1/ Le premier Ministre britannique vient de préfacer et de rendre public un rapport officiel sur la politique étrangère et, plus largement, le positionnement stratégique de la Grande-Bretagne. Ce
rapport, intitulé « Global Britain in a competitive
age »,
fruit d’un an de réflexions et fort d’une grosse centaine de pages, explicite les grandes orientations de la Grande-Bretagne de l’après-Brexit et la cohérence d’ensemble des initiatives qui sont
ou seront prises en matière d’équipement militaire, de diplomatie, de politique commerciale, etc.
Le document est de belle facture et, derrière les passages obligés que sont les références aux droits de l’homme, à la lutte contre le changement climatique, aux risques sanitaires, etc. met
clairement en avant les grandes orientations du gouvernement britannique :
la volonté
d’être, ou de demeurer, une
puissance exerçant une influence à l’échelle mondiale. Il en résulte notamment la nécessité de rester une puissance militaire de premier plan et de consentir les efforts financiers
nécessaires pour disposer des moyens que ce choix implique, en particulier sur le plan nucléaire. Le gouvernement britannique entend ainsi accroître le niveau de son budget militaire et le nombre
des ogives nucléaires dont le plafond, ramené en 2010 de 225 à 180 unités, sera porté à 260 unités (soit à peu près le niveau de la France, bien inférieur à ceux des Etats-Unis ou la Russie).
L’envoi d’un porte-avion et de son groupe d’appui en Méditerranée, au Moyen-Orient et dans la zone indo-pacifique rendra visible à tous cette volonté ;
le
renforcement des liens de
toute nature (militaires, économiques, technologiques…) avec les Etats-Unis qui resteront « the most important strategic ally and
partner », liens qui constituent le socle de toute la stratégie de la Grande-Bretagne. De même, l’OTAN est la structure principale de solidarité de la Grande-Bretagne avec l’Europe,
même si les liens bilatéraux avec les pays européens, en premier lieu la France, sont revendiqués (les liens avec l’Union européenne, beaucoup moins) ;
la volonté
d’être un acteur influent
dans la zone indo-pacifique. Parce que cette zone recèle d’importantes opportunités politiques et parce qu’elle est le lieu d’affrontements géopolitiques croissants, la Grande-Bretagne
veut devenir « the European
partner with the broadest and most integrated presence in the Indo-Pacific – committed for the long term, with closer and deeper partnerships, bilaterally and multilaterally ». Cet
intérêt fort marqué pour la zone indo-pacifique est complété par un discours ambigu vis-à-vis de la Chine. En effet, bien qu’il précise
que « China… presents the
biggest state-based threat to the UK’s economic security », le document présente la Chine comme un partenaire pour des coopérations approfondies et insiste sur les liens noués ou à
nouer entre les deux pays afin d’aboutir à une « positive trade and investment
relationship ». La Grande-Bretagne est même prête à faire pour cela les efforts d’adaptation nécessaires : « we will do more to adapt to China’s growing
impact on many aspects of our lives as it becomes more powerful in the world ».
2/ Ainsi décrite, la politique que la Grande-Bretagne entend mener maintenant qu’elle est totalement libérée des contraintes communautaires appelle quelques observations.
Si l’importance donnée aux liens avec les Etats-Unis ne saurait
surprendre, l’insistance mise à se placer dans le sillage du grand allié et à affirmer la nature particulière des liens existant avec lui étonnent quand même : de toute évidence Londres veut
profiter des bonnes intentions à son égard affirmées par la nouvelle administration Biden, mais le basculement vers l’Asie voulu par B.Obama puis la désaffection clairement exprimée par D.Trump à
l’égard de l’Europe avaient pourtant montré qu’au-delà des changements de président, l’Europe, la Grande-Bretagne incluse, n’est peut-être plus la priorité des Etats-Unis. Or cette
interdépendance est clairement à sens unique et la composante nucléaire de l’armée britannique, présentée comme un élément de puissance, ne fonctionne que grâce à des missiles américains.
Pour séduire son partenaire la Grande-Bretagne met clairement en avant sa volonté d’être sa tête de pont en Europe mais elle ne dispose d’aucun « plan B » en cas de désamour dudit
partenaire.
