Zelensky, dont l’opposition dit qu’il se cache à l’ambassade
des États-Unis à Varsovie, appelle à plusieurs reprises à la création d’une zone d’exclusion aérienne de l’OTAN au-dessus de l’Ukraine, un acte qui serait un casus belli direct
de la guerre entre la Russie et l’OTAN, une guerre qui pourrait rapidement devenir nucléaire ou plus.
La question est de savoir si cette provocation de la sécurité nationale russe par Washington et l’OTAN depuis des années, via l’Ukraine, vise à détruire la
viabilité de la Russie en tant que nation souveraine et puissance militaire. S’agit-il d’une manœuvre calculée pour utiliser les sanctions contre la Russie afin de provoquer un effondrement
mondial et des crises énergétiques, des pénuries alimentaires et pire encore, tout cela pour faire avancer le programme de la Grande Réinitialisation de Davos 2030 ? Accuser le « méchant
Poutine » et la Russie pendant que BlackRock et les puissances financières réorganisent le monde ? Il est trop tôt pour le dire2,
mais ce qui est certain, c’est que ce qui a motivé l’action de la Russie le 24 février 2022 devait être bien plus grave que ce que CNN ou d’autres médias occidentaux contrôlés nous disent.
Au cours de la deuxième guerre menée par les États-Unis contre l’Irak en 2003 et de l’invasion et de l’occupation qui en ont résulté, j’ai écrit un article dans le
quotidien britannique The Observer, commandé
par son rédacteur en chef, intitulé « L’Amérique est experte en
destruction et non en construction ». Selon la revue médicale internationale Lancet, ce
titre s’est avéré tristement exact alors que les avions de combat américains bombardaient toutes les infrastructures irakiennes, des stations d’eau et d’électricité aux ponts, et tuaient plus
d’un million d’Irakiens.
Près de 20 ans plus tard, l’article me revient à l’esprit alors que je suis les développements de la guerre ukrainienne, la posture militaire et diplomatique
associée des parties prenantes mondiales et le déclenchement potentiel d’une guerre nucléaire qui pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour le monde – à commencer par Europe.
Champ de bataille :
Europe
C’est l’Europe, après tout, qui sera le principal théâtre d’un affrontement nucléaire si les efforts de médiation actuels ne portent pas leurs fruits. Et toute
« solution politique » du conflit est synonyme de victoire pour le président russe Vladimir Poutine et son pays, car Moscou n’acceptera rien de moins qu’une purge complète de la profondeur
stratégique de l’OTAN en Ukraine.
Ce sont les États-Unis qui ont voulu et déclenché cette guerre, et l’Ukraine et son bon peuple n’ont été que victimes de la déclaration du président américain Joe
Biden en entrant à la Maison Blanche selon laquelle la Russie est l’ennemi numéro un des États-Unis, suivie de la Chine. Il a simplement fait de l’Ukraine « l’appât empoisonné » pour entraîner
les Russes dans une longue guerre d’usure qui pourrait saper leur économie et provoquer une sédition de l’intérieur.
La menace américano-européenne de « sanctions de l’enfer » était un double plan : soit cela dissuaderait Poutine d’envahir l’Ukraine, soit cela le
pousserait à faire précisement cela. Le premier serait présenté comme une défaite russe, et le second serait utilisé pour ruiner financièrement l’État russe, retourner ses citoyens contre
leur gouvernement et isoler Moscou.
Mais, environ deux semaines après l’entrée du premier char russe sur le territoire ukrainien, la naïveté du plan occidental a été pleinement exposée. Non
seulement il a mal évalué la vitesse à laquelle Moscou pourrait atteindre ses objectifs, mais il a complètement sous-estimé la capacité de la Russie à contrer les punitions occidentales avec les
siennes.
Le plan occidental a plutôt déclenché un contrecoup aux proportions monumentales, dont les premières victimes seront des résidents d’Europe et des
États-Unis.
Ukraine, le silex pour allumer un
feu
Alors que la poussière retombait, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a commencé à montrer des signes de choc et d’hystérie, fustigant la
« faiblesse » de l’OTAN, rassemblant des bataillons de néonazis de droite pour remplacer les soldats de l’armée ukrainienne déserteurs et lançant un appel mondial à l’étranger pour
trouver des combattants à venir en Ukraine et combattre les Russes.
