Le billet de Régis de Castelnau

Source : Vu du droit

Un Monde qui change

Entretien avec E. Dénécé

 

L’Occident et l’Ukraine : Les raisons de «l’étrange défaite»

Source : RzO International - Le 23/11/2024.

Comment un Occident qui se pensait tout-puissant et irrésistible a-t-il pu subir la défaite à laquelle il est désormais confronté ? Les États-Unis, les membres du G7, l’OTAN, l’Union, mettant bruyamment baïonnette au canon se sont lancés imprudemment en Ukraine dans une guerre contre la Russie. Dont quiconque voulait bien se pencher sur le réel tel qu’il apparaissait, savait bien qu’elle n’était pas gagnable. Comment les dirigeants des pays théoriquement les plus riches, les plus développés, les mieux éduqués, persuadés d’être les meilleurs ont-ils pu tomber aussi stupidement dans le piège qui leur était tendu ? Et comment expliquer qu’ils continuent à s’agiter, à gesticuler comme des animaux pris dans un marécage, continuant à s’enfoncer et à amener tout l’Occident à une défaite qui va signer la fin de la «globalisation» comme forme moderne de sa domination ?

Aurélien, que nous avons déjà publié ici, utilisant la méthode de Marc Bloch analysant la défaite française de 1940, en décortique les raisons.

Régis de Castelnau

*

J’ai écrit à plusieurs reprises sur le caractère irréel de la façon dont l’Occident aborde habituellement la crise en Ukraine et autour de l’Ukraine. Et sur la dissociation presque clinique du monde réel qu’il affiche dans ses paroles et ses actions. Pourtant, alors que la situation se détériore et que les forces russes avancent partout, il n’y a aucun signe réel que l’Occident revienne enfin à la réalité dans sa compréhension, et il est fort probable qu’il n’apprendra rien, et continuera à vivre dans sa réalité alternative construite jusqu’à ce qu’il en soit traîné dehors par la force.

Il est vrai que certains penseurs audacieux et avant-gardistes de l’Ouest commencent à s’interroger sur la nécessité de négociations, même si elles sont aux conditions de l’Occident. Ils ont commencé à accepter qu’une partie du territoire ukrainien de 1991 devra peut-être être considérée comme perdue, ne serait-ce qu’à court terme. Peut-être, pensent-ils, y aura-t-il une zone démilitarisée à la coréenne en place, garantie par des troupes neutres, jusqu’à ce que l’Ukraine puisse être reconstruite pour reprendre l’offensive. Et puis ils regardent la carte des avancées russes, et ils regardent la taille et la puissance des deux armées, et ils regardent la taille et l’état de préparation des forces de l’OTAN et basculent dans le désespoir.

Mais en fait, non : renoncez à cette dernière phrase. Ils ne regardent pas, et s’ils le faisaient, ils ne seraient pas vraiment capables de comprendre ce qu’ils voient de toute façon. Le «débat» (si on peut l’appeler ainsi) en Occident exclut largement les facteurs de la vie réelle. Il se déroule à un niveau normatif élevé, où certains faits et vérités sont simplement supposés. Pourquoi en est-il ainsi, et quelles en sont les conséquences, ce sera le sujet de la première partie de cet essai. Et ensuite, parce que ces sujets sont intrinsèquement complexes, je continuerai à expliquer comment les comprendre aussi simplement que possible.

Les facteurs de l’aveuglement politique

Nous commencerons par quelques considérations pratiques de sociologie et de psychologie politiques. La première est que la politique est l’exemple classique du phénomène des coûts irrécupérables en action. Plus vous continuez dans une ligne de conduite, aussi stupide soit-elle, moins vous êtes disposé à la changer. Le changer serait interprété comme une reconnaissance d’erreur, et la reconnaissance de l’erreur est la première étape de la perte de puissance. Dans ce cas, la vieille défense («personnellement, j’ai toujours eu des doutes… ») ne va tout simplement pas passer, en donnant gratuitement les termes psychopathiques avec lesquels les dirigeants occidentaux se sont exprimés sur la Russie.

Le second est l’absence de toute alternative articulée. («Alors, Monsieur le Premier ministre, que pensez-vous que nous devrions faire à la place ?») Le simple fait de ne pas comprendre la dynamique d’une crise signifie que vous êtes impuissant à proposer une solution sensée à celle-ci. Il vaut mieux rester avec un navire en perdition dans l’espoir d’être secouru que de sauter à l’eau à l’aveuglette. En pensant que peut-être un miracle se produira.

Le troisième concerne la dynamique de groupe, dans ce cas la dynamique des nations. Dans une situation de peur et d’incertitude comme celle que nous connaissons aujourd’hui, la solidarité en vient à être considérée comme une fin en soi, et personne ne veut être accusé «d’affaiblir l’Occident» ou «de renforcer la Russie». Si vous devez vous tromper, il vaut mieux autant que possible, se tromper en compagnie du plus grand nombre. Il y a d’énormes facteurs dissuasifs à être le premier à suggérer que les choses semblent peut-être assez sombres, et en tout état de cause, qu’allez-vous proposer à la place ? Les chances qu’une trentaine de nations soient en mesure de se mettre d’accord sur une approche différente de celle actuelle sont effectivement nulles. Ce qui n’aide pas le fait que les États-Unis, qui pourraient autrement donner l’exemple, sont politiquement paralysés jusqu’au printemps de l’année prochaine.

Le quatrième concerne l’isolement et la pensée de groupe. Tout le monde dans votre propre gouvernement, tous ceux à qui vous parlez dans d’autres gouvernements, tous les journalistes et experts que vous rencontrez disent la même chose : Poutine ne peut pas gagner, la Russie subit des pertes massives, nous devons reconstruire l’Ukraine, Poutine a peur de l’OTAN et bla bla bla, et bla bla bla. Partout où vous vous tournez, vous recevez les mêmes messages, et votre personnel rédige les mêmes messages pour que vous les transmettiez aux autres. Comment pourriez-vous ne pas finir par supposer que tout cela est vrai ?

Ce sont ce que nous pourrions appeler des facteurs de fonctionnement permanent en politique, communs à toute crise. Mais il y a aussi un certain nombre de facteurs spéciaux à l’œuvre dans cette crise particulière qui me semblent évidents, mais dont je n’ai pas beaucoup parlé. Examinons-en quelques-uns.

Une génération de politiciens idiots

Pour commencer, la génération actuelle de politiciens occidentaux est particulièrement incapable de comprendre et de gérer des crises de haut niveau de quelque nature que ce soit. La classe politique occidentale moderne – le Parti comme je l’appelle – ressemble de plus en plus au parti au pouvoir dans un État à parti unique. C’est-à-dire que les compétences qui mènent au succès sont celles de l’avancement dans l’appareil du Parti lui-même : grimper sur le poteau graisseux et poignarder dans le dos ses rivaux. Même la gestion d’une crise purement nationale – comme nous l’avons vu pendant le Brexit, ou comme nous le voyons maintenant en France et en Allemagne – est en fait au-delà de leurs capacités, sauf peut-être la capacité de tourner une crise à leur avantage politique personnel. Le résultat est qu’ils sont complètement submergés par la crise ukrainienne, qui est d’une ampleur et d’un type qui se produisent peut-être une fois toutes les deux générations. Le fait qu’il s’agisse également d’une crise multilatérale signifie qu’elle nécessite idéalement des compétences avancées en gestion politique juste pour s’assurer que les choses ne s’effondrent pas, et ils n’en ont même pas. À son tour, le recours toujours croissant à des «conseillers» liés à la fortune personnelle de l’homme politique concerné signifie à la fois que les conseils professionnels sont de plus en plus exclus et que les conseillers professionnels sont souvent sélectionnés et promus parce qu’ils sont prêts à donner les conseils que les politiciens veulent.

Jusqu’ici, tout va bien. Mais nous sommes aussi confrontés ici à une crise sécuritaire, et nos classes politiques et leurs parasites ignorent complètement comment faire face à de telles crises, ni même comment les comprendre. Pendant la guerre froide, les gouvernements ont été contraints d’être régulièrement confrontés à des questions de sécurité : souvent, il s’agissait aussi de questions de politique intérieure. Les questions de sécurité étaient également objectivement importantes, car l’Est et l’Ouest se regardaient l’un l’autre de l’autre côté d’une frontière militarisée, la possibilité d’un anéantissement nucléaire n’étant jamais très loin. Rien de tout cela n’est vrai maintenant. Les sommets de l’OTAN ont toujours lieu, bien sûr, mais jusqu’à récemment, ils ont été consacrés aux déploiements de maintien de la paix, aux opérations de contre-insurrection en Afghanistan et à la succession sans fin de nouveaux membres et d’initiatives de partenariat. Jusqu’à présent, aucune décision fondamentale de sécurité n’a été nécessaire dans la vie politique d’un dirigeant actuel d’un pays de l’OTAN (ou de l’UE).

C’est d’autant plus regrettable qu’une crise de sécurité est une chose très complexe et implique toute une série de niveaux, allant de la politique à l’armée/tactique. Et une crise de sécurité est à peu près impossible à gérer au niveau multilatéral : le seul exemple comparable auquel je peux penser est la crise du Kosovo de 1999, lorsqu’une OTAN beaucoup plus petite a effectivement cessé de fonctionner après la première semaine, et a failli s’effondrer complètement.

J’ai déjà souligné que l’OTAN n’a pas de stratégie pour l’Ukraine, ni de véritable plan opérationnel. Il n’a qu’une série d’initiatives ad hoc, collées ensemble par de vagues aspirations sans rapport avec la vie réelle, et par l’espoir que quelque chose se produira. En retour, cela s’explique par le fait qu’aucun pays de l’OTAN n’est dans un meilleur état : nos dirigeants politiques occidentaux actuels n’ont jamais eu à développer ces compétences. Mais c’est en fait pire que cela : sans avoir développé ces compétences, sans avoir de conseillers qui ont développé ces compétences, ils ne peuvent pas vraiment comprendre ce que font les Russes, comment et pourquoi ils le font. Les dirigeants occidentaux sont comme des spectateurs qui ne connaissent pas les règles des échecs ou du Go qui essaient de déterminer qui gagne.

Aujourd’hui, on ne s’attend pas à ce que les dirigeants occidentaux soient eux-mêmes des experts militaires. Il est courant de se moquer des ministres de la Défense sans expérience militaire, mais c’est se méprendre sur le fonctionnement de la défense dans une démocratie, et d’ailleurs sur le fonctionnement d’une démocratie elle-même. Permettez-moi de mettre mon chapeau de professeur pendant un moment, et d’expliquer cela.

Une infirmité à définir des objectifs stratégiques

Les gouvernements ont des politiques à différents niveaux. L’une de ces politiques sera une politique de sécurité nationale, qui à son tour servira de base à des politiques plus détaillées dans des domaines subordonnés : dans ce cas, la défense. Traditionnellement, ces politiques sont gérées par des ministères, dirigés par des personnalités politiques ou des personnes nommées, qui ont des conseillers et, dans la plupart des cas, des organisations opérationnelles pour transformer la politique en activité réelle sur le terrain. Dans le cas du ministère de l’Éducation, les unités opérationnelles sont les écoles et les universités. Dans le cas du ministère de la Défense, il s’agit des forces armées et des établissements spécialisés dans la défense. On ne s’attendrait pas plus à ce qu’un ministre de la Défense soit un ancien soldat qu’un ministre de l’Éducation ne soit un ancien enseignant ou, d’ailleurs, qu’un ministre des Transports soit un ancien conducteur de train. La responsabilité d’un ministre est d’élaborer et d’appliquer des politiques dans le cadre stratégique plus large du gouvernement, et de gérer le budget et le programme de sa région.