L’importance donnée au basculement (« the Indo-Pacific tilt »
selon le document) sur la zone indo-pacifique surprend. Autant le basculement vers l’Asie avait un sens pour les Etats-Unis quand ceux-ci l’ont décidé lors de la présidence Obama, autant l’on
peut se demander ce que le mouvement parallèle signifie pour la Grande-Bretagne qui, depuis l’accession à l’indépendance de l’Inde et la rétrocession de Hong-Kong à la Chine, n’a plus de point
d’appui dans la région. En outre, la priorité donnée dans le document, d’une part aux liens bilatéraux avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande, d’autre part à la volonté d’adhérer à l’accord
commercial dit CPTPP (Comprehensive
and Progressive Agreement for Trans-Pacific Partnership) de 2018, dont les seuls membres asiatiques ayant ratifié le texte sont le Japon, Singapour et le Vietnam, témoigne d’une
conception très restrictive des partenaires possibles dans la zone. Les indications relatives à la politique à mener avec la Chine voisine, qui expriment des hésitations et une certaine
perplexité plus qu’une stratégie claire, confortent ce constat.
Mais le plus important est peut-être ce qui ne se trouve pas dans ce document : s’il comporte des développements, d’ailleurs assez généraux, sur la nécessité de la lutte contre le
terrorisme, les conflits
existant au Moyen-Orient et les foyers de tension existant en Afrique et dans le bassin méditerranéen sont passés sous silence ou seulement évoqués rapidement pour réaffirmer le
soutien aux initiatives de sécurité collective. Ne concerneraient-ils pas la Grande-Bretagne ? Le constat est étrange compte tenu des conséquences potentielles des évènements susceptibles de
se produire dans une zone qui n’est guère éloignée de la Grande-Bretagne et où elle dispose encore d’importants intérêts économiques.
De toute évidence l’Europe n’intéresse guère le
gouvernement britannique, même si les voisins et alliés européens demeurent des « vital partners » : la
Grande-Bretagne regarde plus loin, vers l’Asie, ou de l’autre côté, vers les Etats-Unis. Paradoxalement, c’est la Russie qui pourrait peut-être
justifier un sentiment de solidarité vis-à-vis de l’Europe : alors que le gouvernement britannique est étonnamment hésitant vis-à-vis de la Chine, il est catégorique vis-à-vis de la Russie,
qui ne fait l’objet que d’appréciations totalement négatives, est dénoncée comme « the most acute threat » dans la
région euro-atlantique et est rangée, aux côtés de l’Iran et de la Corée du Nord, parmi les trois « key factors in the deterioration of the
security environment ».
3/ Un document tel que « Global Britain in a competitive
age » a nécessairement une double nature : il est à la fois un acte politique – l’affirmation d’une volonté de gouvernement – et une manœuvre de com – l’image que
son auteur cherche à donner de lui. Le rapport n’échappe pas à cette observation et certaines affirmations ne sont probablement pas destinées à connaître de grands développements.
Au total le manifeste est un peu étrange. Par certains côtés il reflète une certaine nostalgie de l’époque où l’Empire régnait sur les mers du globe et disposait de liens privilégiés en Asie, ou
de l’après-guerre, lorsque la Russie était l’ennemi absolu et les liens atlantiques une évidence. Mais le monde a changé depuis et, même si le gouvernement britannique le reconnaît, notamment
lorsqu’il mentionne la puissance économique de la Chine et l’importance de l’Asie en général, il n’est pas certain qu’il ait pris conscience de tous les enjeux nouveaux ou, plus exactement, qu’il
veuille en tirer toutes les conséquences, qu’il soit prêt aux repositionnements stratégiques souhaitables ou nécessaires : derrière ses apparences modernistes la posture géostratégique
décrite dans le document, finalement, est assez datée.
En toute hypothèse, la Grande-Bretagne se montre étonnamment indifférente vis-à-vis des problématiques majeures pour les Européens : les conflits au Moyen Orient ou en Afrique, les foyers de
tension en Méditerranée, la crise migratoire ou les difficultés des économies européennes. La France et l’Allemagne devront s’en souvenir et ne pas compter sur la Grande-Bretagne pour venir à
bout des difficultés qu’elles affronteront : le contraire aurait surpris mais nous voilà clairement et officiellement avertis. La France est donc condamnée à un dialogue avec un partenaire
allemand dont l’essor économique contraste avec son propre affaiblissement : il est de meilleures positions de négociation.