Zelensky a maintenant réalisé que l’OTAN n’était prête qu’à se tenir à ses côtés et à provoquer ses diatribes anti-Moscou jusqu’à ce que les véhicules blindés
russes arrivent. Il a vite découvert qu’il était abandonné de tous, en particulier des États-Unis, dont le représentant aux nations unis a déclaré hier qu’ils n’enverraient pas un seul soldat ou
avion en Ukraine.
Alors que les prix du pétrole ont grimpé en flèche pour atteindre environ 130 dollars américains le baril cette semaine, des pays européens, dont
l’Allemagne, la
Bulgarie et la France, ont déclaré qu’ils ne pouvaient pas se passer des importations de pétrole et de gaz russes. Ces mots sont la première indication tangible d’une fissure dans
l’alliance atlantique, et on devrait s’attendre à ce qu’ils s’étendent à l’alliance de l’OTAN à mesure que les fissures se creusent.
L’Europe tire ostensiblement sa force de la puissance de son économie et des soi-disant « valeurs communes » de l’ordre libéral en déclin fondé sur la démocratie,
les droits de l’homme et la justice sociale. Aujourd’hui, ces éléments s’érodent un par un à mesure que la censure, l’autoritarisme et le profit de guerre s’installent au sein de la
gouvernance occidentale.
Les masques sont tombés.
Au lieu de cela, ces « valeurs » sont rapidement remplacées par des sensibilités racistes manifestes, favorisant le citoyen « aux cheveux blonds et aux yeux bleus »
par rapport à tous les autres, et mobilisant les mouvements néonazis et extrémistes pour maintenir « l’ordre occidental fondé sur des règles ».
L’économie, c’est le pouvoir : l’effondrement
de l’alliance occidentale
La prospérité économique, la sécurité et la stabilité dont jouit l’Occident depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale seront les premières victimes de cette
confrontation qui prend forme en Ukraine, et il semble presque certain que l’effondrement financier, le chaos politique et la fragmentation géographique intra-étatique pourraient résulter.
Les décennies de sanctions punitives imposées par les États-Unis comme alternative à une intervention militaire directe en Corée du Nord, en Iran, en Syrie, à Cuba
et au Venezuela n’ont pas atteint leurs objectifs. Ils n’ont pas provoqué le « changement de régime » qui était prévu, et il est très peu probable que les sanctions actuelles
contre la Russie, si elles sont imposées (jusqu’à présent, le flux de pétrole et de gaz russe est payé via le système financier SWIFT) en totalité ou en partie, s’avérera une exception.
Alexander Novak, vice-Premier ministre russe chargé de l’énergie, a mis en garde lundi soir contre les conséquences « catastrophiques » pour les marchés
mondiaux du pétrole et du gaz si les États-Unis mettaient à exécution leurs menaces d’interdire les exportations d’énergie de son pays.
Ces actions, a-t-il prédit, entraîneraient une multiplication par dix du prix du mètre cube de gaz naturel et un prix sans précédent de 300 dollars américains le
baril de pétrole. Novak a en outre menacé que Moscou riposterait en interrompant l’approvisionnement en gaz vers l’Europe via son gazoduc Nord Stream 1, surtout si l’Allemagne continue de
suspendre son homologue Nord Stream 2 en réponse à la pression américaine et si Washington impose une interdiction du pétrole russe.
Nord Stream 1 fonctionne actuellement à 100% et pompe près de 60 milliards de mètres cubes par an vers l’Europe.
Les États-Unis ont détruit l’Irak, la Syrie, l’Afghanistan et la Libye, et n’ont participé à la reconstruction d’aucune de ses destructions.
Mais la victime sera désormais l’Europe, qui, tout en étant capable d’intimider ces États plus faibles, ne pourra pas le faire avec une puissance mondiale beaucoup
plus grande et plus forte comme la Russie, dirigée par un stratège géopolitique astucieux comme Vladimir Poutine.
L’Europe prête maintenant ses territoires à la dernière guerre américaine. Elle fait face à une puissance nucléaire alliée à d’autres États nucléaires
comme la Chine, la Corée du Nord et, potentiellement, l’Inde. Cette fois, la magie peut être activée sur le magicien et la destruction sur les États-Unis.
Le chef de la diplomatie européenne, Josep
Borrell, a déclaré qu’« on est entré dans une
nouvelle page de l’Histoire de l’Europe, une nouvelle page de la géopolitique mondiale, même ». Il a, également, indiqué que l’UE, les États-Unis et l’OTAN avait réalisé un faux pas en
laissant croire à l’Ukraine qu’elle pouvait intégrer l’OTAN.