Il est donc de la responsabilité de la direction politique – y compris normalement le chef de l’État ou du gouvernement – de dire quel est réellement l’objectif stratégique de toute opération militaire, et de définir une situation (l’«état final») où cet objectif aura été atteint. Si cela n’est pas fait, la planification et les opérations militaires sont inutiles, quelle que soit la qualité de vos forces et la destruction de votre armement, parce que vous ne saurez pas vraiment ce que vous essayez de faire, et donc vous ne serez pas en mesure de dire si vous l’avez fait. C’est là, et non par manque de connaissances militaires, le problème fondamental des dirigeants politiques occidentaux aujourd’hui. En effet, il vaudrait mieux les appeler «managériales», car ils n’ont aucune aspiration à diriger. Ce ne sont que des violoneux et des bodgers formés au MBA, pour qui le concept d’un objectif stratégique au vrai sens du terme n’a fondamentalement aucun sens. Au lieu d’objectifs stratégiques réels, ils ont des slogans et des résultats fantaisistes. Après tout, il est évident que les objectifs stratégiques fixés par le gouvernement doivent être réellement réalisables, sinon il est inutile de les poursuivre. Ils doivent également être suffisamment clairs pour qu’ils puissent être transmis à l’armée pour qu’elle puisse élaborer un plan opérationnel visant à atteindre «l’état final». Et en outre, les dirigeants politiques doivent définir les contraintes et les exigences dans lesquelles les militaires doivent travailler. Parce que les dirigeants occidentaux et leurs conseillers ne savent pas comment faire, ils ne peuvent pas non plus comprendre ce que font les Russes.

Après cela, bien sûr, vous avez besoin d’une couche politico-militaire capable de faire de la planification opérationnelle, et donc de répondre à une série de questions telles que : quels résultats militaires permettront d’atteindre l’état final politique ? Comment y arriver ? De quelles forces aurons-nous besoin ? Comment doivent-ils être structurés et équipés ? Comment faire face aux impératifs et aux limites politiques ? Bien que ces questions soient génériques et que l’on puisse soutenir qu’elles s’appliquent même aux opérations de maintien de la paix, elles s’appliquent évidemment avec de plus en plus de force à mesure que les opérations deviennent plus importantes et plus exigeantes.

Et c’est là le problème essentiel. La guerre en Ukraine implique des forces d’un ordre de grandeur supérieur à celles envoyées en opération par n’importe quel pays occidental depuis 1945. En effet, on peut affirmer que la seule fois où des forces de taille comparable ont été déployées en Europe est entre 1915 et 1918, puis à nouveau en 1944-45. Les armées européennes ont certainement étudié ces campagnes à une certaine époque, mais avec le temps, elles sont devenues des exemples historiques, et non des leçons à tirer applicables. Et la planification de 1950 à 1990 était pour une guerre défensive courte qui deviendrait probablement nucléaire. On peut se demander s’il y a vraiment quoi que ce soit dans l’histoire militaire occidentale récente qui aiderait les commandants d’aujourd’hui à vraiment comprendre ce qu’ils voient.

Ils n’ont pas non plus d’expérience professionnelle récente. Il est également devenu à la mode de se moquer des commandants militaires occidentaux, mais à bien des égards, c’est injuste. En temps de paix, le rôle des hauts dirigeants militaires n’est que partiellement de se préparer à la guerre. Il y a aussi mille autres questions liées aux budgets, aux programmes, aux questions de personnel, aux contrats, à la taille et à la forme futures de l’armée, et bien d’autres. Les hauts responsables militaires doivent être capables de comprendre toutes ces questions et de traiter avec les dirigeants politiques, les diplomates, les fonctionnaires et leurs homologues dans d’autres gouvernements, ainsi qu’avec le parlement et les médias. Il est évident qu’en temps de paix, on n’a pas tendance à choisir un chef de l’Armée simplement parce qu’il a des compétences présumées en matière de combat, si cette personne est une personne abrasive qui se dispute toujours avec le ministre.

C’est pourquoi il est presque universellement le cas que les commandants militaires sont remplacés en bloc au début d’une guerre. Certains commandants peuvent s’avérer être des combattants naturels et d’autres non. Les changements de personnel généralisés sont donc fréquents car la tâche est très différente : nous l’avons vu avec l’armée russe depuis 2022. De même, une armée en temps de paix dans son ensemble prend du temps pour s’adapter à une armée de guerre. Le problème des experts occidentaux, c’est qu’ils observent ce processus de loin, sans le parcourir eux-mêmes. Des armées qui ne connaissent encore que des modes de fonctionnement en temps de paix tentent de comprendre les activités des armées qui sont complètement passées à la guerre.

Enfin, les spécialistes militaires occidentaux sont limités par leurs propres expériences. Imaginez que vous êtes le chef des opérations dans un pays occidental de taille moyenne. Vous vous êtes enrôlé dans l’armée dans les années 1990, alors que les derniers officiers supérieurs qui avaient connu la guerre froide prenaient leur retraite. Vous avez participé à des opérations de maintien de la paix et à quelques déploiements en Afghanistan. La plus grande unité que vous ayez jamais commandée en opération est un bataillon (disons 5 à 600 personnes) et la dernière fois que vous avez été pris sous le feu, vous étiez commandant de compagnie. Comment peut-on raisonnablement s’attendre à ce que vous saisissiez les mécanismes et les complexités de la manœuvre d’armées fortes de centaines de milliers de personnes, le long de lignes de contact longues de centaines de kilomètres, et que vous compreniez ce que font les commandants impliqués et comment ils pensent ? Vous vous concentrerez inconsciemment sur les choses que vous pouvez comprendre, à l’échelle à laquelle vous pouvez les comprendre. Vous vous concentrerez inévitablement sur les détails (quelques chars détruits ici, une nouvelle variante d’artillerie déployée là-bas) plutôt que sur la vue d’ensemble.

Tout cela me semble expliquer plusieurs choses, dont le caractère curieusement épisodique des initiatives ukrainiennes. Certaines d’entre elles ont été clairement suggérées par l’Occident, d’autres par une classe politique ukrainienne très occidentalisée et qui pense en termes occidentaux. (Ironiquement, l’armée est probablement plus réaliste et plus capable de saisir la situation dans son ensemble.) Mais il y a eu très peu de sens d’une stratégie à long terme, ou même d’une réflexion. Prenez les attaques sur le pont vers la Crimée, par exemple. Qu’étaient-ils censés accomplir exactement ? Désormais, les réponses telles que «envoyer un message à Poutine», «compliquer la logistique russe» ou «améliorer le moral à la maison» ne sont pas autorisées. Ce que je voudrais savoir, c’est ce qui devrait suivre, en termes concrets ? Quels sont les résultats tangibles de ce «message» ? Pouvez-vous garantir qu’il sera compris ? Avez-vous envisagé d’éventuelles réactions russes et qu’allez-vous faire alors ? Supposons, encore une fois, que vous compliquiez la logistique russe ? Quel sera le résultat direct, et dans quelle mesure il sera facile pour les Russes de contourner le problème. (Réponse, équitablement.)

Les dirigeants politiques et militaires occidentaux n’ont pas de réponse à ces questions, parce qu’ils n’ont pas de stratégie et ne comprennent pas vraiment ce qu’est une stratégie. Ce qu’ils ont, c’est l’habitude constante de proposer des idées intelligentes et génératrices de publicité, déconnectées les unes des autres, mais qui sonnent toutes bien à ce moment-là. D’une manière générale, ils reflètent la «logique» suivante.

  • Faire quelque chose qui humilie la Russie.
  • Le miracle se produit.
  • Changement de gouvernement à Moscou et fin de la guerre.

Et je n’exagère pas. C’est toute la «planification stratégique» dont l’Occident est capable, et tout ce dont il a toujours été capable. J’ai déjà souligné la nécessité de séparer les aspirations de la stratégie. Pendant une bonne vingtaine d’années, d’importants éléments constitutifs des gouvernements occidentaux ont eu l’aspiration de chasser Poutine du pouvoir et de créer d’une manière ou d’une autre un gouvernement «pro-occidental» à Moscou. De temps à autre, ils ont mis au point des initiatives déconnectées – des sanctions, par exemple – qui, selon eux, pourraient faire avancer les événements dans cette direction. Mais la plupart du temps, ce n’est que de l’espoir, ourri par la croyance qu’aucun dirigeant «anti-occidental» ne peut jamais être représentatif de son peuple, et ne durera donc pas très longtemps de toute façon. Mais cette approche ignore les questions les plus fondamentales de la stratégie : quel est l’état final clairement défini que vous recherchez, comment allez-vous l’atteindre précisément et est-ce effectivement réalisable ? Parce que si vous ne pouvez pas répondre à ces questions, alors toute planification «stratégique» est inutile. En ce qui concerne la dernière question, n’importe quel expert militaire vous dira que même si les militaires peuvent créer les conditions pour que des développements politiques se produisent, ils ne peuvent pas les faire se produire. La relation réelle entre les deux est très complexe. Rappelons qu’en 1918, l’armée allemande, durement touchée par la stratégie d’usure des Alliés, battait en retraite mais toujours sur le sol allié, et que les armées alliées avançant depuis les Balkans étaient encore bien en dehors du territoire allemand. Ce qui a mis fin à la guerre plus tôt que prévu, c’est une dépression nerveuse dans le haut commandement allemand.

La définition d’un «état final recherché» sérieux complètement absente

Et l’Occident ne peut pas répondre à ces questions. L’état final est vaguement défini comme «Poutine est parti», le mécanisme est une «pression» de nature mal définie, et l’idée qu’un gouvernement «pro-occidental» émergera n’est qu’un article de foi. Ainsi, même si une «stratégie» pouvait être construite à partir de ces fragments, elle n’aurait aucune chance de fonctionner. D’où la nature essentiellement réactive des actions occidentales. J’ai déjà parlé du cycle de Boyd, de l’observation, de l’orientation, de la décision et de l’action. Celui qui peut contourner ce cercle plus rapidement et «entrer» dans le cycle de Boyd de l’ennemi, contrôle le développement de la bataille ou de la crise. C’est essentiellement ce que font les Russes (qui comprennent de telles choses) depuis le début de la crise, bien avant 2022.

À l’inverse, l’Occident, confondant de vagues aspirations avec une stratégie réelle, n’a pas compris ce que les Russes essaient de faire, et a traité chaque revers russe, ou revers présumé, comme un pas sur la voie de la victoire sans regarder la situation dans son ensemble. Prenons un exemple simple. Dès le début de la guerre, la stratégie russe a été d’apporter des changements politiques spécifiques en Ukraine en dégradant et en détruisant les forces ukrainiennes, supprimant ainsi la capacité de l’Ukraine à résister aux exigences politiques russes. Une fois que l’Occident s’est impliqué, cette stratégie, bien que la même dans l’ensemble, a été nuancée pour inclure la destruction de l’équipement fourni par l’Occident et, dans une certaine mesure, des unités formées par l’Occident. (Bien que ces derniers, sans les premiers, n’étaient pas une menace.) Deux choses en découlaient.

La première était que la réduction de la capacité de combat ukrainienne à des conditions favorables aux Russes était indépendante du flux et du reflux plus larges de la bataille. Détruire l’équipement stocké était peut-être mieux que de détruire cet équipement au combat. Il valait mieux détruire les munitions stockées que de les détruire une fois qu’elles étaient déployées en unités. Aujourd’hui, en général, les défenseurs dans un conflit militaire ont moins de victimes que les attaquants. Si votre objectif est de détruire la puissance de combat de votre ennemi, surtout si vous savez qu’il sera difficile et coûteux pour lui de la remplacer, alors il est plus logique de laisser l’ennemi vous attaquer, où il perdra plus de ressources que vous. Si vous disposez d’une industrie de défense fonctionnelle et de réserves suffisantes de main-d’œuvre et d’équipement, c’est sans aucun doute la meilleure stratégie, et elle a été pratiquée par les Russes en 2022-23. Mais l’Occident semble incapable de comprendre cela, et a massivement surinterprété les retraits stratégiques russes comme des défaites écrasantes qui allaient bientôt «faire tomber Poutine».

La seconde est que, dans la mesure où la Russie a des objectifs territoriaux, il est préférable de dégrader les forces ukrainiennes au point qu’elles ne puissent plus défendre leur territoire et qu’elles doivent se retirer de manière préventive ou après une défense superficielle, plutôt que d’organiser des attaques délibérées pour s’emparer de territoires. Les Russes disposent de toute une série de technologies qui leur permettent d’attaquer les forces ukrainiennes depuis une position très éloignée de la ligne de contact. Ils peuvent ainsi détruire progressivement la capacité ukrainienne à tenir le terrain sans avoir à risquer leurs propres troupes et équipements dans des attaques directes. Au cours des derniers mois, nous avons constaté que cette étape est effectivement atteinte et que les Russes progressent assez rapidement dans certains domaines clés. Mais l’Occident, qui est obsédé par le contrôle du terrain comme indice de succès, ne peut pas comprendre cela, ayant oublié comment la guerre à l’Ouest s’est terminée en 1918, alors que les gains territoriaux alliés étaient encore assez modestes.

