Sombre prédiction : le problème de l’Europe va aller en s’aggravant
...par Roland Lombardi - le 30/12/2016.
Cadre en entreprise, consultant indépendant et analyste chez JFC-Conseil.
Il est docteur en Histoire, spécialisation Mondes arabes, musulman et sémitique.
Il a soutenu en 2015 sa thèse, "Les relations franco-israéliennes durant la guerre du Liban (1975-1990), au regard de la politique arabe de la France initiée à
partir de 1962", à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (IREMAM) d’Aix-Marseille Université.
Il est également membre actif de l’association Euromed-IHEDN.
Il est l’auteur d’Israël au secours de l’Algérie française, l’État hébreu et la guerre d’Algérie : 1954-1962 (Éditions Prolégomènes, 2009). Il collabore
régulièrement au blog RiskEnergy et au site Esprit Corsaire, Observatoire de la Défense et de la Sécurité. Il est l’auteur d’articles et de publications notamment pour la Revue de la Défense
Nationale et la revue Moyen-Orient.
Ses dernières publications : "Quel avenir pour l’armée dans la nouvelle Égypte", in Moyen-Orient, n° 17, janvier 2013, "La résilience du régime de Damas et les
perceptions israéliennes des évolutions syriennes", in EurOrient, n°41, mai 2013 et "Les évolutions du conflit syrien : la vision israélienne" in Confluences Méditerranée n° 89, Printemps 2014.
Il est spécialiste des relations internationales, particulièrement sur la région du Maghreb et du Moyen-Orient, ainsi que des problématiques de géopolitique, de sécurité et de défense
L’analyse effrayante du chercheur norvégien Thomas Hegghammer a encore récemment été corroborée par l’attentat de Berlin. Vaincre l’Etat Islamique ne suffira
absolument pas et c’est bien l’islam radical sur le plan idéologique qu’il faut combattre.
Atlantico : Le Washington Post revenait récemment sur l’argumentaire du chercheur norvégien Thomas Hegghammer qui estime que la situation en
matière de terrorisme en Europe est vouée à empirer à l’avenir. Il se base notamment sur la situation de précarité d’une forte part des jeunes musulmans européens, mais aussi sur le retour de
combattants du front syro-irakien, entre autres. Un tel constat vous semble-t-il pertinent ? Doit-on craindre une résurgence du terrorisme en Europe ?
Roland Lombardi : Je pense, en effet, que la menace terroriste risque plutôt de s’intensifier. Daesh affaibli sur le terrain, les volontaires
au djihad ont de plus en plus de mal à rejoindre les théâtres d’opération en Libye et surtout en Irak ou en Syrie. Sans parler de ceux qui en reviendront ! De fait, comme d’ailleurs le leur
recommandent les responsables de Daesh eux-mêmes, ils seront plus tentés d’agir là où ils vivent, notamment en Europe, le ventre mou de l’Occident. On l’a bien vu avec les derniers attentats qui
ont touché la France et dernièrement l’Allemagne.
Certes, Daesh sera vaincu à plus ou moins long terme. Mais une fois l’EI disparu, un autre mouvement verra sûrement le jour et n’oublions pas qu’Al-Qaïda existe
toujours… Ainsi, le problème n’est pas tant les problèmes socio-économiques (même s’ils ont leur importance), ni même le terrorisme (qui est en définitive un mode opératoire comme un autre) ou
encore l’organisation (interchangeable) mais bien l’ « idéologie », à savoir le wahhabisme et le salafisme djihadiste, en un mot, l’islamisme conquérant et politique, qui survivra à
Daesh et qui sera plus difficile à vaincre…
On combat le terrorisme par la force et la détermination mais aussi par l’intelligence. Car, en effet, le seul moyen de lutter contre une idée est de lui opposer
une autre idée. Le problème est de savoir si, pour l’heure, l’Occident –ou du moins nos dirigeants actuels– a quelque chose de grand, de solide et de sérieux à proposer comme
« idée »…
De plus, n’oublions pas que ceux qui sont en première ligne pour combattre le djihadisme sont les musulmans eux-mêmes et, surtout, les autorités religieuses
sunnites. Aussi diverses et divisées qu’elles soient, ce sont elles qui devraient entreprendre une réelle « révolution religieuse » et un véritable « aggiornamento » dans
l’islam, comme l’a appelé de ses vœux Al-Sissi, le président égyptien, dans son fameux discours de décembre 2014 à Al-Azhar… Mais ça c’est une autre histoire…
Quels sont les principaux ressorts et mécanismes qui corroborent cette thèse ? De quelles armes disposons-nous pour intervenir dessus et lesquelles
utilisons nous aujourd’hui ? L’état d’urgence est-il suffisant ?