La Revue intégrée du Royaume-Uni : Que signifie la stratégie « Global Britain » pour la France ?
...par "La Fondation pour la Recherche Stratégique" - Le 01/04/2021.
Après des mois de retard, le gouvernement britannique a enfin publié sa "Revue intégrée" tant attendue. Ce plan
d'action destiné à redéfinir la place du royaume dans le monde arrive près de cinq ans après le vote du Royaume-Uni pour quitter l’UE. Le document vise à répondre à une question : que
signifie réellement la vision du "Global Britain" ?
Pour Paris, deux choses sont importantes : une large convergence de vues et la volonté britannique d’une coopération étroite et stable en matière de
politique étrangère et de sécurité. La France veut également s'assurer que les ambitions internationales du Royaume-Uni ne se fassent pas au détriment d'une coopération plus approfondie en
matière de politique étrangère au sein de l’UE.
Un programme commun
La Revue intégrée montre que le Royaume-Uni et la France partagent largement la même vision du monde. Ce
n’est pas surprenant : les deux pays sont des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, des puissances nucléaires, des alliés dans l'OTAN, possèdent de nombreux
territoires d'outre-mer et d'importantes capacités de projection militaire. Comme la France, le Royaume-Uni cherche à être un acteur entreprenant
et mondial, et se considère comme garant de la sécurité européenne. Bien sûr, l’intérêt particulier que porte Londres à la sécurisation du continent européen n'est pas une
surprise ; nous savons à quel point les événements de ces dernières années (Skripal, Navalny) ont poussé le Royaume-Uni à adopter une ligne plus ferme vis-à-vis de Moscou. Cependant,
qualifier la Russie de menace "la plus significative" servira de clair rappel à la réalité pour les Européens qui pensent que nous devrions nous
soucier plus de Pékin que de Moscou.
La France devrait accueillir favorablement la plupart des aspects géopolitiques et sécuritaires de cette Revue britannique. La France et la Grande-Bretagne s'accordent sur la nécessité d'une présence accrue en Asie ainsi que sur des liens renforcés avec
l'Afrique. Elles partagent une définition élargie des menaces auxquelles elles font face. Ainsi, le Royaume-Uni considère que "le changement climatique et
la préservation de la biodiversité sont la priorité internationale du Royaume-Uni pour la décennie à venir". L'intérêt manifeste pour le Moyen-Orient n'est pas une surprise, mais
l'intention avouée de maintenir en permanence au moins un navire de guerre dans la région est bienvenue. Il est intéressant de noter que la France est citée 11 fois au total, contre 7
mentions pour l’Allemagne. Même s'il est vrai que le Royaume-Uni continue naturellement de considérer les États-Unis comme son premier allié
stratégique.
L’ambition britannique d’une accélération des investissements dans les cyber-technologies et dans le domaine spatial rappelle, sans surprise, les décisions
françaises récentes ; même s'il est entendu que pour ce qui est du domaine spatial, les ambitions du Royaume-Uni ne sont pas du même niveau que celles de la France. Le Royaume-Uni
publiera également la semaine prochaine un document indiquant plus clairement la nature des coupes budgétaires de la défense. Pourtant, l'augmentation du budget de la défense annoncée en
novembre 2020 et les ambitions affichées du premier ministre Johnson de faire du Royaume une "superpuissance scientifique et technologique" sont
impressionnantes. Le pays sait qu'il doit se démarquer après le Brexit et dévoiler sa nouvelle identité stratégique avec vigueur.
En France, seule autre puissance nucléaire européenne, avec laquelle le Royaume-Uni partage une coopération technique forte (comme le rappelle
la Revue), un domaine retiendra particulièrement l'attention : la dissuasion. Paris prendra note de la révision de plafonnement envisagé pour
l’arsenal nucléaire britannique, qui passe de "pas plus de 180" à "pas plus de 260".
Au regard des normes diplomatiques, il s'agit d'une bombe (jeu de mots non-intentionnel), et c’est sans doute à cela qu'un fonctionnaire britannique anonyme
faisait allusion en promettant des décisions de nature à "faire écarquiller les yeux".