Pour être juste (en supposant que l’on veuille être juste), ces questions sont très complexes : pas plus complexes, peut-être, que la neurochirurgie ou la fiscalité des multinationales, mais pas moins complexes non plus. Ils nécessitent des années d’étude et d’expérience, ainsi qu’une volonté de maîtriser des concepts étranges et parfois contre-intuitifs. L’esprit libéral occidental n’a jamais voulu faire cela : son idéologie de l’individualisme radical est incompatible avec la discipline et l’organisation, et sa recherche de la satisfaction instantanée est incompatible avec toute planification à long terme et sa mise en œuvre soigneuse. En représailles, il aime rejeter l’armée comme étant stupide et belliciste. Lorsque le libéralisme a été contraint par d’autres forces religieuses ou politiques, tout cela était moins évident, mais avec l’émancipation du libéralisme de tout contrôle sur la dernière génération et sa domination de la vie politique et intellectuelle, les sociétés occidentales ont maintenant pratiquement perdu la capacité de comprendre les conflits et l’armée. Il est frappant, en effet, de constater que la plupart du personnel militaire occidental est encore recruté parmi les éléments les plus conservateurs et traditionnels de la société où le libéralisme a eu moins d’impact, et non parmi les élites urbaines libérales.

En route vers une nouvelle «étrange défaite»

Depuis le XIXe siècle, et en particulier dans les pays anglo-saxons, l’esprit libéral a oscillé entre l’aversion et le dédain pour l’armée en temps normal, et les demandes paniquées pour son utilisation en période de crise, ou lorsque les normes libérales doivent être appliquées quelque part. La propagation de la mentalité libérale dans des pays comme la France, qui a toujours été fière de son armée, a produit une classe politique et médiatique européenne largement incapable de comprendre les questions militaires. Les libéraux américains, pour autant que je puisse voir, oscillent eux-mêmes entre la peur de l’armée et la citation sans fin des avertissements du rédacteur de discours d’Eisenhower sur le complexe militaro-industriel, et les demandes d’utilisation de l’armée pour faire respecter leurs normes. (Les remarques d’Eisenhower étaient, bien sûr, un cliché de l’époque : elles n’avaient rien d’original.)

Le résultat est une classe qui prend des décisions et influence qui n’a aucune idée réelle de la stratégie et du conflit, et se contente de répéter des mots et des phrases qu’elle a entendus quelque part, comme des incantations magiques. Une minute, des «F16» (quels qu’ils soient précisément) sauveront la mise, la minute suivante, des «frappes en profondeur» vont faire tomber Poutine.

Ainsi, par exemple, il est impossible pour une société élevée dans la livraison juste à temps et les achats impulsifs sur Amazon de comprendre l’importance de la logistique et la nature de la guerre d’usure que mènent les Russes. Si vous regardez une carte et que vous essayez de la comprendre (je sais !), vous pouvez voir que les forces ukrainiennes se battent au bout de très longues lignes d’approvisionnement, notamment pour l’équipement et les munitions occidentaux, alors que les Russes ne sont qu’à quelques centaines de kilomètres, tout au plus, de leurs frontières. La consommation de carburant des véhicules blindés lourds est mesurée en gallons par mille, et même s’ils peuvent être livrés à la zone d’opérations par train ou par transporteur (ce qui a ses propres problèmes), ils consomment des quantités effrayantes de carburant, qui doivent tous être apportés, dangereusement et à grands frais, dans la zone opérationnelle. Ils tombent également en panne, nécessitent de nouvelles chenilles et de nouveaux moteurs et une réserve inépuisable de munitions, qui doivent toutes être acheminées vers l’avant. Ainsi, les chars Leopard ne sont pas simplement téléportés dans la zone de combat, et lorsqu’ils sont endommagés, ils doivent être renvoyés en Pologne pour être réparés. Et à peu près tous les aspects des opérations militaires nécessitent de l’énergie électrique : oui, même les opérations de drones.

Les Russes le savent bien sûr, et ont ciblé les systèmes de production et de distribution d’électricité, les ponts et les nœuds ferroviaires, les sites de stockage de munitions et de logistique, les concentrations de troupes et les zones d’entraînement. Mais ils ne capturent pas de grandes quantités de territoire avec des poussées blindées audacieuses, donc les Ukrainiens doivent gagner, n’est-ce pas ? Pourtant, les chars sans carburant ni munitions, ou dont les moteurs sont en panne, sont inutiles, et une fois que les forces ukrainiennes sont isolées opérationnellement de leurs lignes d’approvisionnement, ce n’est qu’une question de temps avant qu’elles ne perdent leur capacité de combat et ne doivent se rendre ou s’enfuir. C’est ce qui semble se passer actuellement autour de Koursk. Et si vous menez une guerre d’usure et que vos stocks et vos capacités de réapprovisionnement sont supérieurs à ceux de votre ennemi, vous voulez que votre ennemi épuise ces stocks le plus rapidement possible. Alors pourquoi ne pas envoyer, par exemple, un grand nombre de drones bon marché qui peuvent être remplacés, pour absorber un grand nombre de missiles défensifs qui ne le peuvent pas ? Mais c’est trop pour que la plupart des experts occidentaux présumés puissent comprendre leurs neurones.

Bien sûr, la logique s’applique dans les deux sens. Il est difficile de croire qu’une personne disposant d’une cellule cérébrale fonctionnelle aurait jamais pensé que les Russes prévoyaient «d’occuper l’Ukraine», et encore moins en quelques jours. Dans la mesure où l’idée avait quelque chose de réel derrière elle, c’était un souvenir populaire de l’avancée rapide des forces américaines vers Bagdad en 2003, sans opposition et avec une suprématie aérienne totale. Un exemple pratique simple : une division mécanisée de l’OTAN (à l’époque où l’OTAN en disposait), avançant sans opposition, occupait environ 200 km de route et mettait plusieurs jours à s’organiser, à partir, à arriver et à se déployer en formations de combat. Et ce n’est qu’une division. L’idée de faire cela contre une armée aguerrie de deux à trois fois la taille de la force d’attaque, et de la battre en quelques jours, est plus que ridicule. Encore une fois, regardez la carte. Et pendant que vous y êtes, pensez aux cris hystériques actuels selon lesquels «Poutine veut envahir l’OTAN». Tout ce que j’ai dit sur la difficulté pour l’OTAN d’aller vers l’Est s’applique aux Russes qui vont vers l’Ouest, s’ils sont assez fous pour envisager l’idée.

En supposant, pour les besoins de l’argumentation, que les Russes aient choisi Koursk comme point de départ, il y a environ 2000 kilomètres jusqu’à Berlin, ce qui est le premier objectif vaguement plausible auquel je peux penser. (Oh, ils devraient aller en Pologne pour y arriver.) Juste pour vous donner une idée, pendant la guerre froide, le groupe de forces de l’Union soviétique en Allemagne était fort d’environ 350 000 hommes, complétés par des réservistes rappelés en cas d’urgence. Ils auraient attaqué les forces de l’OTAN en Allemagne, mais ils n’étaient que le premier échelon et on s’attendait à ce qu’ils soient anéantis. Deux autres échelons les suivront donc. La distance totale à parcourir était de quelques centaines de kilomètres. Pour autant que nous le sachions, la soumission et l’occupation de l’Europe occidentale auraient nécessité peut-être un million d’hommes dans des unités de combat, sans parler des flancs occidentaux et de pays comme la Turquie. C’était dans le contexte d’une lutte existentielle, impliquant probablement des armes nucléaires, dont une Russie victorieuse mettrait une génération à se remettre. Nous en sommes un peu loin pour le moment.

Je pense que ce que nous voyons, ainsi qu’une ignorance délibérée coupable, est le début d’une prise de conscience tenace que l’OTAN n’est pas forte mais faible, que l’équipement de l’OTAN est médiocre, que parler d’«escalade» n’a aucun sens en l’absence de quelque chose pour escalader, et que si les Russes se sentaient si enclins, ils pourraient faire beaucoup de mal à l’Occident. Mais même là, les experts occidentaux sont coincés dans des récits de guerre blindée et de conquête territoriale. Les Russes n’ont pas besoin de faire ça, bien sûr. Avec leur technologie de missiles, que l’Occident a constamment ignorée et minimisée, ils peuvent semer le désordre dans n’importe quelle ville du monde occidental, et aucun État occidental n’est en mesure de répondre. Bien sûr, les Russes, qui comprennent ces choses, se rendent compte qu’ils n’ont pas besoin d’utiliser ces missiles : l’effet de levier psychologique qu’ils ont du simple fait de les posséder fera très bien l’affaire. Ironiquement, je pense que les Ukrainiens comprennent ces choses, mieux que leurs supposés mentors de l’OTAN. Leur héritage soviétique et l’armée nombreuse qu’ils ont conservée leur ont donné une conscience de la façon dont les opérations à grande échelle sont menées aux niveaux politique et stratégique, même si, depuis lors, elles ont été prises par l’OTAN

L’historien français et martyr de la Résistance Marc Bloch, qui a combattu dans la bataille de France en 1940, a écrit un livre à ce sujet, publié seulement à titre posthume, après la guerre, intitulé «L’Étrange défaite», dans lequel il a tenté d’expliquer ce qui s’était passé. Sa conclusion centrale était que l’échec était intellectuel, organisationnel et politique : les Allemands ont utilisé un style de guerre plus moderne auquel les Français ne s’attendaient pas et ne pouvaient pas faire face. Le temps a nuancé cette conclusion : les tactiques allemandes étaient certainement innovantes, impliquant des unités blindées rapides et à pénétration profonde et une coopération étroite avec les avions, mais elles étaient également extrêmement risquées et nécessitaient beaucoup de chance pour réussir. Mais Bloch avait raison de dire que les Allemands avaient développé un style de guerre, dicté par la nécessité d’éviter les longues guerres, auxquelles il n’y avait pas de contre-attaque à l’époque, et qui posait des problèmes inattendus et, pendant une période insoluble, au défenseur.

Il y a quelque chose dans l’incompréhension hébétée de la classe politique et militaire française et du peuple lui-même, à l’été 1940, qui semble très pertinent aujourd’hui. La défaite de l’Occident – qui n’est même pas encore reconnu comme tel – est à la fois intellectuelle, organisationnelle et politique.

Les classes dirigeantes de l’Occident semblent n’avoir aucune idée de ce qui leur est arrivé et pourquoi. Ni de ce qui risque de suivre.

source : Vu du Droit

 

Les Français votent mal ? Célérusses !

par Régis de Castelnau

Nicolas Lebourg et Olivier Schmitt se présentent comme des chercheurs spécialistes des mouvements d’extrême droite.

Ils viennent de sortir un bouquin intitulé : «Paris Moscou. Un siècle d’extrême droite». Et présenté par leurs copains de la façon suivante : «Nicolas Lebourg et Olivier Schmitt nous offrent une analyse rigoureuse et documentée».

En fait, il faut être clair, c’est une contribution aux opérations de propagande russophobe visant à faire porter la responsabilité à la Russie de tout ce qui ne va pas en Occident. Et en particulier en prétendant que si les gens votent mal, c’est-à-dire contre le néolibéralisme factieux, célérusses qui leur demandent.

Le titre déjà est rigolo.

J’ai bien connu les relations Paris /Moscou. Elles ne me semblaient pas particulièrement concerner l’extrême droite. Mais là si l’on comprend bien ils font partir leur «étude» de 1924, c’est-à-dire la mort de Lénine jusqu’à aujourd’hui. Il y a bien eu des rapports étroits entre l’extrême droite et Moscou en décembre 1941, c’est quand les armées nazies sont arrivées à 30 bornes de la capitale soviétique. Mais ce n’est pas le propos des auteurs. Eux, ils sont spécialistes des mouvements d’extrême droite donc, armés de leur morale en béton, ils font la chasse aux méchants. Mais attention les bataillons ouvertement nazis en Ukraine, les équivalents dans les pays baltes, la glorification de la collaboration avec le nazisme et de la participation à la Shoah, le triomphe fait aux nazis survivants dans les parlements occidentaux, tout cela ne leur arrache pas une remarque. Non, la cible ce sont ceux qui n’acceptent pas le déferlement de propagande que connaît l’Occident depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2014. Alors sans état d’âme et avec la bonne vieille méthode de l’amalgame ils dressent des listes.