D’ailleurs, cette promesse concerne aussi la Géorgie. Josep Borrell avoue les erreurs de la diplomatie de l’UE et du monde occidental, des erreurs qui ont mené à
cette guerre en Ukraine. Pourtant, il rigole quand le journaliste français lui demande comment livrer les armes à l’Ukraine quand les « gens de l’UE ne veulent pas
rentrer dans le territoire ukrainien » ?
Dans un entretien à TF1, le chef de la
diplomatie européenne a donné son expertise sur la situation en Ukraine. Il a évoqué le sujet de la guerre en Ukraine et les actions de l’UE à l’ouverture du Conseil de l’Union européenne à
Versailles. Il a, tout d’abord, dénoncé « une guerre complètement
injustifiée et gratuite qui devient de plus en plus brutale et complètement inacceptable pour le monde civilisé », mais à la fin de son entretien le chef de la diplomatie européen avoue
les erreurs de la diplomatie occidentale. Pourtant, même si Josep Borrell reconnaît ces erreurs qui ont mené à la guerre, celui-ci a continué de parler de son engagement pour donner des armes à
l’Ukraine, dont des armes lourdes, comme des canons et des « fusée » antichars, persistant, ainsi, dans la guerre et dans la catastrophe humanitaire.
« L’UE fait la liste des
besoins militaires de l’Ukraine. C’est l’Ukraine qui nous demande ce [dont] elle a besoin. Et, nous demandons aux Etats membres qui peut fournir », a-t-il indiqué. « Moi, je paie. Je participe
dans l’effort d’armement de l’Ukraine du point de vue financier. Le fondamental, c’est les munitions et le combustible », « il faut que les chars
puissent rouler. Il faut aussi du matériel lourd, des obus, des canons, surtout des fusées antichars », fait-il
savoir.
L’UE devient cobelligérant ? À la question du journaliste – « comment effectuer les
livraisons ? » – qui s’imagine que les gens de l’UE ne veulent pas rentrer dans le territoire ukrainien, Josep Borrell répond en rigolant, « cela, je ne vais pas vous le
dire ». Le journaliste lui fait remarquer que la Hongrie, par exemple, a interdit le passage par son territoire [des armes et munitions] et il demande à Josep Borrell, est-ce qu’on
n’est pas en train de devenir cobelligérant ? « Nous, on n’est pas en guerre
avec la Russie. Ni du point de vue financier, ni du point de vue militaire », affirme Josep Borrell au journaliste de TF1 qui ne manque
pas de saisir la perche pour lui faire remarquer une totale incohérence concernant son affirmation : « Cela, c’est ce qu’ont dit.
Mais, quand on est à livrer des armes antichars, de la munition, des armes pour tuer, oui, on est un peut en guerre ». Josep Borrell, n’en démordant pas continue sur son argumentation
affirmant que l’UE n’est pas en guerre avec la Russie : « Non, on n’est pas en
guerre », « on ne veut pas être en
guerre », « on ne peut pas se permettre
d’être en guerre ».
Même si Josep Borrell déclare ne pas penser « que la fin de la guerre ne
viendra pas d’un soulèvement de la population russe », il évoque la technique du « regime change » mais en niant vouloir employer cet outil : « Nous, on n’est pas dans le
regime change », car, selon Josep Borrell, « le but, ce n’est pas de
changer le régime politique russe ». « Le but, c’est d’arrêter la
guerre. Pour arrêter la guerre, il faut faire pression sur Poutine ».
Jospe Borrell admet les erreurs sur l’OTAN et sur les promesses faites à la Russie. Le journaliste de TF1 demande
au diplomate de l’UE si « on a trop fait confiance aux
Américains qui n’ont pas arrêtés d’étendre l’OTAN » et « qui nous dominent en
réalité ». Il va même à dire qu’« on a aussi trompé les
Russes ». C’est à ce moment de l’entretien que Josep Borrell déclare : « Je suis prêt à reconnaître
qu’on a fait des erreurs».
Le haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité accuse, dans cet instant, les mauvaises décisions politiques et diplomatiques
de l’UE : « On a perdu des opportunités
pour que la Russie s’approche plus de l’Occident après la fin de l’empire soviétique. Les Russes ont beaucoup souffert. Il faut comprendre cela aussi. Il y a eu des moments, peut être, où on
aurait pu faire mieux. Il y a des moments où peut être où on a proposé des choses et qu’on n’a pas été capables de mener en pratique comme la promesse que l’Ukraine, la Géorgie, ne seraient
partie de l’OTAN ».