Au résultat, le monde pourrait commencer à voir le Royaume-Uni un peu plus comme il voit... la France, c’est-à-dire une puissance nucléaire impénitente et sans
vergogne, qui n'hésite pas à proclamer l'augmentation de son arsenal nucléaire quelques semaines seulement après l'entrée en vigueur du Traité
d'interdiction des armes nucléaires et quelques semaines avant la Conférence d'examen du TNP, un événement qui a lieu tous les cinq
ans. Mais dans l'ensemble, la France, toujours désireuse de voir ses alliés assumer davantage leurs responsabilités dans la défense du continent,
devrait accueillir favorablement cette contribution européenne à la sécurité globale de celui-ci. À Paris, le Royaume-Uni aura un ami, et la France gagnera un autre champion d'une
plus grande transparence sur les arsenaux d'armes nucléaires.
Focus sur l’Indo-Pacifique
Le changement le plus important dans la posture déclarative du Royaume-Uni concerne la région indo-pacifique, qui a été mise en avant dans la Revue intégrée publiée mardi dernier au point d'être mentionnée plus de trente fois. Pourtant, ce que l'on appelle le "changement d'inclinaison"
("tilt") pourrait être une exagération, voire une erreur d'appellation. L'accent est mis sur le renforcement des liens commerciaux, notamment en
cherchant à adhérer à l’Accord de partenariat transpacifique et à obtenir le statut d'observateur au sein de l’Association des Nations de l’Asie
du Sud-Est (ANASE). Sur les fronts de la sécurité et de la défense, le voyage inaugural du HMS Queen Elizabeth amènera le nouveau
porte-avions britannique en Asie et, à plus long terme, le Royaume-Uni aura une présence permanente dans la région. Mais cette dernière restera modeste (seulement un navire de guerre).
La tentative du Royaume-Uni d'approfondir ses partenariats avec des pays amis dans la région, tels que le Japon, la
Corée, l'Australie et l'Inde, reflète également les politiques de la France. Mais il reste à démontrer que Londres parviendra à avoir la "présence
la plus large et la plus intégrée" de toutes les nations européennes dans l'Indo-Pacifique, notamment en approfondissant ses relations avec l'Inde - des indications pourraient être
données à la suite de la visite en Inde du Premier ministre Johnson, son premier déplacement post-confinement, le mois prochain.
À propos du retour de la compétition entre grandes puissances, le Royaume-Uni s'est positionné de manière stratégique : tracer sa propre voie plutôt que
d'être contraint ou défini par elle, et travailler avec ses partenaires quand il le peut. Envers la Chine en particulier, le ton de Londres est très similaire à celui de Paris (bien que le
Royaume-Uni ait adopté une position plus ferme sur Hong-Kong et sur Huawei que la plupart des pays européens). Comme l’UE, tous deux considèrent la Chine comme un "défi systémique", mais aussi comme un pays trop grand pour être ignoré et avec lequel les canaux de communication doivent rester ouverts. Ils devront coopérer avec la Chine sur les questions mondiales, par exemple sur le climat et la biodiversité. Paradoxalement, c'est aussi l'une des raisons
pour lesquelles de nombreuses personnes à Bruxelles continuent de soutenir l'accord global d'investissement entre l'UE et la Chine. Ils y voient un moyen de maintenir un dialogue régulier
avec Pékin.
Ces objectifs n'incluent pas un "endiguement" assumé de Pékin, et les responsables britanniques insistent sur la nature indépendante de la contribution du
Royaume-Uni à la sécurité dans la région - ce qui sera vu avec approbation par la France. Les Britanniques réaffirment leur engagement à faire respecter la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, également une priorité française essentielle. Dans l'ensemble, il serait difficile de conclure que
l’approche de Londres est radicalement différente de celle de Paris
Une relation compliquée avec l'Union européenne
Le problème le plus épineux reste sans conteste l'absence de coopération structurée avec l'UE. Ironie du sort, la vision britannique de "Global Britain" présente des similitudes avec les ambitions de l'UE et, par défaut, de la France en matière de politique étrangère. Comme l'UE, le Royaume-Uni
veut renforcer le pouvoir de la diplomatie réglementaire. Tous deux souhaitent investir davantage de ressources dans la recherche et l’innovation
afin de mieux faire face aux menaces existantes de la cyberguerre, du changement climatique et des futures pandémies.