Et voilà qu’à ma grande surprise je figure dans l’index et suis mentionné à la page 248. À propos des terribles interventions russes sur les élections européennes que comment que si les Russes n’étaient pas là, les macronistes de Valérie Hayer auraient dépassé les 80%. Et soucieux de montrer comment la progression du RN c’est Poutine, ils avancent comme preuve que Stephane Séjourné (le neuneu installé au Quai d’Orsay par Attal) a même parlé de «manipulation» ! Oulala, si Séjourné parle de «manipulation» c’est que c’est du sérieux. Il est même connu pour ça Séjourné, pour son sérieux. Et son brio aussi. C’est qu’ils sont «rigoureux» nos chercheurs. Ils ont de bonnes références.

Ils poursuivent : il a pour la première fois, publiquement dénoncé les mensonges de trois personnalités d’extrême droite. De qui s’agit-il ? Caroline Galacteros (ancienne conseillère d’Éric Zemmour), Florian Philippot et Régis de Castelnau (descendant du général Édouard de Castelnau cet ancien avocat communiste évolue depuis plusieurs années dans les cercles d’extrême droite pro-russe.).

J’en apprends de belles dites donc ! Pas que je descends d’Édouard de Castelnau, ça j’étais au courant, même si on se demande ce que ça fout là. Bon alors Lebourg et Schmitt reprennent à leur compte l’accusation de Séjourné : je ferais rien qu’à dire des menteries.

On ne saura pas lesquelles, dommage ça m’aurait intéressé.

Ensuite je suis «ancien avocat communiste». On ne sait pas à quoi se rapporte l’adjectif ancien. Ancien avocat ? Ça n’est pas le bon terme : je suis toujours avocat mais «honoraire». Si c’est à communiste, c’est un mensonge. Je ne suis pas ancien communiste, je suis toujours communiste même si je considère l’actuel PCF comme un groupuscule social-démocrate. Je n’essaye même pas de cacher mon pro-soviétisme dont mon éventuelle russophilie n’est qu’un accessoire. J’ajouterai que mes constantes prises de position favorables au peuple palestinien ne me rangent pas non plus spontanément aux côtés des tenants racistes de la guerre des civilisations. D’ailleurs on notera au passage la grande prudence de nos vaillants chercheurs spécialistes l’extrême droite, quand il s’agit d’aborder la question de celle qui est au pouvoir actuellement en Israël avec les conséquences que l’on sait pour Gaza. Netanyahou, Smotrich, Ben Gvir, connais pas.

Ceux qui me connaissent, qui me lisent, qui m’écoutent et qui me regardent savent tout ça parfaitement. Je n’en fais pas mystère même si on me reproche parfois et pas toujours à tort, d’être un vieux stalinien.

J’apprends aussi que j’évoluerais depuis plusieurs années dans les «cercles d’extrême droite pro-russe» ! En voilà une nouvelle qu’elle est intéressante. Je n’ai jamais rencontré Caroline Galacteros, professionnelle reconnue de la géopolitique que j’ai interviewée une fois à distance, pour ma petite chaîne YouTube. Je ne connais pas Florian Philippot ni aucune des personnes qui ont eu droit au name dropping de nos rigoureux chercheurs. Depuis sept ans, je vis retiré dans ma grotte provençale, et sur cette période mes déplacements parisiens se comptent sur les doigts d’une seule main. Cette affirmation est simplement débile. Venant de Stéphane Séjourné c’est normal. Qu’elle soit reprise telle quelle par nos deux chercheurs «rigoureux», caractérise leur manque de sérieux, ou plutôt dévoile l’objectif de cette publication : apporter sa pierre à des opérations de propagande atlantistes.

Et ce d’autant que Nicolas Lebourg et moi nous connaissons sur les réseaux depuis déjà un bon moment. Et a priori il sait très bien à quoi s’en tenir.

Cette petite sortie n’a absolument pas pour but de me justifier. Mais de montrer avec le pointage de cette absence de sérieux, à quoi et à qui nous avons affaire.

Célérusse, célérusses, célérusses !

Il n’y a pas de sot métier, mais il y en a qui déconsidèrent.

source : Vu du droit

 

Quand Macron se déguise de nouveau en militaire

par Régis de Castelnau

Tout le monde a oublié les rodomontades du kéké de l’Élysée au début de cette année. Comment qu’il était pas trop martial, il voulait déclarer la guerre à la Russie et envoyer une poignée de bidasses «sur le terrain» en Ukraine ! Les patrons de la «grande muette» s’arrachaient les cheveux en silence, si ce n’est le chef d’état-major qui nous gratifiait de quelques coups de menton, histoire de faire plaisir au psychopathe qui l’a nommé.

Sur le plan international, et dans le silence des médias français, le pauvre Macron s’est fait déchiqueter. On n’a guère trouvé pour l’approuver que les Polonais toujours soucieux de donner raison à Marx écrivant Engels : «Dans leur histoire les Polonais ont toujours fait courageusement des choses stupides», et un pays balte soucieux quant à lui qu’on n’oublie pas sa collaboration avec les nazis pour l’extermination des juifs. Les autres pays occidentaux ont regardé ailleurs d’un air gêné.

Depuis le 9 juin dernier, s’est ajoutée la séquence politique grotesque, qu’il vient d’infliger au pays avec sa dissolution. Alors maintenant, les choses sont claires, il est définitivement considéré partout comme un guignol narcissique. On aurait pu espérer sur la question de la guerre en Ukraine il se fasse un peu plus discret. Pensez donc !

Chassez le naturel, il revient au galop. De loin en loin il continue à en faire des tonnes. Et notre pitre élyséen, histoire de concurrencer Boris Johnson et d’agrémenter le bordel, vient à nouveau de se déguiser en militaire et de déclarer la guerre à la Russie. Seule avec l’État factieux britannique armé de sa russophobie rabique, la France a décidé de lever les restrictions pour l’utilisation de missiles à longue portée par Kiev dans la profondeur stratégique.

Ben quoi, c’est normal vous psalmodient les imbéciles de plateau, d’Alla Poedie à Nicolas Tenzer en passant par Xavier Tytelman (au secours !). Les Ukrainiens sont attaqués, il faut qu’ils puissent riposter et frapper Moscou et Saint-Pétersbourg. Avec des missiles dont les Russes ne sauront pas s’ils sont porteurs d’armes nucléaires, lorsqu’ils apparaîtront sur leurs radars.

Le problème c’est que ces armes sont occidentales, et ne peuvent être utilisées qu’avec l’assistance des moyens de l’OTAN. Ce qui veut dire que la profondeur stratégique de l’Ukraine, elle se trouve en Pologne, en Allemagne, en Italie… et en France.

Donc si Zelensky bombarde la Russie dans la profondeur de la Russie avec des armes occidentales guidées par les systèmes de l’OTAN, la riposte russe concernera évidemment ces pays. Les Russes ont rappelé cette évidence.

Bien évidemment, selon sa bonne habitude Macron déclare la guerre à une puissance nucléaire sans en toucher un mot au Parlement.

Comme «manquement» justifiant l’application de l’article 68 de la Constitution et sa destitution, il pèserait d’un autre poids que le refus de nommer Castets à Matignon.

source : Vu du Droit

«GOUVERNEMENT DÉMISSIONNAIRE» : USURPATION EN BANDE ORGANISÉE

LFI a donc mis sa terrible menace à exécution et lancé la procédure de destitution d’Emmanuel Macron en application de l’article 68 de la Constitution.

Deux petits préalables avant de jeter un coup d’œil sur le fond de cette question.

Tout d’abord l’article 68 qui permet de destituer le président de la République est le fruit d’une modification récente pour atténuer la totale immunité accordée au chef de l’exécutif par le texte initial. Le premier alinéa de l’article présente cette possibilité de façon très restrictive : « Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute-Cour. » L’utilisation de la formule « ne peut être destitué qu’en cas de manquement… » démontre que le manquement invoqué doit être particulièrement sérieux. La destitution du chef de l’exécutif est prononcée par le pouvoir législatif réuni en congrès à une majorité de 66 % des parlementaires. Cet article n’a évidemment jamais été utilisé et auparavant, seule une piètre tentative à vocation médiatique avait été lancée contre François Hollande sans que personne n’y prête d’ailleurs attention.

Une gauche minoritaire

En second lieu, pour apprécier la valeur politique de la démarche des amis de Jean-Luc Mélenchon, il faut évaluer la pertinence juridique et institutionnelle du reproche. Si l’on comprend bien, Macron est accusé de ne pas respecter la Constitution et de piétiner la tradition républicaine en ne nommant pas Lucie Castets premier ministre, alors que l’Assemblée nationale élue le 7 juillet dernier est installée et que le gouvernement Attal est démissionnaire. La présentation qui est faite du « manquement incompatible » interprète l’article 8 de la Constitution comme donnant au président de la République ce que l’on appelle une compétence liée. Il serait tenu de nommer premier ministre la personnalité qui lui serait présentée par l’alliance électorale répartie en cinq groupes parlementaires disposant du plus grand nombre de députés. La Constitution ne dit rien de tel, le Président dispose du pouvoir souverain de nommer le premier ministre qu’il veut. À charge pour celui-ci de composer son gouvernement et d’obtenir sous une forme ou sous une autre la confiance de l’Assemblée nationale. Ce à quoi les dirigeants composant les partis membres de l’alliance électorale NFP répondent mécaniquement par l’incantation : « la gauche a gagné les législatives ». Cela n’est pas sérieux.

Les élections européennes du 9 juin dernier qui ont quand même constitué un sondage en grand et en vrai ont accordé aux organisations qui vont constituer ensuite l’alliance électorale NFP un total cumulé de 33 %. Le 30 juin au premier tour des législatives il sera ramené à 27 %, c’est-à-dire un des plus bas étiages de la gauche depuis 1958.

On connaît la suite, avec la nième application de la stratégie du castor mise en place entre les deux tours, avec une nouvelle alliance électorale à la clé entre le NFP et Ensemble, le parti macroniste. Désistements réciproques aboutissant à la réélection de Gérald Darmanin et d’Élisabeth borne avec les voix LFI, celles de Mathilde Panot et Sébastien Delogu par les électeurs de Macron. Jusqu’à François Hollande par ceux de Philippe Poutou…

Réussite de l’opération avec la progression du RN stoppée et l’arrivée à l’Assemblée de la majorité constituée par « l’arc républicain », le bloc bricolé entre les deux tours. C’est la raison pour laquelle, toutes les gesticulations de la « gauche » depuis le 7 juillet, toutes ces mises en cause d’Emmanuel Macron n’ont pour seule motivation que d’effacer les traces de ce nouveau sauvetage du système. Qu’elle avait participé à mettre en place en 2017 en l’envoyant à l’Élysée et en l’y maintenant depuis.

Histoire de donner le change, le parti socialiste a trouvé dans les cartons de Pierre Moscovici et d’Anne Hidalgo une candidate improbable, sorte de Macron en jupon. Arrogance, suffisance, narcissisme, démagogie, gauchisme culturel, Lucie Castets incarne de façon caricaturale la haute fonction publique socialiste qui a tout trahi avant d’organiser l’arrivée de Macron au pouvoir.

En multipliant les provocations, Jean-Luc Mélenchon soucieux de son image usurpée d’opposant irréductible, a veillé soigneusement à empêcher son arrivée à Matignon. Au grand dam de ses amis socialistes qui piaffent à l’idée de réintégrer les palais de la république.

Et c’est bien le refus d’Emmanuel Macron de marcher dans cette combine qui permet d’alimenter cette colère surjouée et de se lancer dans une procédure de destitution dont les initiateurs, savent très bien qu’elle n’ira nulle part. Cette destitution n’est absolument pas leur objectif.