À la question du journaliste français si « c‘était une erreur que
l’Ukraine puisse rentrer dans l’OTAN ? », Josep Borrell affirme que «c’est une erreur comme
promesse qu’on ne peut pas accomplir ».
Consultant politique, président-fondateur du Réseau Voltaire.
Dernier ouvrage en français : Sous nos yeux - Du 11-Septembre à Donald Trump (2017).
Thierry Meyssan interrompt sa série de chroniques sur le conflit titanesque qui oppose la
Russie aux États-Unis. Il s’adresse à tous pour casser les mensonges de la propagande de guerre.
L’opinion publique occidentale est révoltée par la guerre en Ukraine et se mobilise pour porter secours aux Ukrainiens en fuite. Pour tous, c’est évident : le dictateur Poutine ne
supporte pas la nouvelle démocratie ukrainienne.
Comme à chaque conflit, on nous explique que les autres sont les méchants, tandis que nous sommes les gentils.
Notre réaction est celle de gens abusés par la propagande de guerre parce qu’ils ne se souviennent pas des conflits précédents et ignorent tout de l’Ukraine. Reprenons à zéro.
QUI A COMMENCÉ ?
Comme dans la cour de récréation lorsque nos camarades de classe se battaient entre eux, nous voulons savoir qui a commencé. Sur ce point, il n’y a pas photo : il y a huit ans, les
États-Unis ont organisé un changement de régime à Kiev avec l’aide de groupuscules armés. Ces gens se disent « nationalistes », mais pas du tout au sens où nous l’entendons. Ils
prétendent être de vrais ukrainiens d’origine scandinave ou proto-germanique et pas des slaves comme les Russes. Ils se réclament de Stepan Bandera [1], le chef des collaborateurs ukrainiens des
nazis, l’équivalent de Philippe Pétain d’un point de vue symbolique pour les Français, mais surtout de Joseph Darnand et des soldats de la Division SS française Charlemagne. Les Ukrainiens, qui jusqu’à présent se considéraient tout à la fois d’origine scandinave et proto-germanique d’un côté, et slave de l’autre, les
appellent des « néo-nazis ».
Ici, en France, le mot de « nazi » est une injure que l’on utilise pour n’importe quoi. Historiquement, c’est un mouvement qui prônait une vision raciale de l’humanité pour
expliquer les empires coloniaux. Selon elle, les hommes appartiennent à des « races » différentes, on dirait aujourd’hui à des « espèces » différentes. Ils ne peuvent pas
avoir de descendance ensemble, comme les juments et les ânes. Dans la nature, ces deux espèces procréent des mulets, mais ceux-ci sont en général stériles. C’est pourquoi les nazis
interdisaient les mélanges inter-raciaux. Si nous sommes de races différentes, certaines sont supérieures à d’autres, d’où la domination occidentale sur les peuples colonisés. Dans les années
Trente, cette idéologie était considérée comme une « science » et était enseignée dans les universités, surtout aux États-Unis, en Scandinavie et en Allemagne. De très grands
scientifiques l’ont défendue. Par exemple, Konrad Lorenz (Prix Nobel de médecine en 1973) fut un ardent nazi. Il a écrit que pour maintenir la race, il fallait extirper de la masse les
homosexuels et les éliminer comme un chirurgien élimine une tumeur parce qu’ils mélangeaient leur patrimoine génétique avec celui d’autres races sans qu’on s’en rende compte.
Ces scientifiques n’étaient pas plus sérieux que ceux qui nous ont annoncé l’apocalypse durant l’épidémie de Covid-19. Ils avaient le titre de « scientifique », mais pas la démarche
raisonnable.
La Russie moderne s’est construite sur le souvenir de ce que les Russes appellent la « Grande Guerre patriotique » et nous la « Seconde Guerre mondiale ». Elle n’a pas du
tout le même sens pour eux que pour nous. Ici, en France, la guerre n’a duré que quelques mois, puis nous avons cru en la victoire nazie et nous sommes entrés dans la Collaboration. Nous
avons vu les nazis et les Pétainistes arrêter, à partir de 1940, 66 000 personnes, généralement pour « terrorisme » (résistance). Puis à partir de 1942, arrêter 76 000
juifs parce qu’ils étaient d’une « race inférieure » et les envoyer à l’Est, en réalité dans des camps d’extermination. Au contraire, en Union soviétique, les nazis n’ont arrêté
personne. Ils voulaient exterminer ou réduire en esclavage tous les slaves en trente ans afin de dégager un « espace vital » où ils pourraient édifier un empire colonial (Generalplan Ost). C’est pourquoi l’URSS a subi 27 millions de morts. Dans la mémoire russe, les nazis sont un danger existentiel, pas pour nous.