Malheureusement, l’Europe, géant économique, n’est cependant qu’un nain politique et géopolitique. Elle est pour l’instant démunie. Mais elle est moins démunie
« matériellement » que moralement. Je m’explique : en dépit d’un manque de moyens certain, les polices européennes sont relativement efficaces. Les services de sécurité et de
renseignement européens s’adapteront rapidement en prenant exemple sur leurs collègues espagnols, italiens et, surtout, français qui ont déjà acquis une certaine expérience dans la lutte contre
le terrorisme en général et le terrorisme islamiste en particulier. Par ailleurs, la coopération à ce niveau va inévitablement se développer et monter en puissance. Toutefois, c’est au niveau
politique que je suis beaucoup moins optimiste. Quid des inefficaces Accords de Schengen ? Quid de la politique catastrophique concernant l’accueil des migrants ? Quid des divergences
de vues sur la Méditerranée et le Moyen-Orient ? Et, enfin, quid du courage de nos dirigeants ?
Dans ce type de terrorisme, dont le but est clairement de faire éclater les sociétés européennes et déclencher des guerres civiles, il faut tout faire (notamment
par des mesures d’exception que les Etats européens se refusent encore à prendre) pour que les citoyens, perdant patience, ne prennent un jour des dispositions dramatiques pour se défendre
eux-mêmes. Comment réagiront-ils lorsqu’une école ou un petit village seront attaqués ? Certes, on ne cesse de le répéter, le risque zéro n’existe pas. Toutefois, le danger doit être réduit
au minimum. Et c’est là que le bât blesse. On sent très bien que nos dirigeants hésitent et tergiversent. Chose étonnante pour des chefs d’Etat « en guerre » ! Finalement, le
sentimentalisme (à géométrie variable), l’angélisme, les idéologies et le manque de courage (et « la diplomatie des contrats » notamment pour la France) sont les véritables plaies des
politiques européennes face au terrorisme, à l’islamisme, à la crise des migrants ou face aux bouleversements proche-orientaux. Passons sur le moralisme inquisiteur, la mièvrerie, les mensonges
et les manipulations de la plupart des médias européens concernant la crise des « réfugiés » (qui est surtout et d’abord, une grave crise géopolitique pour le continent) ou plus
récemment, sur la libération d’Alep. Passons aussi sur certaines élites et intellectuels bien-pensants, parfois décrits comme « spécialistes » du monde arabo-musulman, ceux que Gilles
Kepel appelle justement les « islamo-gauchistes », et qui, ne voyant pas plus loin que leurs idéologies faisandées, recherchent encore des excuses et des circonstances atténuantes
aux terroristes ! Comble de l’ignominie, certaines de ces belles âmes osent même qualifier les jeunes Français, partis faire le djihad en Syrie ou en Irak, de
« vétérans » !
Comment se préparer à vivre avec le terrorisme en guise d’épée de Damoclès ? Quelles sont les sociétés sur lesquelles il pourrait être possible de
prendre exemple ?
En France, ces derniers temps, certains observateurs ont souvent évoqué l’Etat hébreu comme exemple. Mais « copier » Israël pour vivre avec le
terrorisme, comme vous dites, est plus compliqué qu’on ne le pense.
Vous savez, l’Etat hébreu, depuis sa création en 1948, doit faire face à la guerre. C’est une démocratie en guerre et avec un voisinage dangereux.
Les Palestiniens et le monde arabe dans son ensemble ne reconnaissent pas son existence. Israël connaît le terrorisme depuis des décennies (prises d’otages, bombes,
attaques kamikazes, voiture bélier ou attaque à l’arme blanche). C’est durant la seconde Intifada, dans les années 2000, que ce terrorisme a atteint son paroxysme. Aujourd’hui encore, les
attentats sont fréquents (Intifada des couteaux de ces derniers mois).