Destituer Macron : Les vrais motifs

Ces choses-là étant dites, force est cependant de constater qu’une procédure permettant de destituer Macron serait à la fois légitime et justifiée. Car si l’article 8 de la Constitution lui donne la compétence de nommer le Premier ministre, et qu’il n’est pas tenu par une tradition républicaine inventée d’obéir aux ordres que lui lancent les gens du NFP, il doit le nommer. C’est une proposition qu’il fait à l’Assemblée nationale, à charge pour celle-ci d’utiliser ses propres compétences pour l’accepter ou le refuser. Et cette compétence qu’elle exerce en continu, participe du contrôle dont elle dispose dans une démocratie parlementaire. En refusant d’utiliser la sienne jusqu’à présent, Emmanuel Macron ne remplit pas ses obligations qui sont de veiller, aux termes de l’article 5, au respect de la Constitution.

En effet, depuis le 16 juillet et la démission de Gabriel Attal, la France n’a plus de gouvernement légitime. L’article 20 de la Constitution nous dit : « Le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation. Il dispose de l’administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50. » Pour que sa légitimité institutionnelle à remplir sa mission soit incontestable, le gouvernement doit se présenter devant l’Assemblée nationale. Or, la bande des anciens ministres à qui Macron a demandé d’expédier les affaires courantes, ne dispose absolument pas du statut institutionnel lui permettant de remplir la mission prévue à l’article 20. Armée de son insondable stupidité, Amélie Oudéa-Castera l’ancienne ministre des sports (et de l’éducation nationale aussi) a tranquillement et fermement craché le morceau et revendiqué le fait de piétiner les règles fondamentales de la démocratie républicaine. Interrogée à propos de sa « mission lors du déroulement des jeux paralympiques elle a tranquillement répondu en souriant : « Je ne ressens pas un statut démissionnaire. On est à fond, un gouvernement mobilisé. Je suis totalement engagée. »

Elle n’est plus ministre. Elle n’a plus aucun droit de gouverner, juste de coller les timbres sur les enveloppes. Elle viole la Constitution et n’essaye même pas de donner le change.

 Et c’est là qu’on apprend que le Secrétariat Général du Gouvernement a produit à l’usage des ministres une note absolument sidérante. De laquelle il résulte que le gouvernement démissionnaire peut prendre deux types de décisions : les décisions ordinaires, et les décisions urgentes.

Il ne peut pas prendre de décision politique, mais on voit bien que plus la situation dure, plus les décisions politiques deviennent des décisions urgentes. C’est la raison pour laquelle, aucun des ministres démissionnaires ne se gêne. Ils occupent tous les médias, parcourent les plateaux, donnent interviews sur interviews. Madame Belloubet organise des réunions de rentrée scolaire, Monsieur Séjourné fait des voyages, porte la parole diplomatique de la France, Madame Oudéa-Castera « mobilisée » ne se « ressent pas démissionnaire ». La note ajoute benoîtement que le «gouvernement démissionnaire» ne peut pas être renversé puisqu’il est déjà démissionnaire… Tant qu’à se moquer du monde, pourquoi ne pas continuer.

Usurpation en bande organisée

Le résultat est que la France est désormais gouvernée par une bande en dehors des règles constitutionnelles françaises qui sont celles d’une république parlementaire. Une bande organisée de délinquants qui plus est, puisque l’article 433-12 du Code pénal prévoit que : « Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait, par toute personne agissant sans titre, de s’immiscer dans l’exercice d’une fonction publique en accomplissant l’un des actes réservés au titulaire de cette fonction ».

Cette situation invraisemblable à laquelle Emmanuel Macron s’accroche sous de mauvais prétextes justifierait à elle seule de mener à son terme la procédure de l’article 68. Il y aurait bien sûr d’autres raisons qui permettraient de charger la barque, les nombreuses affaires de corruption, la soumission à des intérêts étrangers comme dans l’affaire Durov par exemple, les rodomontades bellicistes oubliées du printemps, mais le refus de nommer un premier ministre quel qu’il soit, même Lucie Castets si ça lui chante, est une violation de ses obligations de veiller au respect de la Constitution.

Alors pour faire durer et essayer de pérenniser cette situation, qui l'arrange et qui lui permet de continuer à gouverner, il prétend qu’il anticipe et veut éviter de nommer un premier ministre qui n’aurait pas la confiance des députés. Non seulement il se fout du monde, mais il empiète sur les responsabilités du pouvoir législatif.

Débarrasser la France, d’un irresponsable de ce calibre est désormais une urgence.

Décidément, à quoi pensait Pavel Durov en débarquant à Paris ?

Source : Vu du droit

 

Les conditions de l’arrestation de Pavel Durov sont assez troublantes en ce qu’elles posent la question de savoir pourquoi et comment l’oligarque russe est allé se jeter dans la gueule du loup. Il n’y a finalement que deux hypothèses qui permettraient de répondre à cette question.

Tout d’abord celle d’une inconséquence assez incroyable de quelqu’un s’imaginant qu’il bénéficierait d’une totale sécurité au pays de Macron, pourtant connu comme un des plus serviles larbins de l’Empire. Pavel Durov serait-il à ce point idiot ? Ensuite il est possible qu’il ait été victime d’une opération des services occidentaux qui ont tranquillement bénéficié de toutes les informations nécessaires pour que les pandores soient présents à l’aéroport du Bourget avant même l’atterrissage, pour coffrer l’imprudent.

Ce qui est clair en revanche c’est que l’opération part de plus loin et qu’elle a mobilisé différents services de l’État français, probablement à la demande de ses maîtres américains.

S’il en était besoin, les deux communiqués publiés le 26 août en apportent une confirmation claire. Il s’agit d’abord de celui du parquet de Paris définissant dans quel cadre judiciaire s’était déroulé arrestation de Pavel Durov et les suites de la procédure. Ensuite celui, particulièrement lamentable, contenu dans le tweet publié sous la signature d’Emmanuel Macron sur le réseau X. Sous la signature de Madame Laure Beccuau, le parquet de Paris, autorité de poursuite détaille la collection d’épées de Damoclès qui pèse sur le jeune milliardaire.

On peut d’ores et déjà faire les commentaires suivants :

•            Le parquet nous apprend que c’est le 8 juillet, c’est-à-dire très récemment et en pleine période estivale, qu’une information judiciaire a été ouverte, c’est-à-dire que désormais les « investigations » sont conduites par des magistrats instructeurs qui sont des juges du siège. (Qui sont en théorie impartiaux, mais bien sûr c’est en théorie, défense de rire…)

•            les juges d’instruction ne conduisent pas les investigations directement, ils ont confié ça à la police. Les interrogatoires sont donc conduits par des fonctionnaires de police.

•            La liste considérable des chefs de poursuite sur lesquels porte l’instruction est absolument considérable. Il ne manque rien ! Pour l’instant la procédure se déroule contre « personnes non dénommées », ce qui veut dire que pour l’instant personne n’est mis en examen. Cette situation est très intéressante pour trois raisons :

•            D’abord les incriminations citées et retenues par la procédure couvrent toutes les activités d’une application de messagerie telle que Télégram. Mais également bien sûr WhatsApp, Signal, MSN, Google, Méta etc. etc. On voit bien que l’objectif est donc la CRIMINALISATION de toute activité de messagerie au bon vouloir du pouvoir d’État. Le fait que personne ne soit en l’état personnellement poursuivi, montre bien l’on a lancé un filet très large pour envoyer un message clair. La tranquillité sera garantie à ceux se soumettront au pouvoir d’État.

•            Ensuite ce qui est poursuivi, c’est la « complicité ». On comprend que c’est une « complicité par fourniture des moyens » de la messagerie. Les personnes impliquées dans la procédure française sont moins les auteurs directs des infractions (trafiquants, escrocs, pédophiles, etc.) que les propriétaires du réseau, accusés de l’avoir mis à la disposition des criminels. Il faut savoir qu’en droit français la « complicité » c’est encourir au complice les mêmes peines que celles des auteurs principaux. La ficelle est vraiment grossière.

•            Enfin, on a rajouté à quasiment chacun des chefs de poursuite la qualification de « bande organisée ». C’est une astuce procédurale fournie aux magistrats et aux policiers par le code, qui permet de faire passer la durée de la garde à vue de 24 heures (renouvelable une fois) à 96 heures ! C’est-à-dire 4 jours et 4 nuits où Pavel Durov sera à la merci des flics, éventuellement assisté pendant les interrogatoires par un avocat qui n’aura pas eu accès au dossier…

•            Bon courage à lui pour affronter le petit séjour lui a fait préparer Emmanuel Macron. À l’échéance de celui-ci, il sera présenté aux juges d’instruction qui pourront le mettre en examen, le parquet pouvant réclamer alors sa mise en détention au juge des libertés.

La simple litanie des chefs de poursuite égrainée dans le communiqué du parquet établit qu’il s’agit bien d’une offensive lancée contre la liberté d’expression qui devrait régner sur les réseaux. Probablement concernant Télégram, demandée par les Américains et exécutée par Emmanuel Macron marchant sur les traces serviles de son prédécesseur François Hollande dans l’affaire Evo morales.

Cette présentation est en fait confortée par le risible communiqué publié par le Président de la république sur X.

D’abord le texte est écrit avec les pieds, ce qui semble quand même témoigner d’une certaine fébrilité. « L’arrestation du président de Telegram sur le territoire français a eu lieu dans le cadre d’une enquête judiciaire en cours. Ce n’est en rien une décision politique. Il revient aux juges de statuer. » Eh bien non, Monsieur le Président, il ne s’agit pas d’une arrestation mais d’une interpellation, ce n’est pas une enquête judiciaire, c’est une Instruction c’est-à-dire une information judiciaire. La moindre des choses pour la présidence de la république serait de faire preuve de sérieux en utilisant les bons mots. Ce qui éviterait l’éclat de rire du lecteur qui ponctue fatalement la formule : « Ce n’est en rien une décision politique ». Quant à la phrase finale aussi bâclée et imprécise que les précédentes : « Il revient au juge de statuer », on va répondre, mais statuer sur quoi ?

Il est difficile d’appréhender les tenants et aboutissants de toute cette affaire, pour l’instant obscure. De savoir quels sont les objectifs des différents acteurs et les stratégies envisagées. Mais à l’évidence, c’est bien la guerre menée contre les réseaux sociaux devenus une agora mondiale qui s’oppose aux puissances étatiques et qu’elles essaient de contrôler. On peut imaginer que le patron de Télégram est désormais un otage dans cette guerre. L’enjeu étant probablement pour lui de rentrer dans le rang ou de le payer de sa liberté.

Décidément à quoi pensait Pavel Durov en débarquant à Paris ? Il n’avait jamais entendu parler de Julian Assange ?

 

Et si Macron n’avait pas arrêté le bon Dourov ?

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard husson - Le 28/08/2024.

Pavel Dourov – sorti de garde à vue et présenté à un ce juge ce 28 août 2024 – a un frère, Nikolaï, qui est l’informaticien de génie qui a construit l’infrastructure du réseau. Il se pourrait donc qu’Emmanuel Macron ait en partie manqué son coup. Et ceci d’autant plus que l’on apprend qu’un mandat d’arrêt aurait été émis contre les deux frères dès le mois de mars 2024. Ayant arrêté l’un des deux frères, la police française a donc éventé son plan en ce qui concerne l’autre. Plus on apprend de détails sur l’opération et plus l’on perçoit son côté mal ficelé.

Pavel Dourov est sorti de garde à vue ce mercredi 28 août et il a été présenté à un juge.

On entend beaucoup de rumeurs et d’informations non vérifiées sur l’affaire. Néanmoins, il est intéressant de noter quelques points inconnus jusqu’ici.

Emmanuel Macron se préoccupe de l’arrestation des frères Dourov depuis mars 2024

Il semble que les autorités françaises aient une fois de plus menti. La police aurait émis, selon Politico, des mandats d’arrêt contre Pavel Dourov et son frère Nikolaï dès le mois de mars:

Les autorités françaises ont émis des mandats d’arrêt contre le PDG de Telegram, Pavel Durov, et son frère cofondateur, Nikolai, en mars, selon un document administratif français vu en exclusivité par POLITICO.
Le document indique que l’enquête d’infiltration française sur Telegram est plus large et a commencé des mois plus tôt que ce que l’on pensait jusqu’à présent. (…)

Pavel Durov a été arrêté samedi soir par la police française à l’aéroport du Bourget, à Paris, après que les autorités frontalières eurent prévenu les autorités judiciaires qu’il arrivait d’Azerbaïdjan à bord de son jet privé.
(…)
Les mandats d’arrêt ont été émis après que la plateforme de messagerie ait donné « aucune réponse » à une demande judiciaire antérieure visant à identifier un utilisateur de Telegram, selon le document, qui a été communiqué à POLITICO par une personne directement impliquée dans l’affaire.
Le document souligne également « la coopération quasi inexistante de Telegram » avec les autorités françaises et européennes dans d’autres affaires.
Des mandats d’arrêt ont été émis le 25 mars à l’encontre de Pavel et de son frère Nikolai, cofondateur de la plateforme, pour « complicité de détention, de distribution, d’offre ou de mise à disposition d’images pornographiques de mineurs, en bande organisée ». Les médias français avaient précédemment indiqué que l’enquête avait été ouverte en juillet.