Lorsque ces gens sont arrivés au pouvoir à Kiev, ils ne se sont pas déclarés comme « nazis », mais comme « nationalistes » au sens de Stepan Bandera, qui lui aussi se
disait « nationaliste » et pas « nazi », même faisait une surenchère par rapport à leurs intentions génocidaires contre les slaves et les juifs. Ils ont qualifié l’ancien
régime de « pro-Russe », ce qui est factuellement faux, et ont interdit tout ce qui évoque la culture russe. Et d’abord, la langue russe. Les Ukrainiens étaient majoritairement
bilingues, parlant à la fois le russe et l’ukrainien. Tout d’un coup, on disait à la moitié d’entre eux qu’ils ne pourraient plus parler leur langue à l’école et dans les administrations. La
région du Donbass, très russophone, s’est soulevée. Mais aussi la minorité hongroise qui recevait un enseignement dans sa propre langue et qui a été soutenue dans sa revendication par la
Hongrie. Les Ukrainiens du Donbass ont exigé que les districts de Donestsk et de Lougansk puissent disposer d’un statut d’autonomie et retrouver leur langue. Ces préfectures (oblast en russe) se sont déclarées républiques. Cela ne voulait pas dire qu’elles aspiraient à l’indépendance, mais uniquement à l’autonomie, comme la
République de Californie aux États-Unis ou les anciennes républiques de l’URSS.
En 2014, le président François Hollande et la chancelière Angela Merkel mirent les gens de Kiev à une même table que ceux du Donbass et négocièrent les accords de Minsk. Ce sont la France,
l’Allemagne et la Russie qui en sont les garants.
Kiev a toujours refusé de les appliquer bien qu’il les ait signés. Au lieu de cela, il a armé des milices « nationalistes » et les a envoyées se faire les nerfs à la limite du
Donbass. Toute les extrémistes occidentaux sont alors venus tirer le coup de feu en Ukraine. Ces paramilitaires étaient le mois dernier, selon le gouvernement de Kiev, 102 000. Ils
forment le tiers de l’armée ukrainienne et sont intégrés aux Forces de défense territoriales. 66 000 nouveaux « nationalistes » —quoiqu’étrangers— viennent d’arriver en
renfort, du monde entier, à l’occasion de l’attaque russe.
Durant les huit ans qui nous séparent des accords de Minsk, ces paramilitaires ont tué 14 000 personnes au Donbass, selon le gouvernement de Kiev. Ce chiffre inclut leurs propres pertes,
mais elles ne sont pas nombreuses. La Russie a diligenté sa propre commission d’enquête. Elle n’a pas recensé que les morts, mais aussi blessés graves. Elle a trouvé
22 000 victimes. Le président Poutine parle à leur sujet de « génocide », non pas au sens étymologique de destruction d’un peuple, mais au sens juridique de crime commis
sur ordre des autorités contre un groupe ethnique.
C’est là que le bât blesse : le gouvernement de Kiev n’est pas homogène et personne n’a clairement donné l’ordre d’un tel massacre. Cependant la Russie tient les présidents Petro
Porochenko et son successeur Volodymyr Zelensky comme responsables. Nous le sommes aussi puisque nous étions garants des accords jamais appliqués de Minsk. Oui, nous sommes coresponsables de
cette hécatombe.
Le pire est à venir. Le 1er juillet 2021, le président Zelensky, qui armait les paramilitaires « nationalistes » et refusait d’appliquer les accords de Minsk, a promulgué
la Loi n°38 sur les peuples autochtones [2]. Elle garantit aux Tatars et aux Juifs
karaïtes (c’est-à-dire ne reconnaissant pas le Talmud) l’exercice de leurs droits, notamment celui de parler leur langue, mais pas aux slaves.