Mais si nous pouvons observer une résilience notable chez les Israéliens et si l’Etat hébreu réussit relativement à maîtriser ce phénomène, c’est aussi parce que la
population est tout entière mobilisée. Depuis leur petite enfance, les Israéliens savent comment réagir en cas d’attaque ou devant une situation difficile. A leur majorité, la plupart des
Israéliens accomplissent leur service militaire (3 ans pour les hommes, 2 ans pour les femmes). Ensuite, durant toute leur vie, ils deviennent réservistes pour des durées plus ou moins longues.
Certains spécialistes occidentaux avancent même que les réservistes israéliens ont le même niveau militaire que, par exemple, les parachutistes français ! Quoi qu’il en soit, ils connaissent
très bien les armes et savent s’en servir. Le permis de port d’arme est d’ailleurs très facilement délivré en Israël.
Concernant la lutte antiterroriste proprement dite, l’une des différences avec la France, c’est qu’Israël procède, elle, à des arrestations à la moindre menace et
les détentions préventives peuvent durer plus de six mois et sont renouvelables si besoin…
Les Israéliens utilisent, par ailleurs, leur excellence dans le domaine technologique aussi dans la lutte contre le terrorisme (Facial-recognition scanners,
piratage informatique, écoute téléphonique, fichiers informatiques et logiciels ultra-sophistiqués…). Mais ils n’ont jamais délaissé pour autant l’incontournable renseignement humain.
La lutte antiterroriste de l’Etat hébreu n’a jamais cessé d’évoluer. Elle repose notamment sur trois composantes policières (et non l’armée) qui sont en alerte
permanente et dont les chefs, les officiers et les agents sont de parfaits arabisants. Le Shin Beth (ou le Shabak) est le service de sécurité intérieure. C’est un service de contre-espionnage qui
mène des opérations antiterroristes. Il est aussi spécialisé dans le renseignement high-tech (écoutes, surveillance des réseaux sociaux…) mais aussi humain (infiltration,
« retournement », manipulation…).
Ensuite, il y a le Mishtara qui est une police civile chargée de la sûreté publique et du maintien de l’ordre. Puis, le Magav est une police militaire qui est
chargée de surveiller les frontières et de lutter contre le terrorisme.
Quant à l’armée, elle n’intervient que très sporadiquement dans la lutte antiterroriste au quotidien sur le territoire israélien. Toutefois, elle conduit
régulièrement des opérations dans les territoires occupés.
Enfin, une partie de la sécurité du pays (cinémas, plages, concerts, boîtes de nuit, centres commerciaux, aéroports, gares, quartiers ou résidences…) est
sous-traitée par des sociétés privées dont les agents sont armés.
La France (comme la plupart de ses voisins européens d’ailleurs), quant à elle, est une démocratie en paix. Elle a déjà connu, certes, des vagues d’attentats
islamistes dans le passé (années 1970-1980, années 1990) mais les Français vivent en paix depuis des décennies. Il n’y a plus de service militaire depuis les années 1990. La société française est
une société de consommation typique du monde occidental, à savoir matérialiste et très individualiste. J’oserai même dire une société « aseptisée ». D’où l’effroi et l’émotion après les
tragédies de ces 18 derniers mois et, surtout, l’absence de réaction violente de la population. Aujourd’hui, avec 5 à 8 millions de musulmans en France dont la grande majorité souhaite vivre et
travailler paisiblement, la société française reste toutefois très fracturée et le « vivre-ensemble » n’existe plus que dans les rêves de quelques idéologues.
Autre exemple souvent cité, l’exemple russe. Là encore, nous sommes dans des univers différents.
Il y a près de 10.000 mosquées en Russie et la plus grande d’Europe, inaugurée en 2015, se trouve d’ailleurs à Moscou. L’islam est implanté depuis près de 1300 ans
dans certaines régions comme le Nord-Caucase, dans l’Oural et près de la Volga.
Aujourd’hui, près de 15% de la population russe est musulmane, soit entre 20 et 22 millions (la plus importante des minorités) sur 150 millions d’habitants. C’est
donc cette proximité très ancienne avec l’islam qui fait des Russes de fins connaisseurs de cette religion. L’Institut d’études orientales (IVA) de l’Académie des sciences de Moscou est
justement, avec ses deux cents ans d’existence, l’un des meilleurs centres de recherches et de réflexions sur l’islam et l’Orient de la planète.