Emmanuel Macron n’a pas arrêté le bon Dourov

Un mandat d’arrêt contre les deux frères peut se comprendre par le fait que seul Nikolaï, vraisemblablement, maîtrise l’accès à l’encryptage des données. Comme l’explique Pepe Escobar sur Zero Hedge:

Nikolai Durov, le frère ultra-discret de Pavels, est le principal architecte de Telegram : maître en mathématiques, deux doctorats, médailles d’or à l’Olympiade internationale de mathématiques. Les Français préféreraient conclure un accord – d’où l’interrogatoire prolongé : mais cela impliquerait de briser Pavel afin qu’il influence Nikolaï pour qu’il leur remette les fameuses clés.

En l’occurrence, le coup est raté, dans la mesure où Nikolaï Dourov fera en sorte de ne pas être à portée de main des autorités françaises ou detout autre gouvernement prêt à l’extrader éventuellement vers la France.

Les effets dévastateurs de la mauvaise foi française

 

 

C’est le genre d’information qui fait très mal. Pavel Dourov aurait, selon le Canard Enchaîné, eu rendez-vous à dîner avec Emmanuel Macron. L’Elysée dément. Si cela est vrai – Dourov n’avait pas intérêt à inventer cela pendant sa garde à vue – qui aura encore confiance dans la parole de Macron.

On peut même aller plus loin : Même si l’histoire n’était pas corroborée, on va la croire dans le reste du monde. L’effet est dévastateur pour Emmanuel Macron en particulier, et pour la diplomatie de la France en général. Ce pays est gouverné par des menteurs et des parjures….Surtout n’acceptez rien de leur part: ils ont donné la citoyenneté française à Dourov et ils l’arrêtent trois ans plus tard.

Tout cela conduit à braquer le projecteur sur le pire visage que notre pays offre au monde aujourd’hui. Encore un point de vue incisif d’Escobar:

Comme on pouvait s’y attendre, l’interrogatoire de Durov se déroule sans aucune transparence. La France est une société atrocement secrète, encline au silence absolu sur les questions sérieuses, à une lenteur éprouvante, ponctuée de rares déclarations formelles. Tout est affaire de procédure – et la bureaucratie est abrutissante.
Pourtant, la bureaucratie française a peut-être donné un indice précieux sur ce qui la dérange vraiment. Elle ne peut tout simplement pas accepter que quiconque utilise – ou fournisse – les moyens de « brouiller les pistes » en termes de transactions financières, de contournement de la censure et de la surveillance.
Cela pourrait donc aller bien au-delà de l’obsession d’obtenir tout ou partie des clés de chiffrement de Telegram. L’appareil bureaucratique français veut faire feu de tout bois pour supprimer toute possibilité de contournement – tout en conservant le pouvoir de punir qui que ce soit.

L’impact de l’arrestation de Pavel Dourov, avec son mélange d’arbitraire et de barbouzerie est terrible pour notre pays.

 

Une revue australienne liée aux “Five Eyes” explique les raisons profondes de l’arrestation de Dourov

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - Le 29/08/2024.

 

Une revue australienne liée aux “Five Eyes” explique les raisons profondes de l’arrestation de Dourov

L’ASPI, le groupe de réflexion australien lié aux “Five Eyes” (les services de renseignement de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et des USA) tiendra bientôt son sommet annuel consacré aux cybertechnologies, aux menaces hybrides, à la désinformation, à l’ingérence électorale, à l’intelligence artificielle, etc. connu sous le nom de « Sidney Dialogue » Or l’un des articles publiés dans la perspective du sommet est consacré à Telegram. Il éclaire singulièrement les raisons profondes de l’arrestation de Pavel Dourov. Il se concentre sur les risques posés par Telegram en tant qu’« outil pour les menaces hybrides » et appelle à une réglementation plus stricte. L’ASPI révèle le motif de l’arrestation de Pavel Dourov que la police de Macron a camouflé sous de faux prétextes. Nous en donnons quelques extraits.

L’article consacré à Telegram par un chercheur du think tank ASPI qui se dissimule derrière un pseudonyme (Fitriani) relativise les raisons officielles données par la police française pour faire arrêter Pavel Dourov:

Derrière les raisons alléguées par la police de Macron

Autrefois célébré comme l’outil ultime de communication libre grâce à son cryptage et à ses pratiques de modération laxistes, Telegram est aujourd’hui accusé par les autorités françaises de faciliter les activités criminelles et d’être éventuellement exploité pour des menaces hybrides, en particulier par des acteurs étatiques russes. Les menaces hybrides associent la force militaire à des tactiques non militaires, notamment les cyberattaques et la désinformation.
Pour contrer ces menaces, les décideurs politiques du monde entier doivent donner la priorité à la réglementation, à la responsabilisation des plateformes et à la promotion de plateformes alternatives moins susceptibles d’être utilisées à mauvais escient, tout en protégeant la liberté d’expression. Il s’agit d’un exercice d’équilibre délicat.

Telegram instrument du soft power russe

Au moins, l’obsession russe est clairement avouée:

Le rôle de Telegram dans de telles opérations hybrides, en particulier dans le contexte des activités soutenues par l’État russe, est devenu de plus en plus évident. La plateforme a été utilisée non seulement pour des communications privées légitimes, mais aussi comme outil de diffusion de désinformation, de propagande et de contenus extrémistes. Cette situation est particulièrement préoccupante dans les zones de conflit telles que l’Ukraine, où Telegram compte 7 millions d’utilisateurs, dont des représentants du gouvernement et des leaders d’opinion.
Bien que M. Durov affirme que sa plateforme n’est pas soutenue par le Kremlin, les liens financiers de Telegram avec des oligarques russes et des entités contrôlées par l’État suggèrent le contraire. Les investissements de personnalités telles que Roman Abramovich et Sergey Solonin, tous deux liés au gouvernement russe, suscitent de vives inquiétudes quant à la susceptibilité de la plateforme à l’influence de l’État.
Cet enchevêtrement financier est alarmant compte tenu de la portée étendue de Telegram en Europe de l’Est, en Asie centrale et au Moyen-Orient, régions qui font l’objet d’opérations hybrides de la part de la Russie.

Un échantillon de pur complotisme occidental

L’auteur donne à fond dans la paranoïa antirusse :

La tentative du gouvernement russe de bloquer Telegram en 2018 et la prétendue délocalisation de l’application à Dubaï pourraient avoir été une façade stratégique, donnant une couverture aux chaînes Telegram qui promeuvent des récits pro-russes, notamment en glorifiant les séparatistes, en justifiant l’invasion de l’Ukraine et en diffusant de la propagande extrémiste – dont certaines auraient alimenté les récentes émeutesanti-immigration au Royaume-Uni.
Cette manœuvre a permis de préserver l’illusion de l’indépendance de Telegram tout en le rendant accessible au Kremlin, ce qui s’inscrit dans la stratégie hybride de la Russie. Il s’agit d’une tactique tout à fait compréhensible : utiliser la désinformation pour affaiblir des adversaires, soit comme alternative, soit comme complément à une confrontation militaire, est une approche rentable.

Macron n’est qu’un pion dans la “guerre hybride” que la sphère anglophone mène contre la Russie

Si vous aviez encore un doute quant à l’autonomie de Macron, cet article vous dégrisera. On comprend que l’arrestation de Paris prend sa place dans un programme piloté par la communauté anglo-saxonne mondiale et qui relève de la guerre hybride:

Alors que les plateformes de messagerie jouent un rôle de plus en plus central dans les communications et les conflits, les leçons tirées de l’essor de Telegram et de ses liens avec les intérêts russes soulignent l’importance de la transparence, de la réglementation et de la promotion de plateformes sûres et responsables.
Des réglementations plus strictes peuvent être mises en œuvre pour les plateformes numériques afin de garantir la transparence de leur politique de régulation du contenu, de leur propriété, de leur régime juridique et du stockage de leurs données. Le monde peut s’inspirer, entre autres, de la loi allemande sur l’application des réseaux (NetzDG), qui oblige les plateformes de médias sociaux à retirer rapidement les contenus illégaux sous peine d’amendes importantes.
La loi sur les services numériques (DSA) de l’Union européenne oblige les grandes plateformes en ligne à évaluer et à atténuer les risques liés à la diffusion de contenus illégaux, à la désinformation et à d’autres activités préjudiciables. De même, la section 230 de la loi américaine sur la décence des communications (Communications Decency Act) a été établie pour tenir les plateformes responsables du contenu qu’elles hébergent tout en préservant la liberté d’expression. En Australie, la réglementation comprend la loi sur la sécurité en ligne de 2021 et le forum des régulateurs des plateformes numériques.
Alors que la communauté internationale a sans doute été trop lente à responsabiliser les plateformes de messagerie et de médias sociaux, ces mesures prises par les gouvernements reflètent une évolution positive vers une meilleure surveillance. L’épisode Telegram rappelle l’importance pour les démocraties de se prémunir contre les multiples menaces hybrides et de mettre en œuvre des mesures adaptées à leurs préoccupations particulières en matière de sécurité.

On se croirait dans l’ancien monde communiste : Ne parlez plus d’arrestation de Pavel Dourov mais “d’évolution positive vers une meilleure surveillance” de l’opinion publique !

UNE QUINZAINE PARTICULIÈRE

Il faut toujours voir les films d’Ettore Scola, c’est la garantie d’un voyage au pays de l’intelligence politique. Il y a bien sûr mon préféré : « Nous nous sommes tant aimés » mais, va savoir pourquoi, la séquence que nous venons de vivre m’a renvoyé à un autre chef-d’œuvre : « Une journée particulière ». Qui raconte l’histoire de la rencontre improbable entre une mère de famille et un dandy homosexuel, seuls sous le regard de la concierge, dans un immeuble déserté de ses occupants partis assister à la réception d’Hitler par Mussolini à Rome le 7 mai 1938. La solitude des deux protagonistes s’oppose ainsi à la foule qui assiste à l’événement, dont le Duce a voulu qu’il exprime le triomphe du fascisme italien.

Un triomphe personnel pour Macron

Le triste état de la société française, le fonctionnement de son État et de son économie pouvait faire naître les plus grandes craintes quant à notre capacité à organiser et à maîtriser un événement tel que les Jeux Olympiques. La semaine d’émeutes à la suite de l’affaire de Nanterre, la catastrophe de l’organisation de la finale de la ligue des champions à Saint-Denis, la gestion erratique de Paris par l’équipe Hidalgo pouvait nourrir des réserves sérieuses. Et de Marine Le Pen à Alain Bauer, les Cassandre ne manquaient pas qui prévoyaient le pire.

Il ne s’est pas produit. L’événement s’est déroulé sans véritable anicroche, et le système Macron en tête l’a transformé en un triomphe personnel pour le président.

Il est évidemment plus facile de raconter l’histoire quand on connaît la fin, mais ce que raconte ce « succès » dit finalement des choses assez terribles sur la société française.

Rappelons que le Président de la République avait subi une défaite politique considérable le 9 juin dernier à l’occasion des élections européennes. Son coup de poker de la dissolution de l’Assemblée nationale fut gagnant. Grâce au ralliement massif d’une petite bourgeoisie urbaine, partis politiques et électeurs compris, toujours décidée à venir au secours du capital oligarchique quand le besoin s’en fait sentir. Apportant massivement ses suffrages à ceux qu’elle prétendait la veille encore comme ses pires ennemis. Les 34 % qui avaient soutenu le programme du RN au premier tour étaient grosjean comme devant, l’alliance électorale de « gauche » bricolée, du haut de ses 27 % se prétendait majoritaire (!). Emmanuel Macron était tranquille, fort des 100 députés supplémentaires que le NFP venait de lui fournir, il bénéficiait du confort politique pour parader pendant « sa « parenthèse enchantée ». Deux élections inutiles et sans aucune conséquence politique véritable, allaient permettre de déployer la parade, et de démontrer que tout était sous contrôle.