Ceux-ci n’existent pas. Ils ne sont protégés par aucune loi. Ce sont des Untermenschen, des sous-hommes. C’était la première fois, depuis 77 ans
qu’une loi raciale était adoptée sur le continent européen. Vous vous dites qu’il y a des organisations de défense des Droits de l’homme et qu’elles ont dû protester. Mais rien. Un grand
silence. Pire : les applaudissements de Bernard-Henri Lévy.
POURQUOI LE RECOURS À LA GUERRE ?
Notre vision des événements est déformée par nos préjugés. C’est plus encore marqué dans les États baltes et les pays anciennement écrasés par la « doctrine Brejnev ». Ces peuples
imaginent a priori que les Russes sont les héritiers des Soviétiques. Or, les principaux dirigeants soviétiques n’étaient pas russes.
Joseph Staline était Géorgien, Nikita Kroutchev Ukrainien etc, et même Léonid Brejnev était Ukrainien.
Tant que les républiques de Donetsk et de Lougansk étaient ukrainiennes, le massacre de leurs habitants était une question exclusivement ukrainienne. Nul n’était autorisé à les protéger.
Cependant, en signant les Accords de Minsk et en les faisant entériner par le Conseil de sécurité des Nations unies, la France et l’Allemagne ont pris la responsabilité d’y mettre un terme.
Ce qu’elle n’ont pas fait.
Le problème a changé de nature lorsque, le 21 février 2022, la Russie a reconnu l’indépendance des deux républiques du Donbass. Le massacre de ses habitants n’était plus une question
intérieure, mais internationale. Le 23 février, le Conseil de sécurité se réunissait à nouveau alors que l’armée russe se préparait à intervenir. Lors de la réunion, le Secrétaire général de
l’Onu, António Guterres, n’a contesté ni la légitimité de la reconnaissance russe des républiques du Donbass, ni celle de l’intervention militaire russe contre les néo-nazis. Elle a juste
demandé à la Russie de laisser encore une chance à la paix [3].
Le droit international n’interdit pas la guerre, mais tente de la prévenir. Or, cette réunion du Conseil de sécurité n’ayant rien donné, la Russie était en droit de venir en aide aux
habitants du Donbass massacrés par les néo-nazis. Ce qu’elle a fait le lendemain, le 24 février.
Le président Vladimir Poutine, qui avait déjà attendu huit ans, ne pouvait plus remettre à plus tard. Non seulement parce que chaque jour des gens meurent, non seulement parce que l’armée
ukrainienne préparait un vaste massacre le 8 mars [4], mais parce que le droit russe le rend
personnellement responsable de la vie de ses concitoyens. Préparant leur éventuel exode, la grande majorité des habitants du Donbass ont acquis la citoyenneté russe au cours des dernières
années.
L’EXODE DE 2 MILLIONS D’UKRAINIENS
Comme lors de toutes les guerres de l’Otan, nous assistons à la fuite de la population. Pour les Français cela rappelle l’exode de 1940 face à l’avancée des troupes allemandes. C’est un
phénomène de panique collective. Les Français croyaient que la Reichswehr allait commettre les mêmes viols de masse qui avaient été attribué au début de la Première Guerre mondiale à la
Deutsches Heer. Mais les Allemands étaient disciplinés et ne se livrèrent pas à ce type de violence. Finalement, la fuite des Français sans but n’avait aucune raison objective, que la peur.
L’Otan, depuis la guerre du Kosovo, a développé le concept d’ingénierie des mouvement de population [5]. En 1999, la CIA a organisé le
déplacement, en trois jours, de plus de 290 000 Kosovars de Serbie vers la Macédoine. Si vous avez plus de trente ans, vous vous souvenez des vidéos épouvantables de cette longue
file de gens, marchant les uns derrière les autres, sur des dizaines de kilomètres, le long de lignes de chemin de fer. Il s’agissait de faire croire à une répression ethnique par le
gouvernement de Slobodan Milošević et de justifier la guerre qui arrivait. Les Kosovars ne savaient pas pourquoi ils fuyaient, mais pensaient trouver un avenir meilleur là où ils allaient. Il
y a sept ans, vous vous souvenez de l’exode des Syriens. Il s’agissait d’affaiblir le pays en le privant de sa population. Cette fois, il s’agit de toucher vos émotions avec des femmes et des
enfants, sans faire partir les hommes que l’on requiert pour combattre les Russes.
Chaque fois, nous sommes bouleversés. Mais ce n’est pas parce que les Kosovars, les Syriens ou les Ukrainiens souffrent qu’ils ont tous raison.