Au XVIIIe siècle, c’est sous l’influence des réformes de la tsarine Catherine II que l’islam russe, essentiellement des Tatars (majoritaires), se réforma pour
donner le djadidisme. Pour beaucoup, ce « modèle de Kazan (capitale du Tatarstan) » représente un exemple d’islam moderne, libéral et éclairé par une tradition érudite. Il n’en reste
pas moins qu’aujourd’hui l’islam de Russie, sans pour autant avoir une autorité centrale, est toutefois relativement discipliné, hiérarchisé et organisé. Il existe notamment de nombreuses
institutions représentatives comme l’une des plus importantes et des plus anciennes, l’Assemblée spirituelle des musulmans (DUM) de Russie, créée en 1788 et qui est une autorité administrative
chargée de nommer les mollahs et de veiller au respect de la législation russe. Cette institution a évolué au fil des siècles et s’est démultipliée au niveau régional.
Quoi qu’il en soit, même si elles restent toujours sous étroite surveillance de la part des autorités russes, les diverses organisations musulmanes et les autorités
religieuses du pays demeurent dans l’ensemble relativement loyales et fidèles à la patrie.
Certes, la Russie a été naturellement confrontée aux influences turques et déstabilisée dans ses périphéries par des mouvements djihadistes (Caucase, Asie
centrale). C’est pourquoi la Fédération a développé une politique souveraine envers « son islam » et c’est une raison pour laquelle, depuis le début des années 1990, les imams étrangers
ont été expulsés et tout financement comme toute influence extérieure, notamment venant des pays du Golfe, sont interdits. D’ailleurs, le wahhabisme, le salafisme ainsi que les Frères musulmans
sont proscrits en Russie !
Dans le Caucase, notamment, le Kremlin a repris le contrôle des imams caucasiens et déverse des millions de roubles tout en s’appuyant, comme justement en
Tchétchénie avec le très controversé Ramzan Kadyrov, sur des potentats locaux et féroces qui font régner la paix et l’ordre jusqu’au fond des mosquées…
Bien sûr, le pays n’est pas pour autant épargné par le même phénomène de radicalisation qui touche les musulmans ou les convertis des pays occidentaux. Par exemple,
plus de 2.400 Russes et près de 4.000 ressortissants des anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale auraient rejoint les rangs des djihadistes en Syrie. Notons, au passage,
qu’officiellement les autorités moscovites ont interdit ces départs. Mais dans les faits, elles ne les ont pas vraiment empêchés. Peut-être même qu’elles les ont parfois facilités afin d’éloigner
le danger du territoire national tout en espérant « fixer » à l’extérieur ces « traîtres » pour pouvoir les « traiter » avec plus d’efficacité ultérieurement… comme
c’est le cas aujourd’hui en Syrie.
Actuellement, en Russie, les imams, les muftis, les théologiens, les savants et toutes les instances religieuses, comme l’Université islamique de Moscou, sont
mobilisés au plus haut niveau pour endiguer l’extrémisme religieux et faire redécouvrir l’islam traditionnel. Parallèlement, le pouvoir et les autorités religieuses travaillent main dans la main
pour faire concilier islam et patriotisme. En 2015, le Conseil des muftis de Russie a notamment lancé « la doctrine sociale des musulmans russes », un document à caractère patriotique
mais précisant la place et le rôle des musulmans dans la vie de la Russie du point de vue des sources du droit musulman comme de la législation russe.
Par ailleurs, le Conseil des muftis de Russie, le Conseil spirituel des musulmans et le Conseil tchétchène des fatwas ont condamné Daesh comme « ennemi de la
religion » et déclaré que ses membres doivent être « traités, non en tant que musulmans, mais en tant que criminels ».