La sécurité qui suscitait tant d’inquiétudes fut assurée tranquillement. À partir de la mi-juillet Paris vidée d’une partie de ses habitants, SDF et migrants en tête fut transformée en ville fantôme. 45 000 policiers mobilisés, soit un tous les 10 mètres, impossibilité de circuler sans QR code et sans affronter des barrières métalliques transformant la ville en zoo. Au lendemain de la cérémonie de clôture, les forces de police se sont retirées, envoyant ainsi le message selon lequel elles sont exclusivement au service du pouvoir. L’insécurité, c’est pour les pauvres dans leurs quartiers.

Fête et liesse obligatoires

Il y eut ensuite la cérémonie d’ouverture, de façon très prévisible à base de provocations, toujours les mêmes, d’idéologie obligatoire et de soumission à la culture américaine. Suivie d’une pulsion médiatique parfaitement totalitaire. Tous les médias du système parlant JO matin, midi et soir, plus aucun autre sujet ayant droit de cité. Inutile de donner ici des exemples, l’ensemble s’est complètement avili dans le chauvinisme et l’auto-glorification pour le formidable succès national et international que venait de remporter le couple Macron/Hidalgo.

Alors que le fonctionnement normal des institutions était suspendu sine die par un Macron qui maintenait en fonction un gouvernement démissionnaire, les épreuves sportives se déroulaient en l’absence du pays récoltant habituellement le plus de médailles, et avec la participation des athlètes d’un autre pourtant accusé de génocide par les juridictions internationales.

L’auteur de ces lignes a toujours été passionné par le sport et avait toujours suivi l’actualité en particulier celle des JO. Il n’a jamais assisté à l’expression d’un tel niveau de chauvinisme furieux destiné moins à exalter des victoires, qu’à démontrer la magnificence de la France de Macron. Concernant les épreuves, elles laissent comme d’habitude l’impression d’une construction artificielle où la performance a beaucoup moins d’importance que le pouvoir de l’argent sur ce qui est d’abord et avant tout désormais, une foire commerciale géante. Dans un très beau livre intitulé « Forcenés » Philippe Bordas a dressé l’acte de décès du cyclisme de compétition. En le paraphrasant on peut dresser celui de l’olympisme : « l’olympisme n’a duré qu’un siècle. Ce qui s’appelle encore l’olympisme et se donne en spectacle n’est que farce, artefact à la mesure d’un monde faussé par la pollution, la génétique et le bio-pouvoir. »

Les difficultés réelles, les échecs et les inconséquences ont été passées sous silence. Au point qu’on a trouvé des « témoins » ayant participé aux épreuves pour prétendre que l’eau de la Seine était si pure que l’on pouvait la boire ! Les quelques polémiques qui ont pu passer la barrière du déferlement de propagande ont été vite réglées. S’étonner de la victoire d’une boxeuse d’allure terriblement androgyne dans les catégories féminines vous valait immédiatement anathème : « obsession sexiste d’un néonazi ».

Pendant ce temps-là, dans le total silence des médias français, le massacre s’est poursuivi en Palestine. À peine si l’on a entendu dire que les parlementaires israéliens revendiquaient officiellement le droit de torturer les prisonniers palestiniens en les sodomisant, ou que des ministres souhaitaient faire mourir 2 millions d’habitants de Gaza en les affamant. Et gare à ceux qui s’étonnaient de la présence des athlètes israéliens pourtant tous soldats d’un pays menant une guerre coloniale. De vils antisémites que ceux-là.

Le pire, fut de voir pendant et après la « quinzaine particulière », tout le monde s’aligner, tout le monde se mettre au garde-à-vous, tout le monde le monde en rajouter. Chez les politiques, il n’a manqué personne. On voyait Laurent Wauquiez, le normalien major de l’ENA venir chipoter à Marine Le Pen une réflexion vieille d’un an sur le problème sécuritaire. On entendait Mélenchon pourtant habituellement imperméable à la geste sportive jouer les aficionados. Et tous les autres, alignés et amnésiques, de s’esbaudir sur cette « France enfin retrouvée ». Comme celle, Blacks Blancs beurs de la victoire de 1998 du monde ? Le naufrage médiatique, à base de chauvinisme, d’incompétence et surtout de bêtise fut total. Jusqu’à la presse de « gauche » qui se sentit obligée d’en faire des tonnes.

 La France périphérique et les quartiers immigrés de banlieue étaient absents des gradins, où dominaient les couches moyennes. Pendant ce temps-là toujours, les prolos anglais qui se révoltent contre le « petit-remplacement » dont ils sont l’objet et sont immédiatement soumis à une répression féroce, pire que celle des gilets jaunes en France, de la part d’un système policier et judiciaire entièrement dévoué à l’oligarchie britannique. Et bien sûr sous les acclamations des petits-bourgeois français ne voyant aucun inconvénient à une alliance avec la grande bourgeoisie anglo-saxonne.

Le fascisme ici et maintenant

Alors, comme le couple improbable du film « Une journée particulière », qui ne participe pas à la liesse organisée par Mussolini, les parisiens qui ont fui pour échapper à cette « fête obligatoire », ou les provinciaux qui ont préféré s’en désintéresser, ont eu eux aussi un certain sentiment de solitude. Accentué par une propagande martelant sans fin qu’ils n’étaient que « des grincheux et des pisse-froids » jusqu’à Tony Estanguet martelant : « On se voyait comme un peuple d’irréductibles râleurs, on s’est réveillé dans un pays de supporters déchaînés qui ne veut plus arrêter de chanter. On voulait de la ferveur, on a eu de la passion, on voulait rêver, on a eu Léon Marchand ».

Dans le film de Scola, c’est la radio retransmettant l’événement installée par la concierge de l’immeuble qui renvoie à l’événement fasciste. Chez nous ce sont les médias dans leur ensemble qui ont joué ce rôle, nous renvoyant inlassablement à l’événement-Macron. Et par quelque bout qu’on le prenne, il se réduira toujours à ça.

Macron nous annonça d’ailleurs finalement lui-même : « la vraie vie c’est ce que nous avons vécu ces dernières semaines »

Le fascisme, celui dont les castors nous rebattent les oreilles à chaque fois qu’il faut venir au secours de Macron et pérenniser le néolibéralisme oligarchique, ce ne sont pas des prolos xénophobes, des paysans excédés, des nostalgiques de la Vendée militaire, des imbéciles qui se déguisent, non.

Le fascisme, celui d’aujourd’hui, celui de l’Occident néolibéral, c’est son « rêve d’une société purifiée, hygiénique, célébrant sa dépolitisation dans les liesses obligatoires de liturgies inclusives, rétives à toute différence qui n’ait préalablement obtenu un certificat de conformité de la part de ses autorités morales et vétérinaires. »

Nous l’avons ici et maintenant, il est sous nos yeux.

Jeux Olympiques, la parenthèse enchantée en mode «Zone d’intérêt»

par Régis de Castelnau

La presse système oligarchique est ravie. Télés, radios, journaux, réseaux en font des tonnes pour assurer à Macron le confort de sa «parenthèse enchantée». Comme d’habitude, il est partout. Tripotant l’un, bécotant l’autre, imperméable au très pénible malaise qu’il provoque à chaque fois, il passe sans arrêt d’un site des JO à l’autre pour se mettre en scène. Et gare à celui qui se retient de participer à cette communion surjouée. Se réjouir des succès de Marchand ou de Riner n’est pas suffisant, il faut basculer dans l’adulation de cette France et de son chef, sinon vous êtes un mauvais français.

Et pendant ce temps, depuis maintenant 10 mois, dans un petit pays se poursuit le massacre d’un peuple. Que la justice internationale condamne tous les jours, quand elle ne le qualifie pas de génocide. On y tue les enfants, cible les journalistes et les médecins, bombarde les écoles et les hôpitaux, affame la population, et la prive d’eau courante. Avec le soutien des ministres et des députés de ce pays, on revendique de torturer et violer les prisonniers ! Tout en continuant une entreprise d’épuration ethnique de longue date, pour voler la terre des habitants, en les humiliant quand on ne les tue pas.

Cela se passe en même temps que les JO. Sous les yeux du monde entier dont la partie occidentale apporte son aide au massacre ou regarde ailleurs. Et qui finalement, passée en mode «Zone d’intérêt», s’occupe d’autre chose.

PS : «La Zone d’intérêt» est un film allemand récipiendaire de récompenses internationales, qui raconte l’histoire de la vie paisible de la famille de Rudolf Hoess le directeur du camp d’Auschwitz, dans une maison jouxtant les installations du camp d’extermination en fonctionnement.

source : Vu du Droit

SEUL UN EMPIRE AMÉRICAIN EN FAILLITE EST ASSEZ AVEUGLE POUR APPLAUDIR NETANYAHOU ET SON GÉNOCIDE

Jonathan Cook est un journaliste britannique primé. Il a vécu à Nazareth, en Israël, pendant 20 ans. Il est revenu au Royaume-Uni en 2021. Il est l’auteur de trois livres sur le conflit israélo-palestinien.

Il a publié cet article le 26 juillet dans la revue Middle East Eye.

Tout empire s’effondre. Son effondrement devient inévitable dès que ses dirigeants perdent toute idée de l’absurdité et de l’horreur qu’ils infligent.

Il n’y a qu’un seul pays au monde, en ce moment même, au milieu du massacre israélien à Gaza, où le Premier ministre Benjamin Netanyahu est assuré de recevoir des dizaines d’ovations debout de la part de la grande majorité de ses représentants élus. 

Ce pays n’est pas Israël, où il est depuis de nombreuses années une figure extrêmement controversée. Il s’agit des États-Unis. 

Mercredi, Netanyahou a été tapé dans le dos, salué, applaudi et acclamé alors qu’il avançait lentement – salué à chaque pas comme un héros conquérant – vers le podium du Congrès américain. 

C’est ce même Netanyahou qui a supervisé au cours des dix derniers mois le massacre de quelque 40 000 Palestiniens, dont la moitié sont des femmes et des enfants. Plus de 21 000 autres enfants sont portés disparus, la plupart probablement morts sous les décombres. 

C’est le même Netanyahou qui a rasé une bande de territoire – abritant à l’origine 2,3 millions de Palestiniens – dont la reconstruction devrait prendre 80 ans , pour un coût d’au moins 50 milliards de dollars.

C’est le même Netanyahou qui a détruit tous les hôpitaux et toutes les universités de Gaza et qui a bombardé presque toutes les écoles qui servaient d’abris aux familles rendues sans abri par d’autres bombes israéliennes.

C’est le même Netanyahou dont l’arrestation est demandée par le procureur général de la Cour pénale internationale pour crimes contre l’humanité, accusé d’avoir utilisé la famine comme arme de guerre en imposant un blocus de l’aide qui a provoqué une famine à Gaza. 

C’est le même Netanyahou dont le gouvernement a été reconnu coupable la semaine dernière par la Cour internationale de justice (CIJ) d’avoir intensifié le régime d’apartheid d’Israël sur le peuple palestinien dans un acte d’agression à long terme.

C’est le même Netanyahou dont le gouvernement est jugé pour avoir commis ce que la CIJ, la plus haute instance judiciaire du monde, a qualifié de « génocide plausible ». 

Et pourtant, il n’y avait qu’une seule manifestante visible dans la salle du Congrès. Rashida Tlaib, la seule législatrice américaine d’origine palestinienne, était assise en silence, tenant un petit panneau noir. D’un côté, il était écrit : « Criminel de guerre » et de l’autre : « Coupable de génocide ».

Une personne parmi des centaines essayant silencieusement de faire remarquer que l’empereur était nu.

Protégé de l’horreur

En effet, l’image était frappante. 

Cela ressemblait moins à la visite d’un dirigeant étranger qu’à un général décoré accueilli au Sénat dans la Rome antique, ou à un vice-roi britannique aux cheveux gris venu d’ Inde accueilli au parlement de la mère patrie, après avoir brutalement soumis les « barbares » aux confins de l’empire.  