L’Union européenne accepte tous les réfugiés ukrainiens. Les États de l’espace Schengen acceptent toutes les personnes qui se présentent comme fuyant la guerre en Ukraine. Selon
l’administration allemande, environ un quart de ces « réfugiés », qui assurent sur l’honneur travailler et habiter en Ukraine, dispose non pas de passeports ukrainiens, mais
algériens, biélorusses, indiens, marocains, nigérians ou ouzbeks ; des personnes qui manifestement profitent de la porte ouverte pour être enregistrées légalement dans l’Union
européenne. Aucune vérification de leur séjour préalable en Ukraine n’est effectuée. Pour le patronat allemand, c’est une régularisation qui ne dit pas son nom.
Nous devons nous demander pourquoi le peuple ukrainien ne manifeste pas son soutien à son gouvernement. Lors de la guerre du Kosovo, les habitants de Belgrade avaient veillé jour et nuit sur
les ponts de la ville pour empêcher que l’Otan les bombarde. Lors de la guerre de Libye, plusieurs millions de personnes s’étaient rassemblées à Tripoli pour manifester leur soutien au Guide
Mouamar Kadhafi. Lors de la guerre de Syrie, un million de personnes avaient exprimé leur soutien au président Bachar el-Assad. Cette fois : rien. Au contraire, on nous dit que des
équipe de la Défense territoriale chassent les « saboteurs russes infiltrés », alors que l’OSCE atteste qu’il n’y avait aucun soldat russe en Ukraine avant le début de l’opération.
LE CHOC DES IMAGES
Nous aurions dû apprendre des guerres précédentes que la première victime est toujours la vérité. Depuis la guerre du Kosovo, l’Otan est devenue maître de la propagande de guerre. À l’époque,
on avait changé le porte-parole de l’organisation à Bruxelles. Son remplaçant, Jamie Shea, détaillait chaque jour une histoire exemplaire, soit sur les horreurs des criminels serbes, soit sur
l’exemplaire résistance des Kosovars. À l’époque, je publiais un quotidien par fax, le Journal de la Guerre en Europe. Je résumais les
déclarations de l’Otan et les dépêches des petites agences de presse des Balkans. Chaque jour, je voyais les deux versions s’éloigner un peu plus l’une de l’autre. Dans mon esprit, la vérité
devait être entre les deux. Une fois la guerre finie, on s’est rendu compte que les propos de Jamie Shea étaient de la pure invention destinée à noircir les colonnes des journaux crédules,
tandis que les dépêches des petites agences de presse des Balkans disaient la vérité. Et celle-ci n’était pas en faveur de l’Otan.
J’aborde donc le consensus médiatique occidental avec une certaine méfiance. Par exemple, lorsqu’on nous explique que la Russie bombarde une centrale nucléaire, je pense aux mensonges du
président George W. Bush sur les armes de destruction massive du tyran « Saddam ». Ou lorsqu’on nous explique que les Russes viennent de bombarder une maternité à Marioupol, je me
souviens des bébés koweïtiens enlevés dans leurs couveuses par les horribles soldats iraquiens. Et lorsqu’on m’assure que le méchant Poutine est fou et ressemble à Hitler, je me souviens de
la manière dont nous avons traité Mouamar Kadhafi ou le président Bachar el-Assad.
C’est pourquoi je ne prends pas ces allégations au sérieux. Les soldats ukrainiens de l’île aux serpents n’ont pas été massacrés sous les bombes comme le prétendait le président Zelensky, il
se sont rendus aux armées russes, comme il l’a admis plus tard. Le mémorial juif de Babi Yar n’a pas été détruit par les Russes qui respectent toutes les victimes de la barbarie nazie. La
centrale de Zaporijjia n’a pas plus été bombardée. Elle était gardée depuis plusieurs jours par des équipes mixtes russes et ukrainiennes. D’ailleurs l’Agence internationale de l’énergie
atomique (AIEA) a confirmé qu’il n’y avait jamais eu de danger radio-actif. La maternité de Marioupol n’a pas non plus été bombardée. Elle avait été évacuée trois jours plus tôt et
transformée en caserne du Régiment Azov (néo-nazis) ainsi que l’avait signalé à ce moment là la Russie à l’Onu.
Alors quand on me dit qu’il faut tuer le « dictateur » Poutine, je reste de marbre.