Quant au puissant FSB (ex-KGB), le service de sécurité intérieure russe (comme le SVR, le service extérieur de l’espionnage russe), il s’active depuis des années à
combattre impitoyablement le terrorisme. Car la Russie est, comme la France, une des principales cibles de ce fléau. Cette menace du terrorisme islamiste a toujours été présente sur le sol russe
et le Kremlin a pris la mesure du problème il y a déjà bien longtemps. Si le FSB est connu pour son expertise dans la lutte antiterroriste, notamment grâce à son renseignement humain, ses
infiltrations voire parfois ses intrigues, ses ruses et ses manipulations (vieilles, mais non moins efficaces, méthodes du feu KGB), les autorités russes sont très bien conscientes que le risque
zéro n’existe pas dans ce domaine. Néanmoins, la Russie semble mieux armée que les faibles démocraties occidentales contre ce genre d’attaques. Tout d’abord, parce qu’en temps normal, déjà, les
responsables russes sont peu adeptes des Droits de l’homme et de l’Etat de droit. Alors en situation de « guerre », on peut aisément penser qu’ils ne s’encombrent nullement de ce genre
de considérations…
En Russie, les autorités ont moins de scrupules et il n’y a pas d’hésitations ni de tergiversations sur cette question. Du côté de Moscou, les mesures d’exception,
parfois très expéditives, et la manière « cosaque » sont préférées aux bougies, aux discours de compassion ou encore aux « numéros verts », et autres « centres de
déradicalisation » ou bracelets électroniques… Sur les bords de la Moskova, on écarte donc tout angélisme ou idéologie pour privilégier le fameux « principe de précaution » qui
permet d’interner préventivement tout suspect.
En conclusion, la guerre contre l’islamisme sera longue, difficile et douloureuse. La France, la Russie et Israël sont donc des pays très différents. Français,
Russes et Israéliens, nous l’avons vu, n’ont pas les mêmes logiciels mentaux. C’est pour cela que tout n’est, bien sûr, pas transposable mais, si des idées sont bonnes, il est normal que la
France s’en inspire.
Cependant, elle peut tout aussi bien avoir ses propres solutions ou adapter les recettes israéliennes ou russes à la spécificité française.
D’abord, en aval, je pense qu’il aurait fallu, profitant de l’effroi et de l’émotion générale qui ont suivi les attentats de janvier et novembre 2015,
« frapper vite et fort » et imposer des mesures d’exception comme De Gaulle l’avait fait contre l’OAS dans les années 1960.
Ainsi, nous aurions pu fermer nos frontières, expulser les étrangers dangereux, fermer la centaine de mosquées salafistes (toujours ouvertes) et, comme en Russie,
interdire ce mouvement comme celui des Frères musulmans (interdit aussi en Arabie saoudite) sur le territoire. Avec des mesures d’exception, les 15.000 Fiches S et tous les djihadistes français
qui reviennent et reviendront du Moyen-Orient pourraient être neutralisés d’une manière ou d’une autre et une bonne fois pour toutes.
Ensuite, il faudra réaffirmer l’autorité de l’Etat et en finir avec le laxisme pénal et la victimisation des délinquants, par exemple en alourdissant les peines, en
rabaissant la majorité pénale à 15 ans et en coupant toute aide sociale (effet très dissuasif) aux familles des candidats du djihad et des apprentis terroristes. L’état d’urgence et
l’autorisation donnée aux policiers de porter leurs armes en dehors du service ont été de bonnes choses. Pour le coup, nous pourrions ici nous inspirer de l’exemple israélien en revoyant la
législation française sur la légitime défense et les armes, notamment pour nos sociétés de sécurité privées, tout en développant notre réserve citoyenne et, pourquoi pas, restaurer un service
national qui renforcera par la même occasion notre cohésion nationale.
En amont, peut-être faudra-t-il, aussi et surtout, une sorte de nouveau concordat avec la création d’un véritable islam de France patriote, sans influences
extérieures et dont l’organisation pourrait alors s’inspirer de l’islam de Russie… Par ailleurs, il sera nécessaire d’entreprendre une véritable révolution dans la formation professionnelle et
l’éducation nationale, dans le fond (arrêt des repentances et de l’autoflagellation historiques si néfastes pour toute cohésion nationale) comme dans la forme, afin de redonner un roman national
aux futurs citoyens français.