Une seule phrase de ce rapport long de 144 pages est consacrée à la coopération entre l'UE et le Royaume-Uni en matière de sécurité, bien que le Royaume-Uni ait
déclaré qu'il soutiendrait activement une "coopération UE-OTAN" plus étroite et qu'il collaborerait avec l'UE pour lutter contre le changement
climatique et pour répondre aux menaces pesant sur la biodiversité et le crime organisé.
Mais la Revue intégrée ne dit rien sur la manière dont cette coopération fonctionnerait en pratique,
renforçant l'idée que le Royaume-Uni privilégiera des liens bilatéraux avec les pays ou groupes de pays de l'UE, plutôt que chercher à établir une coopération formelle en matière de politique
étrangère avec l'UE. Néanmoins, il est bon de se rappeler que la simple mention d’une coopération entre l'UE et le Royaume-Uni n'était pas
forcément acquise dans un bilan post-Brexit de Boris Johnson.
Le Royaume-Uni pourrait bientôt découvrir les limites de cette stratégie. L'UE s’est dotée elle aussi de partenariats étroits. Elle entretient un dialogue avec
le Japon et les États-Unis sur la Chine, ainsi qu'un dialogue distinct sur le renforcement du système multilatéral. Ce sont tous des dialogues qui pourraient intéresser le Royaume-Uni. De son
côté, l'UE devrait considérer cette Revue intégrée comme une base de référence, plutôt que comme un produit final. L'UE, et de fait la
France, devraient s’appuyer dessus pour réfléchir, et ce de manière plus stratégique, à la manière dont l'UE souhaiterait travailler avec le Royaume-Uni. Si l'UE a un modèle de coopération
attrayant à proposer et que le Royaume-Uni le rejette, elle pourra au moins dire qu'elle a essayé.
L’avenir de la coopération franco-britannique
Après quatre ans de slogans creux du "Global Britain", le gouvernement britannique publie enfin la stratégie à long
terme pour sa politique étrangère. Alors qu’il était ministre des affaires étrangères, Boris Johnson s'est surtout distingué par ses gaffes. Mais
c’est Boris Johnson le Premier Ministre qui aura porté cette Revue qui est de loin la réévaluation la plus ambitieuse de la sécurité, de la
défense, du développement et de la politique étrangère du Royaume-Uni depuis la guerre froide. Cette Revue doit aussi être vue
comme un travail en cours d’élaboration, qui pourra être modelé et façonné en fonction des événements extérieurs.
Il s'agit d'une contribution importante en amont de la présidence britannique du groupement économique du G7 et de la conférence sur le climat COP-26 avec
l'Italie plus tard cette année. C'est également la première fois que le Royaume-Uni lie à ce point sa politique étrangère à sa politique intérieure. Le gouvernement travaillera en étroite
collaboration avec les universités et les entreprises du pays et compte créer de nouveaux centres, dont un spécialisé dans la cybersécurité dans le nord de l'Angleterre. Le moins que l'on
puisse dire, c'est que ce document de 114 pages mérite d'être applaudi pour son approche globale à la fois du gouvernement et de la société.
Ce qui suit sera déterminant pour la relation franco-britannique. Les deux pays devront discuter de la manière
dont ils coopéreront sur leurs priorités communes : que ce soit de manière bilatérale, avec d'autres pays européens, ou par le biais d'autres formats comme la "Quad" (qui comprend les
États-Unis, l'Inde, le Japon et l'Australie). Plus facile à dire qu'à faire. Si la France a prêté une oreille attentive à l’idée, promue par le Royaume-Uni, de créer de nouveaux groupements
de pays démocratiques, elle ne s'enthousiasme pas nécessairement d’une initiative visant à élargir officiellement le G7 à de nouveaux membres de la région indo-pacifique.
Nous devrons attendre pour voir comment les ambitions du Royaume-Uni se concrétisent dans la pratique avant de juger si le Premier ministre Johnson est fidèle à
sa parole. A minima, cet examen rassurera la France et l'UE sur le fait que le Royaume-Uni ne se tourne pas vers l'Ouest ou pire, ne se
referme pas sur lui-même.
Source : FRS Texte reproduit avec l’aimable autorisation de l’Institut Montaigne