LES BATAILLES
Comment ne pas remarquer que les images que nous voyons des « batailles » victorieuses de l’armée ukrainienne sont toujours les mêmes ? Comment ne pas remarquer que l’on n’y
voit que quelques véhicules détruits ? Nos reporters de guerre n’ont-ils jamais vu de vraies guerres ? Nous n’interprétons pas les images en fonction de ce que nous y voyons, mais
des commentaires qui les accompagnent.
Depuis une semaine, on nous explique que l’armée russe encercle Kiev à quinze kilomètres alentour, qu’elle progresse tous les jours (mais reste néanmoins à quinze kilomètres) et va donner
l’assaut final. Quand on nous explique que le « dictateur » Poutine veut la peau du gentil président Zelenski (qui arme les néo-nazis et a promulgué la loi raciale), je prends du
recul.
Les armées russes n’ont jamais eu comme projet de prendre les grandes villes. Elles s’en tiennent d’ailleurs à l’écart (sauf Marioupol). Elles combattent les paramilitaires
« nationalistes », les néo-nazis. En tant que Français, partisan de la Résistance face aux nazis, les armées russes ont donc toute mon admiration.
L’armée russe applique en Ukraine la même tactique qu’en Syrie : encercler les villes qui servent de refuge aux ennemis, puis ouvrir des couloirs humanitaires afin de faire fuir les
civils, et enfin pilonner les combattants qui restent à l’intérieur. C’est pourquoi les paramilitaires néo-nazis bloquent ces couloirs et empêchent la population de fuir. C’est le principe
des boucliers humains.
Il s’agit d’une guerre de mouvement. Il faut faire vite. Les troupes russes se déplacent en camions et en blindés. Il ne s’agit pas de batailles de chars. Ceux-ci sont aujourd’hui inopérants
sur les théâtres d’opération. Nous avons vu, en 2006, le Hezbollah réduire en épaves les Merkavas israéliens. Les troupes russes se déplacent en véhicules à moteur, c’est pour cela qu’elles
ont des blindés. Comme nous avons fourni des dizaines de milliers de missiles anti-tanks à l’armée ukrainienne, paramilitaires néo-nazis compris, nos armes les détruisent comme elles
détruisent leurs camions. Ce ne sont pas des batailles, juste des embuscades.
TROIS NOUVEAUX PROBLÈMES
Comme si la situation n’était pas assez compliquée, le président Zelensky a annoncé lors de la Conférence sur la Sécurité de Munich, juste avant la guerre, son intention d’acquérir la Bombe
atomique, en violation de la signature de son pays du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.
Puis, les armées russes ont saisi et publié un document de travail du gouvernement de Kiev planifiant une attaque militaire de la Crimée et du Donbass, le 8 mars.
Enfin, l’armée russe a mis à jour une quinzaine de laboratoires de recherche en armes biologiques qui travaillaient pour le Pentagone. Elle a annoncé qu’elle allait publier la documentation
saisie et a détruit 320 conteneurs d’agents pathogènes. Les États-Unis, qui sont signataires de la Convention des Nations unies sur l’interdiction des armes biologiques, la respectent chez
eux, mais la violent à l’étranger. Des documents avaient déjà été publiés il y a deux mois par une journaliste bulgare. Le 8 mars, le ministère chinois des Affaires étrangères a demandé au
Pentagone de s’expliquer sur les 330 laboratoires biologiques qu’il entretient sous divers noms dans 30 pays. Le département d’État a alors démenti ces pratiques. Mais la
sous-secrétaire d’État, Victoria Nuland, auditionnée au Sénat, a reconnu que le Pentagone collaborait à ces programmes entrepris à l’étranger et qu’elle était inquiète à l’idée que ces
recherches tombent dans des mains russes. Lorsque la Russie a porté l’affaire au Conseil de sécurité, les Occidentaux ont retourné ses accusations contre elle, l’accusant de préparer une
attaque biologique sous faux-drapeau. De son côté l’Organisation mondiale de la Santé a indiqué avoir été prévenue de recherches biologiques civiles ukraino-US et avoir demandé à l’Ukraine de
détruire ses agents pathogènes pour prévenir leur dissémination.
Ainsi donc, l’Ukraine, qui entretient plus de cent mille « nationalistes » et les a incorporées à sa « Défense territoriale », puis a adopté une loi raciale,
travaille sur des armes biologiques illégales et espère acquérir la Bombe atomique. Nous avons choisi d’oublier les exemples de courage de Jean Moulin et de Charles De Gaulle et de soutenir
le président Zelensky !