Enfin, à l’international, il faut abandonner notre « Irréalpolitik », revoir nos relations et nos dépendances commerciales avec les monarchies du Golfe et
se rapprocher de la Russie. Ainsi, comme elle, nous définirons et adopterons expressément une politique ambitieuse, claire et cohérente en Méditerranée (notre frontière la plus importante) et au
Moyen-Orient, basée non plus sur nos seuls profits commerciaux mais sur la défense de nos intérêts vitaux, une lutte impitoyable contre l’islam radical et politique (dans notre intérêt et celui
des musulmans) et sur une concrète « ingérence de la coopération ou du co-développement ». Ceci, afin de répondre rapidement et sérieusement, et avant qu’il ne soit vraiment trop tard,
aux immenses défis que sont la démographie explosive du Sud et, bien sûr, le terrorisme que nous venons d’évoquer.
Mais pour cela, il nous faut de vrais hommes d’Etat et non des petits gestionnaires à courte vue…
Roland Lombardi
Non seulement nous ne brandissons plus l’épée, mais nous répugnons à la sortir
Il faut se réapproprier nos certitudes volontaristes. Il faut impérativement retrouver un idéal.
Atlantico vient de publier une interview de Roland Lombardi, consultant indépendant et chercheur à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et
musulman. Ce fin connaisseur de l’islam met le doigt sur une réalité que nos gouvernants se refusent à observer. Dédaignant la langue de bois, il exprime librement ses pensées :
« Certes, Daesh sera vaincu à plus ou moins long terme. Mais une fois l’EI disparu, un autre mouvement verra sûrement le jour et n’oublions pas qu’Al-Qaïda
existe toujours… Ainsi, le problème n’est pas tant les problèmes socio-économiques, ni même le terrorisme ou encore l’organisation mais bien l’« idéologie », à savoir le wahhabisme et
le salafisme djihadiste, en un mot, l’islamisme conquérant et politique, qui survivra à Daesh et qui sera plus difficile à vaincre… »
De même sa vision de la situation française est sans concession :
« Aujourd’hui avec 5 à 8 millions de musulmans en France dont la grande majorité souhaite vivre et travailler paisiblement, la société française reste toutefois
très fracturée et le “vivre ensemble” n’existe plus que dans les rêves de quelques idéologues. »
Ses remèdes stratégiques s’appuient sur les expériences étrangères.
Ainsi, si Israël se bat avec autant de force, c’est parce qu’il possède un credo religieux propre. Comme elle n’est entourée que de populations hostiles, la seule
solution de la nation juive est de faire face. Dans ce pays c’est se battre ou être anéanti.
De même, si la Russie contient un islam activiste, c’est que sa société et son régime politique se basent principalement sur deux piliers : le patriotisme
russe et l’orthodoxie. L’islam implanté dans le nord du Caucase depuis 1300 ans a concédé le vivre ensemble à une Russie où résident 160 nationalités. Foi contre foi, les forces orthodoxes et
islamiques s’observent et se font face. Depuis des siècles elles se jaugent et la plus faible en nombre sait que tout agissement en dehors de la légalité entraînerait des représailles sanglantes.
Souvenons-nous : en octobre 2002, 850 spectateurs du théâtre Doubrovka à Moscou pris en otages par une cinquantaine de terroristes tchétchènes. Au matin du quatrième jour, les forces
spéciales russes donnèrent l’assaut et tuèrent tous les terroristes mais, hélas, 130 otages périrent pendant l’engagement. Quand on demanda aux familles des victimes ce qu’elles pensaient de
l’attaque, l’ensemble de celles-ci répondirent qu’elles approuvaient l’intervention, même si leurs fils ou leurs filles avaient été tués durant le coup de main.
Mais revenons à Lombardi.Dans son texte, il manque l’élément moteur pour lutter efficacement contre le terrorisme
islamique : la référence à des contre-valeurs.
Il faut se réapproprier nos certitudes volontaristes. Il faut impérativement retrouver un idéal. Un pays ne peut lutter contre une religion hégémonique qu’en
recouvrant les vertus qui transcendent ses citoyens. Nous ne croyons plus en nous, en notre civilisation occidentale et chrétienne et en notre pays. La société de la mollesse, du bien-être et du
progrès a anéanti celle de l’effort, de l’abnégation et du courage.
Non seulement nous ne possédons plus les convictions nous permettant de brandir l’épée mais, de plus, nous répugnons à la sortir.
Comme disait Romain Rolland : « Le pire mal dont souffre le monde est, non la force des méchants, mais la faiblesse des
meilleurs. »
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