C’était une scène familière des livres d’histoire : la brutalité impériale et la sauvagerie coloniale, transformées par le siège de l’imperium en bravoure, honneur, civilisation. Et cela nous paraît tout aussi absurde et odieux que lorsque nous nous remémorons ce qui s’est passé il y a 200 ou 2 000 ans. 

Cela nous rappelle que, malgré nos prétentions égoïstes de progrès et d’humanitarisme, notre monde n’est pas très différent de ce qu’il est depuis des milliers d’années. 

C’était un rappel que les élites au pouvoir aiment célébrer la démonstration de leur pouvoir, à l’abri à la fois des horreurs auxquelles sont confrontés ceux qui sont écrasés par leur puissance et des clameurs de protestation de ceux qui sont horrifiés par l’infliction de tant de souffrances. 

Cela nous rappelle qu’il ne s’agit pas d’une « guerre » entre Israël et le Hamas – et encore moins, comme Netanyahou voudrait nous le faire croire, d’une bataille pour la civilisation entre le monde judéo-chrétien et le monde islamique.

Il s’agit d’une guerre impériale américaine – qui s’inscrit dans le cadre de sa campagne militaire pour une « domination mondiale à large spectre » – menée par l’État client le plus favorisé de Washington. 

Le génocide est un génocide entièrement américain, armé par Washington, payé par Washington, couvert diplomatiquement par Washington et – comme le soulignent les scènes au Congrès – acclamé par Washington. 

Ou comme l’a déclaré Netanyahou dans un moment de franchise involontaire au Congrès : « Nos ennemis sont vos ennemis, notre combat est votre combat et notre victoire sera votre victoire. »

Israël est le plus grand avant-poste militaire de Washington dans la région riche en pétrole du Moyen-Orient. L’armée israélienne est le principal bataillon du Pentagone dans cette région stratégiquement importante. Et Netanyahou est le commandant en chef de cet avant-poste. 

Ce qui est vital pour les élites de Washington, c’est que l’avant-poste soit soutenu à tout prix ; qu’il ne tombe pas aux mains des « barbares ».

Déversement de mensonges

Il y a eu un autre petit moment de vérité involontaire au milieu du flot de mensonges de Netanyahou. Le Premier ministre israélien a déclaré que ce qui se passait à Gaza était « un affrontement entre la barbarie et la civilisation ». Il n’avait pas tort. 

D’un côté, il y a la barbarie du génocide israélo-américain actuel contre le peuple de Gaza, une escalade dramatique du siège israélien de l’enclave qui a duré 17 ans et des décennies de régime belliqueux sous un système israélien d’apartheid avant cela.

Et de l’autre côté, il y a une poignée de personnes en difficulté qui tentent désespérément de sauvegarder les valeurs de « civilisation » professées par l’Occident, le droit international humanitaire, la protection des faibles et des vulnérables, les droits des enfants.

Le Congrès américain a montré de manière décisive où il se situait : avec la barbarie. 

Netanyahou est devenu le dirigeant étranger le plus célébré de l’histoire des États-Unis, invité à s’exprimer devant le Congrès à quatre reprises , surpassant même le dirigeant britannique en temps de guerre, Winston Churchill.

Il est une créature de Washington. Sa sauvagerie, sa monstruosité sont entièrement américaines. Comme il l’a imploré auprès de ses supérieurs américains : « Donnez-nous les outils plus vite et nous finirons le travail plus vite. » 

Finissons le travail du génocide.

Dissidence performative

Certains démocrates ont préféré rester à l’écart, notamment Nancy Pelosi , l’une des personnalités influentes du parti . Elle a préféré rencontrer les familles des otages israéliens détenus à Gaza – et non pas, bien entendu, les familles palestiniennes dont les proches à Gaza ont été massacrés par Israël. 

La vice-présidente Kamala Harris a expliqué son absence par un conflit d’horaire. Elle a rencontré le Premier ministre israélien, tout comme le président Joe Biden, jeudi . 

Elle a ensuite affirmé avoir fait pression sur Netanyahou au sujet de la situation humanitaire « désastreuse » à Gaza, mais a également souligné qu’Israël « avait le droit de se défendre » – un droit qu’Israël n’a précisément pas, comme l’ a souligné la CIJ la semaine dernière, car Israël est celui qui viole en permanence les droits des Palestiniens par son occupation prolongée, son régime d’apartheid et son nettoyage ethnique.

Mais la dissidence de Pelosi – et de Harris, si c’est bien de cela qu’il s’agit – n’était que pure performance. Certes, ils n’éprouvent aucun amour personnel pour Netanyahou, qui s’est si étroitement allié, lui et son gouvernement, à la droite républicaine américaine et à l’ancien président Donald Trump.

Mais Netanyahou ne sert que d’alibi. Nancy Pelosi et Harris sont toutes deux de ferventes partisanes d’Israël – un État qui, selon le jugement rendu la semaine dernière par la CIJ, a instauré il y a plusieurs décennies un régime d’apartheid dans les territoires palestiniens, en utilisant une occupation illégale comme couverture pour procéder à un nettoyage ethnique de la population. 

Leur programme politique n’a pas pour objectif de mettre un terme à l’anéantissement du peuple de Gaza. Il s’agit plutôt d’une soupape de sécurité pour le mécontentement populaire des électeurs démocrates traditionnels choqués par les scènes de Gaza.

Il s’agit de les tromper en leur faisant croire qu’il y a derrière des portes closes une sorte de lutte politique autour de la gestion par Israël de la question palestinienne. Ce vote démocrate mènera un jour – un jour très lointain – à une « paix » indéfinie, à une fameuse « solution à deux États » où les enfants palestiniens ne continueront pas à mourir au nom de la sécurité des milices de colons illégaux d’Israël.

La politique américaine envers Israël n’a pas changé de manière significative depuis des décennies, que le président soit rouge ou bleu, que Trump soit à la Maison Blanche ou Barack Obama. 

Et si Harris devient président – ce qui est un grand « si », il faut l’admettre – les armes et l’argent américains continueront d’affluer vers Israël, tandis qu’Israël décidera si l’aide américaine à Gaza sera un jour autorisée. 

Pourquoi ? Parce qu’Israël est la clé de voûte du projet impérial américain de domination mondiale à grande échelle. Parce que pour que Washington change de cap sur Israël, il lui faudrait aussi accomplir d’autres actes impensables. 

Il lui faudrait commencer à démanteler ses 800 bases militaires à travers la planète, tout comme la CIJ a demandé à Israël la semaine dernière de démanteler ses dizaines de colonies illégales sur le territoire palestinien.

Les États-Unis devraient convenir d’une architecture de sécurité mondiale partagée avec la Chine et la Russie, plutôt que de chercher à intimider et à soumettre ces grandes puissances par des guerres par procuration sanglantes, comme celle en Ukraine. 

L’automne à venir

N’oubliez pas que Nancy Pelosi a accusé les étudiants qui protestaient contre le génocide israélien à Gaza, en les accusant d’être liés à la Russie. Elle a exhorté le FBI à enquêter sur eux pour avoir fait pression sur l’administration Biden afin qu’elle soutienne un cessez-le-feu. 

Dans son discours au Congrès, Netanyahou a également diabolisé les manifestants – dans son cas, en les accusant d’être des « idiots utiles » du principal ennemi d’Israël, l’Iran

Aucun des deux ne peut se permettre de reconnaître que des millions de citoyens ordinaires à travers les États-Unis pensent qu’il est mal de bombarder et d’affamer des enfants – et d’utiliser une guerre avec un objectif irréalisable comme couverture.

Le Hamas ne peut pas être « éliminé » par la vague de violence effroyable que commet actuellement Israël, pour une raison très évidente : le groupe est le produit, le symptôme de précédentes vagues de violence effroyable d’Israël. 

Comme l’ont reconnu les experts occidentaux de la lutte contre le terrorisme, la politique génocidaire d’Israël à Gaza renforce le Hamas, au lieu de l’affaiblir. Les jeunes hommes et les garçons qui ont perdu leur famille sous les bombes israéliennes sont les nouvelles recrues les plus ferventes du Hamas .

C’est pourquoi Netanyahou a insisté sur le fait que l’offensive militaire israélienne – le génocide – à Gaza ne pouvait pas prendre fin de sitôt. Il a exigé des armes et de l’argent pour maintenir ses soldats dans l’enclave indéfiniment, dans une opération qu’il a qualifiée de « démilitarisation et déradicalisation ». 

Décrypté, cela signifie un spectacle d’horreur continu pour les Palestiniens là-bas, car ils sont obligés de continuer à vivre et à mourir avec le blocus de l’aide israélienne, la famine, les bombes et des « zones de mort » non signalées. 

Cela signifie également un risque indéfini de voir la guerre d’Israël contre Gaza se transformer en une guerre régionale, et potentiellement mondiale, alors que les déclencheurs d’une escalade continuent de se multiplier.

Le Congrès américain est cependant trop aveuglé par la défense de son petit État fortifié au Moyen-Orient pour réfléchir à de telles complexités. Ses membres hurlaient « USA ! » à leur satrape d’Israël, tout comme les sénateurs romains hurlaient autrefois « Gloire ! » à des généraux dont ils pensaient que les victoires se prolongeraient à jamais. 

Les dirigeants de l’Empire romain n’ont pas plus anticipé la chute à venir que leurs homologues modernes à Washington. Mais tout empire tombe.

Et son effondrement devient inévitable une fois que ses dirigeants perdent toute idée de l’absurdité et de l’horreur qu’ils infligent.

Sortir de l'Histoire en bateaux-mouches

Je n’ai pas regardé la « cérémonie » d’ouverture de la foire olympique. Faut quand même pas déconner.

Assister à un spectacle dispendieux scénarisé par Patrick Boucheron et Thomas Jolly, pour permettre au psychopathe de l’Élysée de se mettre en scène, désolé il y a des limites au masochisme. On savait parfaitement qu’on allait y retrouver cette culture extraordinairement «basse, vulgaire, clinquante comme des verroteries d’explorateurs» qu’un Occident globalisé ayant arraché ses racines, essaye d’imposer au monde.

 Manifestement, ça n’a pas raté. Boucheron et Jolly nous ont offert de façon très prévisible ce qu’il fallait de modernité jobarde et conformiste assortie de quelques provocations woke en direction du public américain pour lui dire : « comme le dit JD Vance, nous sommes des « clients serviles », mais regardez, nous sommes capables d’être aussi cons que vous. » Jusqu’au passage de la péniche des États-Unis saluée d’incroyables spasmes d’adoration soumise, par les commentateurs télévisés.

Mais on a quand même eu une jolie bouffée de joie mauvaise. Avec le « blasphème » de la reproduction woke de la cène chrétienne. C’était passablement dégoûtant, mais c’est tellement bien fait pour les cathos. Qui opposent à toutes ces dérives un pieux silence complaisant et lâche. Et qui encore une fois vont ravaler leur humiliation sans rien dire.

 Je ne vais pas non plus m’intéresser à la partie sportive et pourtant j’ai toujours adoré le sport en général et l’olympisme en particulier. Mais en paraphrasant Philippe Bordas je dirais que « l’olympisme n’a duré qu’un siècle. Ce qui s’appelle encore l’olympisme et se donne en spectacle n’est que farce, artefact à la mesure d’un monde faussé par l’argent, la génétique et le bio-pouvoir. »

La dernière fois que j’ai regardé une cérémonie d’ouverture c’était celle des jeux de Pékin en 2008. Le message envoyé au monde était limpide. C’était celui de Fernand Braudel dans son « Histoire des civilisations » :

« Imaginez une civilisation continue à l’autre bout du monde, inchangée depuis des millénaires, gouvernée par des dynasties impériales plus grandes que celles de Rome, ignorant la philosophie grecque, l’alphabet, la démocratie, le christianisme, l’individualisme, la féodalité, la Renaissance ou les Lumières, dont le peuple surpasse le nôtre en intelligence et dont les institutions surpassent les nôtres en efficacité. Imaginez-le prospérer aujourd’hui, nous dépassant dans tous les domaines d’activité ».

Et pendant ce temps, entre deux bredouillis de Biden, notre empereur à nous qu’on a, nous réélisons Macron et contemplons ravis le spectacle de notre sortie accélérée de l’Histoire.

Dans un défilé de bateaux-mouches, nous n’avons rien d’autre à raconter au Monde que notre soumission.

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